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1930-2024 : l’ancien député Yves Michaud, le « Robin des banques », est mort

by Nouvelles
1930-2024 : l’ancien député Yves Michaud, le « Robin des banques », est mort

Le « Robin des banques » n’est plus. L’ex-homme politique, journaliste et homme d’affaires Yves Michaud a rendu l’âme mardi soir.

Le Devoir a pu confirmer la nouvelle, d’abord relayée par Radio-Canada. L’ancien député libéral, qui avait été convaincu par René Lévesque de faire le saut au Parti québécois en 1970, avait 94 ans. Au-delà de sa carrière politique, il est connu pour avoir dirigé les journaux La Patrie et Le Jourpour avoir occupé le siège de délégué général du Québec à Paris et pour avoir fondé le Mouvement d’éducation et de défense des actionnaires en 1995.

Ce sont les gestes qu’il a posés à la tête de cet organisme, comme défenseur des actionnaires minoritaires, qui lui vaudront le surnom de « Robin des banques ».

Plusieurs décennies plus tôt, le natif de Saint-Hyacinthe se fait d’abord connaître du grand public comme député libéral de Gouin (1966-1969). Opposé à l’adoption du projet de loi 63 sur la langue française, dont il déplore le manque de mordant, il démissionne en octobre 1969.

En 1970, Yves Michaud rejoint son ami René Lévesque au Parti québécois. Il tentera sans succès d’être élu sous la bannière de la formation politique en 1973. Suivront des mandats de haut-commissaire à la Coopération au ministère des Affaires intergouvernementales, puis de délégué à Paris, poste qu’il occupera pendant cinq ans.

« Pour moi, Yves Michaud, c’est la France », déclare l’ancienne ministre péquiste Louise Beaudoin, qui avait succédé au délégué général dans les locaux de la rue Pergolèse, au coeur du XVIe arrondissement. « Il a développé les relations politiques qui font qu’on était assuré de la reconnaissance internationale de la France si on avait voté Oui au référendum. »

« Il a eu cette vie remplie de soif de justice pour la langue, pour le pays et pour les investisseurs », a souligné le député péquiste Pascal Bérubé mercredi, quelques instants après avoir appris le décès de M. Michaud. C’est lui qui, en 2020, avait présenté une motion — rejetée par la Coalition avenir Québec — afin d’effacer un blâme adressé par l’Assemblée nationale à Yves Michaud en 2000 pour des propos antisémites.

Un blâme jamais retiré

En décembre 2000, les députés du Parlement québécois avaient en effet adopté une motion de blâme reprochant à Yves Michaud d’avoir tenu des « propos inacceptables » à l’égard de la communauté juive. François Legault, qui siégeait comme député du Parti québécois, et Lucien Bouchard, alors premier ministre, l’avaient tous avalisée. « On s’est tous levés comme des moutons, si je peux dire. C’était la ligne de parti », raconte Louise Beaudoin.

Yves Michaud a toujours nié avoir tenu ces propos. En 2011, une cinquantaine d’élus et d’ex-élus du Parti québécois ont exprimé leurs regrets par rapport à cette motion de blâme.

Le premier ministre Legault ne s’est pour sa part jamais excusé d’y avoir donné son aval. En remettant une médaille de l’Assemblée nationale à M. Michaud, il y a presque deux ans, la députée solidaire Ruba Ghazal souhaitait contribuer à réparer cette « erreur ». « J’ai comme un sentiment de regret, de grand regret, a-t-elle dit en entrevue mercredi. Je sais que ç’a été une grande blessure pour lui et pour sa famille. »

Celui qui était alors président de l’Assemblée nationale, Jean-Pierre Charbonneau, était aux premières loges lors de l’adoption en décembre 2000 de la motion de blâme contre l’ex-député Michaud. « Comme président, je ne pouvais pas faire grand-chose, confie-t-il au Devoir un quart de siècle plus tard. Avec le recul, si on m’avait saisi comme président de la légalité de la motion ou de son caractère réglementaire, peut-être que j’aurais pu trancher. Mais bon, on ne refait pas l’histoire… »

M. Charbonneau a bien tenté d’obtenir réparation pour le citoyen honni avec l’appui de l’ancien premier ministre Bernard Landry. « Ça n’a jamais abouti parce qu’il y en avait quelques-uns qui s’entêtaient à ne pas vouloir reconnaître qu’ils avaient eu tort… François Legault, s’il avait voulu, il aurait pu faire en sorte que l’Assemblée nationale fasse amende honorable… Lucien Bouchard aussi, d’ailleurs. »

Jean-Pierre Charbonneau regrette que le processus n’ait pas abouti. « Michaud est mort, et malheureusement, cette affaire-là l’a hanté et l’a blessé jusqu’à la fin de ses jours. »

« Un vrai combattant »

François Legault a salué le parcours d’Yves Michaud sur le réseau social X, mercredi. « Yves Michaud était un vrai combattant. Toute sa carrière, il s’est battu pour protéger la langue française et la culture québécoise. Il s’est aussi porté à la défense des petits actionnaires. »

Accosté avant son entrée à une réunion du Conseil des ministres, le ministre de la Langue française, Jean-François Roberge, a lui aussi tenu à reconnaître le « pionnier » Michaud. « Il a eu toute une carrière de journaliste, de diplomate. C’est quelqu’un qui s’est battu pour la langue française dans les années 1960, 1970, qui a pavé la voie pour plusieurs grandes avancées qui sont arrivées ensuite », a-t-il dit mercredi.

L’élu caquiste n’a pas voulu répondre aux journalistes qui lui demandaient si M. Michaud méritait des excuses de l’Assemblée nationale. La ministre des Relations internationales, Martine Biron, s’est quant à elle arrêtée brièvement. « Ça me fait un peu de peine qu’il n’ait pas eu réparation. »

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