Les îles flottantes du lac Inle

Les îles flottantes du lac Inle

2015-05-02 01:10:00

Croissance démographique, déforestation, production agricole insuffisante, espèces envahissantes, L’environnement du lac Inle au Myanmar, l’ex-Birmanie, est loin d’être un paradis. Et pourtant, l’ingéniosité de ses habitants a su tirer parti de tout cela. Même en le transformant en une attraction touristique malgré les conséquences à long terme.

Le lac Inle est le deuxième plus grand du Myanmar. Ou était. Définir ses dimensions est compliqué puisqu’il s’agit d’un lac peu profond (entre 4 et 6 mètres) et ses berges sont recouvertes d’une généreuse couche de végétation. Pour ajouter aux difficultés, ses habitants sont réputés pour avoir construit des milliers de petites îles flottantes qui occupent des centaines d’hectares. Ces îles sont leur principale zone de culture de tomates et d’autres légumes qu’ils utilisent comme nourriture et comme source de revenus.

La clé de ce système est une plante flottante appelée Eichhornia crassipes ou la jacinthe d’eau. C’est une véritable merveille biologique, capable d’extraire de l’eau les nutriments dont elle a besoin grâce à ses racines et à la coopération de certaines bactéries. Du côté négatif, il est considéré comme une plante envahissante en raison de sa grande capacité de croissance. Il est originaire du bassin amazonien mais les humains l’ont répandu, généralement involontairement, sur toute la planète. On pense qu’il a atteint le lac Inle au cours du 19ème siècle et s’est propagé rapidement en raison de bonnes conditions locales. Grâce à l’augmentation de la population sur ses rives et à l’utilisation d’engrais, le lac contient des nutriments en abondance. Confrontés à un fléau qu’ils ne pouvaient contrôler, ses habitants réussirent rapidement à en faire une ressource. Entre 1935 et 2000, le lac est passé d’une superficie de 69,10 à seulement 46,69 km2, la majeure partie de cette superficie, quelque 20 km2, étant occupée par des îles flottantes construites en coupant et en empilant plusieurs couches de cette plante.

lac inléMyanmar Fuente : Observatoire de la Terre (NASA)

La construction de ces îles est laborieuse. La plante est extraite et regroupée en un massif auquel une couche de limon du fond du lac et des cendres végétales sont ajoutées comme éléments nutritifs. L’ensemble est ancré au fond peu profond par des tiges de bambou verticales. L’ensemble a une épaisseur d’environ un mètre et une résistance suffisante pour permettre son utilisation agricole. À propos d’eux, tomates, concombres, citrouilles et légumineuses sont cultivés D’autres produits comme les oignons ou les pommes de terre ne conviennent pas et continuent d’être cultivés sur le continent Comme toute parcelle de terre, ces îles s’achètent et se revendent, avec l’avantage supplémentaire de pouvoir être transportées d’une zone du lac à un autre.

Le système fonctionne si bien qu’il travaille à son extension à d’autres domaines. Un exemple intéressant est le Bangladesh, un pays qui subit des inondations périodiques dues aux moussons. Chaque année, des milliers d’hectares restent sous l’eau pendant des mois. Grâce à cette méthode, les zones inondées peuvent être utilisées pour la culture, fournissant de nouvelles ressources à ses habitants. C’est un des outils du projet AIEEP (Innovations agricoles pour éliminer l’extrême pauvreté) développé par l’ONG suisse Helvetas. Dans la vidéo suivante, sous-titrée en anglais, les résultats du projet sont expliqués et nous pouvons voir en détail comment ces jardins flottants sont construits (à partir de la minute 2).

Les îles flottantes du lac Inle sont devenues célèbres et font partie des attractions touristiques de la région avec les pagodes Il ne fait aucun doute qu’ils constituent une ressource agricole et touristique précieuse pour leurs habitants. Mais je dois admettre que cette histoire me laisse un sentiment doux-amer. D’une part, je suis impressionné par l’ingéniosité des personnes impliquées et leur volonté de transformer un fléau en une source de nourriture indispensable pour leurs enfants. D’autre part, l’écosystème du lac Inle a profondément changé. Un changement qui risque d’être irréversible puisqu’un nouveau mode de vie s’est instauré qui dépend totalement des îles flottantes. Cette métamorphose n’est pas différente, en importance et en motivation, des modifications opérées dans l’écosystème européen. Nous avons très peu de raisons de le critiquer. Mais il faut se rappeler qu’il y a de moins en moins de zones non transformées par l’impact humain. D’autant que, en tant que touristes, nous ne sommes pas capables de le percevoir.

Cette annotation a été initialement publiée le Naukas



#Les #îles #flottantes #lac #Inle
1682019632

Facebook
Twitter
LinkedIn
Pinterest

Leave a Comment

This site uses Akismet to reduce spam. Learn how your comment data is processed.