Toyota Land Cruiser, l’origine de la légende

Lorsque la Corée du Nord a envahi la Corée du Sud en juin 1950, le Japon était encore sous occupation américaine. Les États-Unis et l’ONU sont venus en aide à la Corée du Sud et, pour des raisons logistiques, les fabricants japonais ont été chargés de fournir à l’armée américaine des camions compacts à quatre roues motrices. Toyota a reçu des commandes pour ces véhicules, sur la base de son expérience en tant que l’un des principaux fournisseurs de camions pour les forces japonaises elles-mêmes dans les années 1940.

Mais les forces alliées étaient quelque peu “distraites” pour aider la Corée du Sud, et les Japonais se sentaient vulnérables. Dès lors, un réarmement limité, comprenant un millier de véhicules à quatre roues motrices, est autorisé pour une nouvelle force créée avec des membres japonais par les autorités d’occupation américaines, appelée National Police Reserve (NPR), et qui sera l’embryon de la Japan Ground Self Defense Forces, la nouvelle armée de terre japonaise, qui verra le jour en 1954.

inspiré mais différent

Le 1er août 1951, Toyota dévoile la Jeep BJ. Ces initiales font une double référence : au moteur de la série B et à la Jeep. C’est un modèle rustique conçu en seulement cinq mois. Il est vrai que ce 4×4 japonais est directement inspiré de la jeep américaine, mais non moins vrai est que, malgré la ressemblance d’image, l’approche est très différente. Alors que l’Américain était conçu pour pouvoir être transporté dans des avions, grâce à sa taille réduite et son poids le plus faible possible, le Japonais, plus large et plus long, avait été conçu pour offrir une plus grande capacité de transport. Ainsi, il utilisait le châssis du camion Toyota SB de 1947 et un moteur six cylindres de 3,4 litres, avec 85 CV de puissance et 216 Nm de couple à 2600 tr/min, du camion BM de 1938. Ce moteur, plus gros que celui du Jeep, et avec plus de couple, cela a permis à Toyota de se passer du réducteur dont disposait le modèle américain, avec moins de couple. Les trains roulants provenaient de camions de la marque.

Mais les responsables militaires américains ont opté pour la Mitsubishi Jeep J2, en réalité une réplique de la Jeep CJ3 produite sous licence.

Malgré ce refus, chez Toyota ils sont convaincus du potentiel de leur prototype et décident de continuer à le développer et de trouver des clients par eux-mêmes, d’autant plus que les restrictions à l’exportation avaient été levées l’année précédente.

La “Toyota Jeep BJ” a publiquement démontré ses capacités en s’attaquant à des défis qui n’étaient auparavant possibles qu’à cheval, en reproduisant l’ascension légendaire d’un guerrier samouraï vers le temple shintoïste au sommet du mont Atago, ou en traversant l’ancienne route de pèlerinage jusqu’au sixième (à 2 000 mètres) des dix stations d’ascension du mont Fuji, un point qu’aucune voiture n’avait atteint auparavant, avec le pilote d’essai Ichiro Taira au volant.

Le BJ amélioré a réussi les deux défis, et la récompense de Toyota a été de remplacer Mitsubishi en tant que fournisseur officiel de véhicules de la Réserve de la police nationale.

Cinq versions différentes ont émergé de la plate-forme BJ : Mobile Communications, Link, Firefighter et Two Pickup Trucks. Mais il fallut attendre août 1953 pour le début de la production en série ; à ce moment-là, d’autres agences gouvernementales et sociétés énergétiques s’étaient déjà engagées à passer des commandes pour le nouveau véhicule.

En 1954, la marque américaine Willys dépose le nom Jeep et interdit à Toyota de l’utiliser. Le BJ de Toyota est rebaptisé Land Cruiser, un nom dû à Hanji Umehara, le directeur technique de la marque. Le nouveau nom a été parfaitement conçu pour aider à lancer le véhicule sur les marchés d’exportation, qui ont commencé en 1955, d’abord en Arabie saoudite et un an plus tard, deux BJ 25 ont été envoyés au Venezuela.

A usage civil

En août 1955, la deuxième génération appelée Série 20 est introduite.En quatre ans, le concept original, un véhicule militaire, s’est transformé en un utilitaire civil. Les changements sont importants, avec un look plus “civilisé”, avec une carrosserie arrondie, des phares intégrés et un habitacle plus spacieux.

Le modèle à empattement court était plus court qu’auparavant, améliorant ainsi la maniabilité, tandis qu’une nouvelle version à empattement long s’ajoutait à l’offre. La suspension provenait désormais en partie de la Toyota Crown et était plus confortable pour une utilisation sur route, même si à l’époque le Japon n’avait pas d’autoroutes et atteindre seulement 60 km/h était considéré comme excitant. Les modèles d’exportation ont adopté des configurations de suspension améliorées.

Un nouveau moteur en fonte de la série F a été introduit progressivement à partir de novembre 1955 et a offert une augmentation de puissance de 23% par rapport au précédent. Un développement de la série B, ce moteur à faible compression a vu le jour en 1948 et s’est poursuivi jusqu’à la fin de 1992, ce qui en fait le plus ancien de tous les moteurs Toyota. Elle est largement considérée comme l’une des mécaniques les plus indestructibles jamais produites, fidèle au slogan publicitaire de son constructeur : « Nous saurons combien de temps elle durera quand la première s’usera ».

Série 40, une longue vie

Les années 1960 ont commencé et la Série 40 est née, peut-être peu distinguable de la précédente pour un public profane, mais avec de nombreuses différences dans sa conception. Il présentait des lignes légèrement plus rectangulaires et les jauges avaient été déplacées vers les ailes avant, mais la plupart des gens reconnaissent le 40 par la lunette en forme de losange qui encadre les phares circulaires et la calandre. Une fois de plus l’intérieur présentait l’essentiel et rien de plus ; même pas d’insonorisation. Les simples panneaux de carrosserie en acier embouti étaient essentiellement là pour séparer l’extérieur de l’intérieur, sans plus, tandis que le choix initial du moteur provenait de la gamme robuste de la série F, avec un diesel ajouté en 1972.

Les acheteurs pouvaient choisir un rapport de démultiplication final en fonction du type de terrain qu’ils s’attendaient à rencontrer. “Full”, “Economy” ou “Moderate” étaient disponibles, tandis que la transmission manuelle à trois vitesses comprenait désormais un réducteur.

Quatre options d’empattement étaient disponibles, permettant d’innombrables variantes, de la carrosserie ouverte d’origine au fermé ou “Bush Taxi” comme on l’appelle affectueusement en Afrique de l’Ouest. Essentiellement, il y avait un Land Cruiser pour répondre aux besoins de chacun, ce qui a entraîné des chiffres de vente fulgurants.

En 1965, le 50 000e Land Cruiser est sorti de la chaîne de production, suivi du 100 000e en 1968. Quatre ans plus tard, le total était de 200 000, tandis que le 800 000e a été construit en 1979, peu après un petit lifting (le premier changement de 19 années). Le million historique a été atteint en 1980.

Bien qu’au Japon, la série Land Cruiser 40 ait cessé d’être fabriquée en 1986, elle a continué jusqu’à la fin de 2001 avec la version brésilienne appelée Toyota Bandeirante (série 50) construite depuis 1959 à l’usine Hanomag-Henschel. Par conséquent, on peut dire que la carrosserie introduite avec la série 20 et la 40 plus civilisée, a connu 51 années incroyables de production continue. Mais ce n’est que le début d’une histoire qui a survécu jusqu’à ce jour.