Du monde de la musique à celui de la géopolitique, la distance peut être plus courte qu’on ne l’imagine parfois. Au Festival des musiques urbaines d’Anoumabo (Femua), l’attention ne se porte pas seulement sur les performances scéniques, c’est même l’une des particularités, voire la valeur ajoutée, de cet événement organisé par le groupe Magic System, qui tient à redistribuer à sa manière et avec ses convictions les richesses de sa renommée internationale. La thématique de cette année, axée sur la sécurité alimentaire et l’agriculture durable, a évidemment une résonnance particulière dans le contexte actuel, marqué par l’impact de la guerre en Ukraine sur le prix des céréales. Ces enjeux préoccupent également Baaba Maal, l’une des têtes d’affiche du festival, animé par la même volonté d’agir chez lui à Podor, ville située au bord du fleuve Sénégal, où le chanteur, récemment apparu dans le film Black Panther: Wakanda Forever, s’est engagé à initier un projet agricole “moderne” de 50 hectares qui fédère la population locale et fait même école, avec l’appui de sa fondation Nann-K. Il a également opté pour le photovoltaïque, “comme ça, on est très loin du gazole et de tout ce qui pollue”, ajoute-t-il. Devant le public du stade d’Anoumabo, dans le quartier d’Abidjan où se tenait le Femua, le chanteur, reconnu dans le monde entier, n’a pas seulement donné une leçon de musique – quand talent, bienveillance et professionnalisme sont là, que demander de plus? – il a également adressé des messages “à la jeunesse africaine”, l’appelant “à ne pas baisser la tête, à relever la tête et à regarder droit devant”.
Le chanteur togolais Santrinos Raphaël partage cet état d’esprit, programmé en ouverture de la deuxième soirée de concerts du Femua. L’auteur de Fiançailles et Maladie d’amour, considéré comme l’un des espoirs de la musique dans son pays, sait ce qu’il doit à la Côte d’Ivoire, connue depuis longtemps pour son rôle de rampe de lancement: “Dès que j’ai mis le pied ici, ma carrière a décollé sur le plan international”, assure-t-il, faisant référence à son duo avec la Béninoise Zeynab (C’est) en 2020. Safarel Obiang doit également sa notoriété en dehors de sa Côte d’Ivoire natale à l’invitation lancée par le Malien Sidiki Diabaté, qui a abouti au morceau BKO-ABJ en 2019.
Entre ces deux pays, la porosité musicale se retrouve également dans le répertoire de certains représentants du zouglou ivoirien, comme cela a été interprété en direct dans le stade d’Anoumabo. Les festivités ont vu la participation de nombreuses personnalités, notamment le chanteur français d’r’n’b Singuila, évoluant à domicile depuis qu’il a été adopté par la Côte d’Ivoire après une invitation du groupe de rap MAM au début des années 2000, et le rappeur franco-sénégalais Booba, qui a déclenché une ferveur telle que l’événement aurait pu basculer dans le chaos s’il n’y avait pas eu une gestion efficace de la part des organisateurs et des services de sécurité. Le Femua est une fois de plus un événement culturel majeur, organisé par les “magiciens” de Magic System. Site officiel du Femua / Facebook / Twitter / Instagram
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