L’histoire d’Argenis Giménez : ancien malade, il se bat désormais contre les maltraitances en hôpital psychiatrique

L’histoire d’Argenis Giménez : ancien malade, il se bat désormais contre les maltraitances en hôpital psychiatrique

2023-05-13 13:56:03

Il 13 mai 1978il y a exactement 45 ans, le Parlement italien a approuvé le soi-disant “Loi Basaglia”supprimant ainsi les hôpitaux psychiatriques et avec eux l’enfermement forcé (et violent) des personnes atteintes de troubles mentaux. Un passage d’époque, ce qui signifiait la pleine citoyenneté de personnes jusque-là considérées comme des « rejetés » de la société. Les travaux du psychiatre vénitien Franco Basaglia (décédé en 1980 à seulement 56 ans) et le mouvement social et politique qui a soutenu sa lutte ont placé l’Italie à l’avant-garde de l’élimination de la ghettoïsation produite par “maisons de fous”: un phare de la civilisation qui est encore aujourd’hui une source d’inspiration en matière de santé mentale. Un long processus qui voit de grandes différences de mise en œuvre sous différentes latitudes dans notre pays mais qui a ouvert la voie à une autre voie possible dans le traitement des troubles mentaux, sans murs, sans ségrégation, sans stigmatisation.

Une autre voie possible vers laquelle on regarde aussi deAmérique Latine où Basaglia a répandu son approche innovante et où il a planté plusieurs graines qui fleurissent encore aujourd’hui. Un exemple en est le livre La condamnation d’être fou et pauvre : alternatives à l’asile qui rassemble les quatorze conférences que Basaglia a tenues à Brésil en 1979, parlant de son travail, de ses expériences et de ses idées qui ont conduit à la révolution italienne de l’année précédente. Devant des centaines d’étudiants, d’enseignants, de médecins, de psychothérapeutes et de syndicalistes, le psychiatre italien a évoqué la lutte contre l’exclusion sociale et la stigmatisation, la nécessité d’abolir l’institutionnalisation psychiatrique et comment la santé mentale pouvait et devait être vue sous un autre jour.

Une histoire de grand impact et de grand sacrifice liée à l’exemple et au travail de Basaglia est aussi celle du Vénézuélien Argénis Gimenez (62 ans), originaire de Barquisimeto et plus connu dans sa ville natale (et aussi dans tout le Venezuela) sous le nom de « El loco de la pancarta » (le fou du cartel). Argenis, qui était un patient psychiatrique, mène depuis 1992 une protestation singulière et tenace inspirée des travaux du psychiatre vénitien, pour dénoncer les mauvais traitements dont souffrent encore les personnes atteintes de troubles mentaux dans le pays sud-américain.

Chaque jour, depuis 30 ans, il arpente les rues de Barquisimeto avec un signe sur la têteun signe portant des phrases différentes mais demandant essentiellement tout la fin de la répression et de la violence dans les hôpitaux psychiatriques au Vénézuela. Il a lui-même subi ces harcèlements et ces violences (à l’âge de 28 ans, il a reçu le premier électrochoc) à l’hôpital psychiatrique Hospital El Pampero, établissement dont il s’est échappé peu après pour entamer un militantisme social et une lutte qui se poursuit encore aujourd’hui. Argenis veut que les personnes atteintes de troubles mentaux cessent d’être des martyrs anonymes et puissent trouver leur place dans une société sans scrupules vis-à-vis de ceux qui souffrent de cette condition, des personnes qui ne votent pas, qui ne paient pas d’impôts, et qui ne sont donc pas “utiles” au système.

Issu d’une famille “difficile” et nombreuse, fils d’une mère qui souffrait de graves problèmes de schizophrénie, avec huit autres frères et sœurs et dans une situation d’extrême pauvreté, Argenis a dû trouver sa voie dès son plus jeune âge. A l’âge de 7 ans, il s’enfuit de chez lui et est accueilli par les Sœurs de la Charité, dans un centre où il apprend à lire et à écrire. Et l’écriture est l’une des grandes passions de ce activiste social qui forge avec créativité ses dénonciations quotidiennes, soutenu par ses concitoyens qui lui fournissent outils et produits de première nécessité. Argenis écrit aussi souvent qu’il le peut et son œuvre intitulée Synthèse autobiographique du fou de la bannière c’est aujourd’hui un grand témoignage d’une vie passée au service d’un grand combat civilisationnel.

Un personnage qui est déjà devenu le folklore et le mythe de la capitale de l’État Laraun intellectuel de la rue qui vit dans la rue, un témoin de cette autre voie possible défendue par Basaglia, un homme qui, avec détermination et beaucoup de courage, continue de parler d’une révolution qui, dans cette partie du monde, tarde à se produire.

En effet, les plaintes d’Argenis trouvent appui dans de nombreux rapports et articles, comme celui produit par New York Times en 2016 dans sa ville, Barquisimeto. Une situation de maltraitance structurelle, encore aggravée par la grave crise économique qui traverse le pays sud-américain et qui ne se limite pas à la ville natale d’Argenis. D’autres rapports, comme celui de France 24 en 2019 à l’hôpital psychiatrique de Lidice (Caracas), dénoncent en effet la situation de violence, de répression et d’abandon vécue par les personnes atteintes de troubles mentaux dans les établissements psychiatriques également dans le reste du pays.

Argenis Gimenez ne sera pas un martyr anonyme e son engagement doit nous faire réfléchir sur ce qu’il est encore nécessaire (et urgent) de faire, pour faire tomber les murs de l’indifférence et de la stigmatisation envers la santé mentale.

Grazie Argénis.



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