La santé mentale en période liquide – La santé mentale en période difficile

La santé mentale en période liquide – La santé mentale en période difficile

2017-01-22 13:46:20

Dans le débat intéressant qui a pris naissance ces jours-ci à la suite du décès de l’éminent sociologue Zigmunt Bauman, le domaine d’application de sa théorie de la société liquide au domaine de la santé mentale est l’un des plus suggestifs mais encore insuffisamment clarifié.

On le sait, pour Bauman on est passé d’une société aux valeurs bien ancrées, fortes, solides, comme le fer forgé, à une société changeante, instable, liquide. Nous sommes passés d’une société ordonnée et prévisible à une société en mouvement, sans liens permanents et imprévisibles. Ce changement de modèle de société est-il perceptible dans le domaine de la santé mentale ?

Il est vrai que du point de vue de la santé mentale, nous avons laissé derrière nous une société qui avait pour référence, pour icône, le mur de l’asile, aujourd’hui heureusement un mur en partie effondré. Comme le souligne le sociologue coréen-allemand Byung Chul Han, la société traditionnelle (ce que Foucault appelait la société disciplinaire), expression d’une solide modernité, faite de prisons, de casernes et d’hôpitaux psychiatriques, appartient désormais au passé. Et il est vrai que cette société ne correspond plus au monde d’aujourd’hui, une société de consommation mondialisée, dans laquelle la différence entre le normal et l’anormal semble quelque chose de démodé, d’archaïque, quelque chose qui a disparu entraîné par le tsunami des plus consumérisme radical auquel ce type de “subtilités” donne le coup d’envoi

Mais, sommes-nous vraiment entrés dans cette phase liquide que Bauman propose dans le domaine de la santé mentale, ou cet ordre solide a-t-il été remplacé par un autre ?

Je crois que Bauman peut avoir raison dans cette approche car nous nous trouvons dans une société où il y a beaucoup de confusion et d’instabilité, une société dans laquelle il est de plus en plus difficile de savoir ce qui est sain ou pathologique, parce que tout, le quotidien lui-même, est potentiellement devenu une maladie mentale. Car tout mal-être psychique – stress, deuil, nostalgie….- est devenu une source de business devant laquelle le marché cherchera toujours à trouver le produit qui le soulage. Et pour donner plus d’impact à cette consommation, quoi de mieux que d’appeler l’inconfort maladie mentale et d’hypocondrier, d’intimider et de fidéliser les citoyens-consommateurs.

Parce que la société d’aujourd’hui a élargi le domaine de la psychiatrie à presque toutes les sphères de la vie, augmentant le nombre de troubles mentaux de manière presque exponentielle. Le DSM, le manuel hégémonique de classification des troubles mentaux, a considérablement changé à chaque édition. Il est passé des 102 troubles de la première édition de 1952 aux presque 400 troubles de la cinquième édition de 2013, avec des niveaux d’inflation diagnostiques si galopants qu’on a même dit, ironiquement, qu’à la fin il y aura un propre désordre pour chacun de nous

De plus, d’anciens vices, des péchés capitaux, des limitations personnelles ou même de simples caractéristiques personnelles sont devenus des troubles mentaux. Ainsi, fumer est un trouble du tabagisme, la timidité est une phobie sociale, l’orgueil est un trouble narcissique, le jeu est un jeu compulsif, la colère est un trouble du contrôle des impulsions, la gourmandise est un trouble de l’hyperphagie boulimique.

Ainsi, les approches que nous a données ce grand sociologue polonais, Zigmunt Bauman, sont un héritage précieux pour continuer à travailler pour mieux comprendre la santé mentale dans le monde dans lequel nous avons vécu.



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