Un juge rejette la demande de suspension immédiate du décret interdisant les locaux de prière dans les écoles publiques du Québec

Un juge rejette la demande de suspension immédiate du décret interdisant les locaux de prière dans les écoles publiques du Québec

Les écoles publiques du Québec restent interdites d’avoir des locaux de prière, du moins pour le moment. Mercredi matin, un juge a rejeté la demande de suspension immédiate du décret qui empêche les écoles de mettre de telles salles à disposition des élèves.

Cependant, cette contestation du décret caquiste n’est pas terminée. La demande de sursis n’était qu’une étape du processus judiciaire. Le dossier devra suivre son cours et un procès régulier aura lieu, au cours duquel la constitutionnalité de la mesure gouvernementale sera examinée.

Les opposants au décret auront donc de nouveau l’occasion de soutenir qu’il est discriminatoire et contraire à la liberté de religion, un droit fondamental protégé par les chartes des droits et libertés. Selon le Conseil national des musulmans canadiens (CNMC) et l’Association canadienne des libertés civiles (ACLC), qui mènent la contestation, la mesure porte atteinte de manière disproportionnée aux élèves de confession musulmane, car leurs prières ne sont “ni silencieuses, ni discrètes”.

L’affaire a été plaidée mardi devant le juge Lukasz Granosik de la Cour supérieure, au palais de justice de Montréal.

Dans son jugement, le magistrat a estimé que les élèves souhaitant prier pendant les heures de classe subissaient un “préjudice irréparable” depuis l’entrée en vigueur du décret, en ayant ainsi transgressé l’un de leurs droits fondamentaux, une atteinte qui ne peut pas être compensée par une somme d’argent. Un adolescent musulman de 16 ans a déclaré sous serment qu’il devait désormais se cacher pour prier sur le terrain de son école secondaire à l’heure du déjeuner.

Le décret a été adopté ce printemps car le gouvernement caquiste estime que la présence de ces locaux n’est tout simplement pas compatible avec le principe de laïcité de l’État québécois. “L’école n’est pas un lieu de prière”, a déclaré à l’époque le ministre de l’Éducation, Bernard Drainville. L’école montréalaise où l’adolescent étudie n’a pas contesté la demande de suspension du décret, préférant “s’en remettre à la justice”.

Dans son jugement rendu oralement, le juge Granosik a déclaré qu’il y avait une “collision frontale” entre “l’interdiction des prières manifestes et la pratique religieuse” lorsqu’il s’agissait de l’utilisation de l’espace dans les écoles publiques.

Il a rappelé qu’un tribunal ne devait intervenir, pour suspendre immédiatement et avant procès, une loi ou une autre mesure gouvernementale que dans “des circonstances exceptionnelles”. La tâche était donc très difficile pour l’étudiant et les groupes contestataires, et ils ont échoué.

Pour obtenir la suspension demandée, il devait également y avoir une “réelle urgence” nécessitant l’intervention immédiate d’un juge. Dans ce cas, le magistrat n’en voit aucune : deux mois se sont écoulés avant que les groupes ne se présentent au tribunal. Le juge Granosik a également rappelé que les vacances scolaires commencent dans quelques jours. Il estime qu’il n’y aura pas de violation des droits des élèves pendant cette période estivale.

Les tribunaux doivent protéger les droits fondamentaux, poursuit-il, mais pas modifier ou corriger des politiques sociales, ni estimer quelles mesures sont les mieux placées pour servir l’intérêt public : ce rôle revient aux élus, rappelle-t-il. Et si l’intervention de la justice est possible dans des cas manifestes de violation des droits, ce n’est pas le cas ici, tranche-t-il. La constitutionnalité du décret devra donc être examinée en profondeur, après un procès où toutes les preuves pourront être présentées.

Mercredi, le ministre Drainville n’a pas souhaité réagir, “puisque le cas est devant les tribunaux”.

Si le jugement n’était pas le résultat souhaité par l’ACLC, elle se réjouit du fait que “le tribunal a indiqué que cette interdiction des prières dans les écoles cause un préjudice significatif aux étudiants religieux au Québec”, souligne la directrice des programmes d’égalité, Harini Sivalingam. Elle promet de continuer à défendre leurs droits.

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