Le doute est mère de toute vérité. C’est par la remise en question que le savoir progresse. Questionner, réfuter, confondre, pour démêler, élucider, éclairer. Le doute est la lumière de l’humanité, une quête intrépide pour sans cesse faire reculer l’obscurantisme. Douter, c’est rendre service à la vérité: la force d’une certitude, c’est justement de s’exposer au doute et d’y résister.
Lorsque l’affaire Festina a éclaboussé le cyclisme, nombre de suiveurs, et pas seulement les moins éclairés, ont refusé de douter. Des hommes, des équipes, du système. Naïveté candide ou aveuglement volontaire. Hier, Virenque et compagnie étaient leurs héros, les voilà menottes aux poignets, tricheurs avérés, tous corrompus, tous dopés. Dans un réflexe de survie, à leur insu, les indécrottables bigots ont préféré accuser les empêcheurs de tourner en rond plutôt que de recevoir la vérité en plein visage. Les salauds avérés, les fossoyeurs de cette aventure grandiose qu’est le cyclisme, c’étaient ceux qui osaient douter.
“Douter, c’est une déclaration d’amour – jamais aveugle – au sport : choyer sa crédibilité, hier, aujourd’hui mais surtout demain.”
Le sport a besoin de certitudes, d’une part de foi même : si on n’y croit pas, ou plus, alors tout est perdu. C’est précisément pourquoi il faut continuer à douter, inlassablement, même si cela peut être difficile. Une échappée solitaire héroïque ? Doutons. Une ascension folle avec des watts records ? Doutons. Une équipe dominant outrageusement ? Doutons encore. Douter, c’est une déclaration d’amour – jamais aveugle – au sport : préserver sa crédibilité, hier, aujourd’hui mais surtout demain. Regarder le cyclisme avec des yeux d’enfant émerveillé, certes, mais jamais les yeux fermés.
En 1998, l’affaire Festina était l’occasion de esquisser, voire valider, un changement de modèle. On nous aurait menti ? Le cyclisme n’a même pas fait semblant d’essayer : en 1999, Lance Armstrong remportera le premier de ses sept Tours – tous lui seront ensuite retirés. Le corollaire est implacable et résonne comme une sentence atroce : parce qu’autrefois nous avons refusé de douter, 25 ans après, même en essayant très fort, nous n’avons plus jamais réussi à y croire.
– 25 ans après l’affaire Festina, il faut continuer à douter
L’anniversaire de l’affaire Festina rappelle que le dopage est encore une réalité dans le sport. Et 25 ans après, on a toujours du mal à croire les cyclistes sur parole.