Le projet de loi sur l’indemnisation des victimes de terrorisme ne sera finalement pas voté avant la fin du procès des attentats du 22 mars, qui est toujours en cours devant la cour d’assises. Le texte, qui devait être approuvé mercredi en séance plénière de la chambre, a été renvoyé au conseil d’État. La juridiction administrative examinera notamment des amendements déposés par des députés de l’opposition.
Le texte est porté par le ministre de l’Économie Pierre-Yves Dermagne (PS) avec le ministre de la Justice Vincent Van Quickenborne (Open VLD) et la secrétaire d’État à la Protection des consommateurs Alexia Bertrand (Open VLD). Il a déjà connu un parcours quelque peu chahuté.
Il s’agit là d’un dossier délicat humainement, comme l’ont montré les auditions de victimes des attentats du 22 mars 2016 devant la cour d’assises. Les victimes ont été nombreuses à pointer la multiplicité des interlocuteurs et les difficultés qu’elles ont rencontrées lors de leurs contacts avec les assurances. Elles ont également souligné la nécessité de se soumettre à de multiples expertises.
L’indemnisation des victimes des attentats est un véritable labyrinthe : “Certains se sont sentis abandonnés par l’État”.
Un texte qui a été critiqué dès le départ
Le 1er février, alors que la commission de l’Économie de la Chambre commençait l’examen du projet de loi, les critiques n’ont pas manqué de pleuvoir sur le texte, ce qui a poussé le gouvernement à revoir sa copie.
Il a alors été décidé de mettre fin à la distinction faite entre les victimes résidant en Belgique et les autres, et de porter le délai dans lequel une demande d’indemnisation peut être introduite de 5 à 10 ans. Une autre modification a été d’établir la création d’un guichet unique qui doit orienter les victimes et éviter qu’elles aient à faire face à un grand nombre d’interlocuteurs, que ce soit auprès des assurances ou des organismes de sécurité sociale.
La principale critique portait cependant sur le fait qu’aucun fonds de garantie spécifiquement dédié à l’indemnisation des victimes n’a été créé. C’était la principale demande des associations de victimes du 22 mars 2016. C’était également l’une des recommandations – adoptée à l’unanimité – de la commission d’enquête parlementaire sur les attentats du 22 mars 2016.
Le ministre a défendu le choix de ne pas créer un tel fonds, estimant que cela nécessiterait des ressources importantes ainsi qu’une expertise déjà disponible dans le secteur des assurances.
Les deux associations de victimes du 22 mars, V-Europe et Life4Brussels, ont soutenu la création d’un fonds de garantie. Cependant, Philippe Vansteenkiste, président de V-Europe, a salué le fait qu’un point de contact unique, intégrant les associations, soit mis en place.
“Le texte ne résout pas les nombreux problèmes rencontrés par les victimes, tels que la multiplicité et la complexité des démarches. Ces problèmes auraient dû être résolus par la création d’un fonds de garantie, comme le recommandait la Commission d’enquête parlementaire sur les attentats”, souligne Life4Brussels.
L’association émet également une autre critique. Elle déplore qu’à l’heure actuelle, il n’y ait pas de disposition transitoire permettant aux victimes des attentats du 22 mars 2016, qui n’ont pas pu introduire de demandes d’indemnisation dans les délais impartis, d’être indemnisées. “Si la majorité de ces victimes n’ont pas entrepris de telles démarches, c’est parce qu’elles ignoraient leurs droits, faute d’avoir été informées par l’État belge”, rappelle l’association.
Un des amendements, déposé par le député Georges Dallemagne (Les Engagés), propose notamment un prolongement de ce délai de prescription pour les demandes d’indemnisation.