La collection de cerveaux humains danoise : un héritage scientifique controversé

La collection de cerveaux humains danoise : un héritage scientifique controversé

À perte d’horizon, des seaux en plastique blanc, numérotés et entreposés sur de longues étagères. Dans les seaux, submergés dans un bain de formol, 9 479 cerveaux.

Cette collection unique, conservée aujourd’hui à Odense (Danemark), est l’héritage de près de quatre décennies de collecte chez des patients atteints de maladies psychiatriques, comme la schizophrénie ou la démence, et décédés dans les hôpitaux danois dans la seconde moitié du XXe siècle.

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Ces cerveaux ont été prélevés sans le consentement du patient ou de ses proches, soulevant de nombreuses questions éthiques qui ont menacé cette conservation. Pour comprendre les enjeux de la collection pour la recherche, la BBC a rencontré les scientifiques chargés de la banque.

Des cerveaux prélevés pour la postérité

«Il faut remonter en 1945 pour retracer les origines de la banque de cerveaux» explique Martin Wirenfelt Nielsen, pathologiste et directeur de la collection. Juste après la Seconde Guerre mondiale, la recherche en psychiatrie reprend de plus belle, et une équipe de chercheurs à Aarhus entreprend la création d’un «Institut des pathologies du cerveau».

«À l’époque, les hôpitaux psychiatriques n’avaient rien à voir avec ceux d’aujourd’hui» précise Thomas Erslev, historien de la science et de la médecine. «Les patients étaient admis et restaient à l’hôpital une bonne partie de leur vie.»

Au décès des patients, les autopsies sont régulières, si ce n’est systématiques. «À cause de la stigmatisation de ces maladies dans les années 1940, jusque dans les années 1960, il est courant que les malades n’aient plus beaucoup de contacts avec leurs proches.» Il n’est en revanche pas courant de demander le consentement de la famille au sujet de n’importe quel traitement médical. «Et certainement pas en matière de problème de santé mentale !» ajoute Knud Kristiansen, ancien président de l’association danoise pour la santé mentale.

Ce n’est qu’en 1982 que l’on met fin à la collecte. Depuis, son histoire hante les scientifiques, qui débattent à maintes reprises de la conservation – ou de l’élimination – de la collection. En 2017, après le déménagement de l’hôpital d’Aarhus, les autorités décident finalement de garder la banque au profit de la recherche, tout en reconnaissant que la méthode de collecte passée était hautement problématique.

La collection se trouve aujourd’hui à Odense. Elle reste un outil précieux pour les scientifiques car ces cerveaux, atteints pour beaucoup de démence ou de schizophrénie, mais également d’autres maladies, n’ont pas été touchés par la médecine moderne. Cela permet en outre d’étudier les effets qu’ont les traitements modernes de la maladie d’Alzheimer sur les cellules, en comparaison avec des cellules «vierges» de tout médicament datant des années 1940.

Les cerveaux, plongés dans du formol, restent tout de même moins bien conservés que ceux collectés récemment et qui, eux, sont gardés dans un congélateur à -80°C.

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