Régime militaire au Niger forme un gouvernement avant un sommet crucial à Abuja

Régime militaire au Niger forme un gouvernement avant un sommet crucial à Abuja

Le régime militaire issu d’un coup d’État au Niger a formé un gouvernement juste avant un sommet crucial jeudi à Abuja de dirigeants ouest-africains. Ces derniers n’excluent pas l’utilisation de la force armée pour rétablir le président renversé Mohamed Bazoum.

Le gouvernement formé à Niamey est dirigé par le Premier ministre Ali Mahaman Lamine Zeine et comprend 20 ministres. Les ministres de la Défense et de l’Intérieur sont respectivement le général Salifou Mody et le général Mohamed Toumba, tous deux membres du Conseil national pour la sauvegarde de la patrie (CNSP) qui a pris le pouvoir.

L’annonce de sa formation marque l’affirmation du régime militaire depuis qu’il a renversé Mohamed Bazoum le 26 juillet, et semble être un signe de défiance envers les dirigeants de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) qui se réunissent jeudi.

‘D’importantes décisions’ sont attendues lors de ce sommet, a indiqué la CEDEAO mardi, qui a réaffirmé préférer la voie diplomatique pour rétablir l’ordre constitutionnel au Niger tout en maintenant sa menace d’une intervention armée si nécessaire.

Cette menace avait été proférée pour la première fois lors d’un précédent sommet de la CEDEAO le 30 juillet, fixant un ultimatum de sept jours aux militaires de Niamey pour rétablir le président Bazoum, sous peine d’intervention armée. Cependant, rien ne s’était passé à l’expiration de cet ultimatum dimanche.

Jusqu’à présent, les nouveaux dirigeants du Niger semblaient fermés aux tentatives de négociation de la CEDEAO, faisant craindre que le sommet de jeudi ne matérialise la menace d’une intervention militaire, à la fois redoutée et critiquée dans la région.

Ex-émir nigérian à Niamey

Mardi encore, une délégation conjointe de la CEDEAO, de l’Union africaine (UA) et des Nations Unies avait tenté de se rendre à Niamey, en vain, les putschistes leur ayant interdit l’accès en invoquant des raisons de ‘sécurité’.

À la veille du sommet, une rencontre a toutefois eu lieu mercredi soir à Niamey entre le nouvel homme fort du Niger, le général Abdourahamane Tiani, et l’ex-émir de l’État nigérian de Kano, Sanusi Lamido Sanusi, proche du président nigérian Bola Tinubu.

‘Nous sommes venus en espérant que notre arrivée va ouvrir la voie à de véritables discussions entre les dirigeants du Niger et ceux du Nigeria’, a déclaré l’ex-émir, précisant cependant ne pas être un ‘émissaire du gouvernement’ nigérian.

En marge de ces tentatives diplomatiques, les chefs d’état-major de la CEDEAO se sont réunis vendredi à Abuja pour définir les contours d’une possible intervention militaire.

Le président de la Guinée-Bissau, Umaro Sissoco Embalo, s’envolant pour la capitale nigériane mercredi soir, a affirmé que ‘les coups d’État doivent être bannis’. Selon lui, la CEDEAO joue son existence après les coups d’État dans trois autres États membres de l’organisation (Mali, Guinée, Burkina Faso ; suspendus de ses instances dirigeantes) depuis 2020.

Le Mali et le Burkina Faso, de leur côté, ont affiché leur solidarité avec les militaires du Niger, affirmant que toute intervention armée de la CEDEAO serait ‘une déclaration de guerre’ pour eux.

Mardi, ils ont adressé des lettres conjointes à l’ONU et à l’UA en appelant à leur ‘responsabilité’ pour empêcher ‘toute intervention militaire contre le Niger dont l’ampleur des conséquences sécuritaires et humanitaires serait imprévisible’.

Soutiens occidentaux

Dans ses efforts pour rétablir le président Bazoum, la CEDEAO peut compter sur le soutien des puissances occidentales, en particulier les États-Unis et la France qui ont fait du Niger un pivot de leur dispositif dans la lutte contre les groupes armés jihadistes qui sèment la mort dans un Sahel déstabilisé.

Les États-Unis ont exprimé mercredi leur préoccupation concernant les conditions de détention de M. Bazoum, détenu depuis le coup d’État du 26 juillet dans sa résidence présidentielle.

La secrétaire d’État adjointe américaine s’était rendue à Niamey lundi pour rencontrer les auteurs du coup d’État, à l’exception du général Tiani. Elle n’avait pas non plus rencontré M. Bazoum.

Les discussions ‘ont été franches et parfois difficiles’, avait-elle admis.

Accusations contre la France

Le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, a également exprimé sa préoccupation, exigeant la libération de Mohamed Bazoum et dénonçant ‘les conditions lamentables dans lesquelles vivraient le président Bazoum et sa famille’.

Les nouveaux dirigeants de Niamey considèrent la CEDEAO comme une organisation ‘à la solde’ de la France, ancienne puissance coloniale et alliée indéfectible du président Bazoum. Ils l’ont pris pour cible depuis qu’ils ont pris le pouvoir.

Mercredi encore, ils ont accusé la France d’avoir violé l’espace aérien nigérien fermé depuis dimanche, avec un avion de l’armée française venu du Tchad, et d’avoir ‘libéré des terroristes’. Des accusations immédiatement démenties par la France.

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