« Psychanalyse du reste du monde : Une histoire alternative de la discipline »

« Psychanalyse du reste du monde : Une histoire alternative de la discipline »

« Psychanalyse du reste du monde. Géo-histoire d’une subversion », sous la direction de Livio Boni et Sophie Mendelsohn, La Découverte, 736 p., 34 €, numérique 25 €.

Spécialistes de la « domination racialisée » les psychanalystes Livio Boni et Sophie Mendelsohn ont réuni, dans Psychanalyse du reste du mondetrente-cinq auteurs de plusieurs pays afin de promouvoir une histoire ” alternative ” de cette discipline, fondée sur l’idée qu’il existerait un « mode majeur » de son implantation – celui des pays « occidentaux » – et un mode « mineur »propre aux territoires où elle ne subsisterait qu’à l’état sporadique : la Chine, le monde arabo-islamique, l’Afrique ou l’Inde.

La plupart des auteurs convoqués ont donné d’excellents textes. Outre des études sur le Mexique, Israël, Frantz Fanon (1925-1961) et le freudo-marxisme, le lecteur découvrira ici des expériences cliniques menées aux Comores, à Porto Rico, à Alger, à Taïwan, aux Antilles ou à Madagascar. Ces textes apportent des connaissances sur la situation de la psychanalyse dans le monde sans avoir recours à cette distinction entre « mineur » et « majeur ».

Ce qui n’empêche pas Boni et Mendelsohn de les intégrer à un manifeste visant à « désaxer » l’histoire du freudisme. A cette fin, ils divisent le monde entre un Occident colonisateur et un Sud global colonisé, en se réclamant d’une approche « postcoloniale » de la psychanalyse, mais sans définir ce qui serait son héritage colonial. Aussi négligent-ils le fait que celle-ci s’est implantée progressivement (entre 1910 et 1960) dans une cinquantaine de pays, bien au-delà d’une sphère « occidentale » ou « colonisatrice », en Asie, en Australie ou en Afrique du Sud. Une implantation qui s’est faite selon des critères précis mais assez larges pour intégrer des cultures différentes : l’existence d’une liberté associative, d’un savoir psychiatrique antérieur, comme d’un déclin de la famille patriarcale et de l’emprise religieuse sur les sujets.

Au demeurant, le titre de l’ouvrage est problématique. L’expression « reste du monde » est empruntée à une déclaration faite en 1977 à Jérusalem par la direction de l’International Psychoanalytical Association, qui proposait de scinder en trois les zones d’implantation réussie de la psychanalyse : les deux continents américains et le « reste du monde »dont l’Europe. Boni et Mendelsohn reprennent cette expression pour faire de ce « reste » un ensemble « non occidental ».

Nouveau partage

Ils utilisent aussi le mot « géo-histoire »inventé par Fernand Braudel (1902-1985), pour désigner leur nouveau partage : colonialistes côté Nord, colonisés en révolte côté « Sud global ». On ne sait d’ailleurs pas s’ils prétendent psychanalyser ce « reste » ou en faire l’histoire. En tout cas, ce modèle ne permet pas de penser l’histoire de la psychanalyse, dont le mouvement migratoire perpétuel n’a pas eu lieu du nord vers le sud, mais plutôt d’est en ouest – de l’Europe vers les deux continents américains d’abord, puis vers d’autres aires.

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