ChienHomme : Le retour décevant de Luc Besson à Venise

ChienHomme : Le retour décevant de Luc Besson à Venise

Il y a cinq ans, le cinéaste italien Matteo Garrone avait proposé un film intitulé “L’homme-chien” sur un toiletteur pour chiens qui s’égare dans une spirale criminelle. Jeudi à Venise, le plus américain des cinéastes français, Luc Besson, a proposé un film intitulé “ChienHomme” sur un gardien de chiens qui s’égare dans une spirale criminelle. Là s’arrêtent les comparaisons. Le “Homme-chien” de Garrone était remarquable. Celui de Besson est mauvais en chien.

Le ridicule consommé de son film n’a pas empêché le cinéaste du Grand Bleu et de Métro d’être applaudi chaleureusement en conférence de presse jeudi, comme si l’on avait voulu le féliciter publiquement d’avoir survécu à ses déboires financiers et judiciaires des dernières années. En juin, Besson a été blanchi d’accusations de viol en France par l’actrice Sand Van Roy. Une dizaine d’autres femmes lui reprochent des comportements sexuels déplacés. Ceux qui croient que le ressac du mouvement #metoo est une vue de l’esprit devraient venir faire un tour à la Mostra de Venise, où l’on accueille en grande pompe ces jours-ci Besson, Roman Polanski et Woody Allen…

Je me suis justement demandé, après avoir vu “ChienHomme”, pourquoi on avait jugé pertinent de sélectionner, en compétition en plus, le film de Besson. Cet europudding campé au New Jersey met en scène Douglas, un enfant martyr devenu gardien de chiens errants (Caleb Landry Jones), qui arrondit ses fins de mois en imitant Édith Piaf en drag queen et en offrant de la “protection” aux honnêtes gens de son quartier contre des gangs criminels (musique du Parrain en prime). Une jeune psychiatre est appelée en renfort lorsque Douglas est arrêté au volant d’un camion rempli de chiens, déguisé en Marilyn Monroe et souffrant de blessures de balles. Commence alors un tango psychologique à cinq sous, dialogues à thèses en prime, pour éradiquer le mal à la racine, c’est-à-dire, bien sûr, dans les blessures de l’enfance.

Celle de Doug ayant été fortement hypothéquée : son père l’a carrément mis en cage pendant de longs mois (un fait divers français qui a inspiré le scénario à Besson), avec comme seuls compagnons des chiens, dont il préfère la compagnie à celle des humains. Il communique si bien avec ses compagnons canins que ses chiens, à qui il lit du Shakespeare (!), dérobent pour lui des bijoux dans des maisons cossues et lui passent même le sel. Non, ce n’est pas une figure de style. Les personnages de “ChienHomme” sont tous plus caricaturaux, manichéens et improbables les uns que les autres (le père et le frère rednecks, les criminels latino-américains), si bien que l’on a parfois l’impression de découvrir un film pour jeune public du type “Les 101 dalmatiens”. Tout sonne faux et rien n’est subtil, à commencer par la musique mélodramatique, dans ce “Silence des agneaux” des pauvres au scénario sans queue ni tête qui confirme tout sauf le “grand retour” de Luc Besson.

Les avis seront sans doute partagés sur le plus récent film de Pablo Larraín, “Compter” (Il les compte). Le cinéaste chilien (No, Neruda, Spencer, Jackie) a imaginé une histoire de vampires jouissive et délirante où le dictateur Augusto Pinochet prend les traits d’un vampire royaliste adorateur de Marie-Antoinette qui a fui la France après la Révolution.

Ce film en noir et blanc compte sur un humour noir à la Ari Aster et décalé à la Roy Andersson, dans une esthétique quasi bergmanienne et un soupçon de réalisme magique sud-américain. Comme si Béla Tarr s’abandonnait à un récit purement sardonique ou que Dreyer avait imaginé une Jeanne d’Arc calculatrice. C’est pourtant à “Irréversible” de Gaspar Noé que l’on songe spontanément au départ, en raison d’une scène horriblement violente qui annonce un film sang à souhait, où le sang gicle lorsque des cœurs fraîchement extirpés de corps agonisants sont envoyés au malaxeur pour une secousse de puissance aux propriétés rajeunissantes hors du commun. La trame sonore de musique classique et lyrique se prête à merveille à cette dystopie particulièrement cynique, doublée d’une fable familiale sur la corruption, l’avarice et la cupidité. La mise en scène de Larraín est minutieuse, soignée, et elle dicte le rythme du récit, moins contemplatif que ses précédents films plus traditionnellement biographiques.

Contactée par les enfants Pinochet, qui n’en peuvent plus d’attendre leur héritage, une jeune nonne qui parle français tente de séduire le vieux dictateur pour mieux l’exorciser. Pendant que son fidèle serviteur fomente un complot avec sa femme. Et je ne vous dirai pas pourquoi la narratrice est une Britannique… Vous pourrez juger vous-même de ce joyeux délire dès le 15 septembre sur Netflix (que Venise ne snobe pas, contrairement à Cannes).

La classe de Monia “Tu vas m’entendre répéter des choses que je t’ai déjà dites, mais en anglais!”, m’a dit Monia Chokri lorsque je l’ai rencontrée au Lido. Elle n’avait pas tout à fait raison. La cinéaste et actrice québécoise donnait jeudi après-midi une classe de maître, à l’invitation de la section Giornate degli Autori, dans le cadre du “focus” sur le Québec de la 80e Spectacle de Venise. Une cinquantaine de personnes, pour la plupart des jeunes étudiants en cinéma, étaient à la Sala Laguna pour l’entendre parler de son parcours, du Conservatoire d’art dramatique jusqu’à la réalisation de son troisième long métrage, “Simple comme Sylvain” qui prendra l’affiche le 22 septembre au Québec.

Écrire est un acte d’humilité, voire parfois de honte, a-t-elle dit de son expérience de scénariste, un processus qu’elle trouve long, éprouvant, mais assurément gratifiant. On sent bien que la scénarisation et la réalisation sont ses principaux moteurs de création en ce moment, davantage que le jeu d’actrice, même si elle tient un petit rôle – de mère légèrement excédée – dans son nouveau film, présenté en première mondiale au plus récent Festival
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