“L’aide prend du temps et chaque seconde est critique”

“L’aide prend du temps et chaque seconde est critique”

2023-09-12 00:01:33

Sur la route principale d’Amizmiz, plusieurs hommes, femmes et enfants font la queue au bord d’un des trottoirs. Certains attendent debout et d’autres assis sur leurs valises en raphia. Et ils ne désespèrent pas. Beaucoup n’ont désormais plus rien à perdre et ont improvisé un arrêt de taxi ou de voiture privée qui les emmènera dans d’autres régions du pays.

A quelques mètres de là, un camion bleu rempli de provisions avec des couvertures, des cruches d’eau et des parcs alimentaires devant l’une des entrées cardinales de la ville. Une vingtaine de personnes s’approchent de la vitre du conducteur, lui demandant de baisser la cargaison. Ils ne peuvent pas tenir encore une seconde. Le chauffeur crie en arabe : « Pas encore, attendez ! L’agitation revient. Cette ville de 20 000 habitants de la région d’Al Houz a été l’une des plus touchées lors du séisme du 8 septembre.

“L’aide prend du temps et chaque seconde est critique”, explique l’un des voisins qui lève des pierres pour faciliter la circulation des voitures qui attendent sur la route. Quelques secondes plus tard, un groupe de personnes se joignent aux cris. Une femme arrache le voile d’une autre. Un autre homme attrape une brique et menace de la lancer sur un autre groupe plus loin. «On perd le sang-froid», commente l’un des spectateurs du combat. “Les gens ont faim, soif et ont perdu leur maison et leurs proches. Comment peut-il ne pas y avoir de combats ?”, insiste-t-il.

Soupçons de gestion nationale

Le visage de Mohamed VI n’est pas encore apparu à la télévision nationale. Plus de 48 heures après le fort séisme qui approche déjà les 3 000 morts, les adresses et déclarations des dirigeants du royaume marocain se font rares. Quasiment inexistant. Le monarque, qui s’est envolé samedi de Paris pour le Maroc, ne s’est pas adressé à son peuple. Il ne s’est pas non plus rendu dans les zones touchées. Plusieurs sources locales, qui préfèrent rester anonymes, assurent que la direction marocaine est « honteuse ». D’autres pointent directement du doigt le monarque et son « absence constante ».

La vérité est que jusqu’à samedi après-midi, la population marocaine n’avait reçu aucune communication officielle du Palais Royal. Jusqu’à ce que le Roi pose les pieds à Rabat, personne parmi son équipe gouvernementale, gouverneurs ou maires, n’annonçait les démarches à suivre. Pendant ce temps, c’est surtout le Grand Atlas et d’autres régions du pays qui s’effondrent.

Même si les portraits du monarque ornent les magasins, les administrations, les centres culturels et même les coiffeurs, Mohamed VI est déjà connu comme le roi absent. Sa résidence est divisée en trois : la France, le Gabon et, occasionnellement, le Maroc. En 2022, une vidéo du monarque apparemment sous l’emprise de l’alcool à Paris montrait, plus fortement, une attitude inappropriée de la part du représentant de la nation. Cette même année, Mohamed VI passe plus de 200 jours hors du Maroc.

Aide lente

L’aide des organisations internationales et des équipes de secours intervient tant bien que mal dans un contexte de pression et de catastrophe totale. Dans des déclarations à elDiario.es, le directeur des urgences de la Croix-Rouge espagnole, Iñigo Vila, a expliqué que les premiers 24 à 48 sont les plus compliqués. « Au début, nous ne savons pas qu’il y a eu un tremblement de terre et nous devons attendre l’autorisation et les dernières données des autorités locales pour pouvoir fonctionner », déclare Vila.

Les équipes du Croissant-Rouge marocain, en coordination avec la Fédération internationale des Sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge (FICR), se sont déjà rendues sur le terrain pour évaluer la situation et soutenir les opérations de recherche et de sauvetage. « Nous soutenons nos collègues du Croissant-Rouge marocain en matière de santé, d’abris, d’eau et d’assainissement », indique le responsable des urgences.

Face à un scénario de désespoir parmi les habitants, Vila insiste sur le fait que les démarches pour obtenir l’autorisation sont lentes, mais également nécessaires. « Si nous arrivons dans les zones touchées avec des tonnes de nourriture, mais sans un plan de distribution clair et efficace, nous pouvons causer d’autres problèmes », insiste le directeur.

Ce n’est pas une opération rapide, c’est une opération en arrière-plan. Ainsi, le directeur des urgences de la Croix-Rouge souligne qu’il attend des nouvelles du Croissant marocain pour commencer à opérer. « Les accès sont très compliqués. Des routes menant à des zones reculées sont bloquées. Nous ne connaissons toujours pas l’ampleur et les dégâts du tremblement de terre », déclare-t-il au média.

Géopolitique humanitaire

Le tremblement de terre au Maroc a mis en lumière les différences entre ce pays d’Afrique du Nord et ses partenaires internationaux – et non-partenaires. Jusqu’à présent, Mohamed VI n’a accepté l’aide humanitaire active que de quatre pays : l’Espagne, le Royaume-Uni, les Émirats arabes unis et le Qatar. Ceux-ci, qu’il considère comme des alliés, opèrent déjà dans les zones touchées. Auxquels s’ajoutent d’autres forces non officielles venues d’Israël, avec des sauveteurs volontaires de United Hatzalah. Depuis Tel Aviv, ils insistent pour offrir leur aide dans la recherche des victimes et des survivants, mais ils n’ont pas encore reçu de réponse.

Au contraire, le manque de réponse à la France, Algérie –qui a rouvert son espace aérien au Maroc, fermé depuis septembre 2021– et les Etats-Unis mettent en avant les frictions. Bien que des sources proches de l’Administration affirment dans divers médias qu’il s’agit d’une stratégie « responsable, rigoureuse et efficace », l’assistance des pays liés au royaume alaouite est prioritaire.

En septembre 2021, l’Algérie a ordonné la fermeture de son espace aérien. Alger a ainsi rompu ses relations diplomatiques avec Rabat après avoir accusé le Maroc de soutenir des groupes qu’il qualifie de terroristes dans les incendies qui ont ravagé cette année-là le nord du pays et fait des dizaines de morts. La réalité est que l’inimitié remonte à 1994. Depuis, les frontières terrestres des deux États sont fermées. De son côté, le président français Emmanuel Macron a affirmé à deux reprises offrir à Rabat le soutien de la nation française, sans aucune réponse.



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