Retardée par la pandémie de Covid-19, les résultats sont tombés au milieu des Jeux olympiques d’hiver 2022 à Pékin: une concentration infime de trimétazidine avait été trouvée chez la jeune championne, qui venait de remporter le titre par équipe avec la Russie en réussissant le premier quadruple saut féminin de l’histoire des Jeux, et qui s’annonçait comme la grande favorite de l’épreuve individuelle.
Une affaire paradoxale
Mais début janvier 2023, la commission disciplinaire indépendante de Rusada a révélé n’avoir infligé aucune suspension à la patineuse, estimant qu’elle n’avait commis “aucune faute ou négligence”. Kamila Valieva est depuis revenue en compétition, prenant la deuxième place fin 2022 des Championnats de Russie. En revanche, le podium de l’épreuve par équipes des Jeux de Pékin est toujours en suspens, au grand dam des Américains, Japonais et Canadiens battus par les Russes.
L’AMA, l’ISU et Rusada ont donc porté l’affaire devant le TAS, réclamant jusqu’à quatre ans de suspension et l’annulation de tous ses résultats depuis fin 2021. Depuis sa révélation en février 2022, l’affaire est paradoxale: l’âge de la patineuse, alors âgée de 15 ans, aurait dû lui garantir une confidentialité totale, selon les règles de l’AMA pour les “personnes protégées” de moins de 16 ans. Mais le théâtre olympique et le niveau exceptionnel de Valieva lui ont donné une résonance mondiale. À Pékin, la jeune patineuse avait fini par craquer sous la pression lors de l’épreuve individuelle, terminant en larmes à la quatrième place.
“La confidentialité est prévue à bon escient, mais devient un peu factice lorsque l’on a affaire à des athlètes de haut niveau”, constate David Pavot, directeur de la chaire de recherche sur l’antidopage à l’Université canadienne de Sherbrooke, auprès de l’AFP. Pour lui, l’affaire Valieva a “soulevé des questions éthiques plus larges sur un âge minimal pour participer aux Jeux”. En outre, souligne David Pavot, Kamila Valieva a été prise “dans un engrenage plus grand qu’elle, avec un récit anti-russe où tout est mélangé”, en raison du vaste système de tricherie révélé en 2015 qui a discrédité à la fois le sport russe et son autorité antidopage.
Une contamination accidentelle ?
La jeune sportive avait évoqué une “contamination par les couverts” partagés lors d’un repas avec son grand-père, traité avec de la trimétazidine après la pose d’un cœur artificiel, et qui la conduisait chaque jour à l’entraînement.
Les instances sportives ont déjà reconnu en 2018 deux cas de contamination accidentelle à la trimétazidine: celui de la nageuse américaine Madisyn Cox, via un complément alimentaire (suspension réduite), et celui de la bobeuse russe Nadezhda Sergeeva, suspendue pendant les Jeux de Pyeongchang et blanchie huit mois plus tard.
La trimétazidine est interdite par l’AMA depuis 2014 car elle favoriserait la circulation sanguine. Cependant, des doutes persistent depuis des années quant à son intérêt réel pour la performance sportive en raison notamment de ses “nombreux effets secondaires” allant des “troubles de la marche” aux “hallucinations”, notait la revue Toxicologie analytique et clinique fin 2020.
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