Entretien avec Claire Trichot, présidente de l’association 100% Mamans, sur la nouvelle expérience virtuelle pour sensibiliser au quotidien des mères célibataires

Entretien avec Claire Trichot, présidente de l’association 100% Mamans

Claire Trichot nous parle de la nouvelle expérience virtuelle “Dans ma peau” destinée à sensibiliser au quotidien des mères célibataires, dès l’annonce d’une grossesse non désirée.

ALM : Comment avez-vous eu l’idée de lancer cette nouvelle expérience virtuelle sur la situation des mères célibataires ?
Claire Trichot : En fait, nous avons lancé en 2021 une étude sociologique sur les violations et les discriminations subies par les mères célibataires et leurs enfants au Maroc. Cette étude a été menée par les deux chercheurs Khalid Lahsika, sociologue, et Imane Louati, doctorante en sociologie, qui nous ont accompagnés en tant qu’association pendant la réalisation de ce travail. Elle est basée sur un processus participatif et repose sur la collaboration d’une cinquantaine de mamans afin de nous permettre d’analyser en profondeur toutes sortes de discriminations et de violences qu’elles subissaient tout au long de leur parcours de vie. Cette étude nous a aidés à tirer des recommandations et nous a permis d’identifier les cibles de nos campagnes de sensibilisation à mener, des messages à passer,… Après la réalisation de cette étude, nous avons décidé d’organiser une exposition artistique pour expliquer le parcours de vie d’une mère célibataire. Donc, les difficultés qu’elles rencontrent dès qu’elles tombent enceintes et comment elles les vivent. Nous avons pensé ensuite passer au digital et lancer l’expérience virtuelle “Dans ma peau” pour sensibiliser au quotidien des mères célibataires. L’application, via un casque, offre une approche sensible et immersive du vécu de ces mères, dès l’annonce d’une grossesse non désirée.

Quels sont les premiers résultats obtenus par la nouvelle expérience virtuelle?
Nous avons pu depuis le lancement de cette expérience toucher 1.007 personnes de différentes couches sociales : 743 femmes et 264 hommes. Nous ciblons beaucoup plus les jeunes hommes en vue de mieux les sensibiliser à la condition de la mère célibataire et pour que les nouvelles masculinités soient positives et moins violentes et plus inclusives. Même si nos chiffres obtenus jusqu’à présent montrent que le nombre de femmes qui ont testé cette expérience dépasse celui d’hommes.

Quel est l’objectif principal de cette nouvelle expérience ?
C’est un type de sensibilisation différent, très innovant et qui fait appel aux émotions des gens. Nous cherchons à travers l’expérience virtuelle à changer le regard que portent les citoyens et les citoyennes sur les mères célibataires et leurs enfants afin de pouvoir prévenir la violence et la discrimination à leur égard et améliorer leur itinéraire de vie dans la société.

Quelles sont vos nouvelles actions au sein de l’alliance associative pour la défense des droits des mères célibataires, dont “100% Mamans” est l’un des membres fondateurs ?
L’alliance associative pour la défense des droits des mères célibataires est créée avec l’association INSAF et l’Association solidarité féminine (ASF) à Casablanca, qui existent depuis de nombreuses années dans le champ associatif et que nous considérons comme deux grandes sœurs de 100% Mamans. Nous sommes toutes les trois engagées dans la promotion des droits et l’accompagnement des mères célibataires et de leurs enfants au Maroc. Nous avons pu bénéficier de l’appui de l’Union européenne pour le financement de cette dynamique collective et d’essayer à travers cet espace collectif de sensibiliser d’autres associations dans des régions plus reculées et pouvoir les soutenir dans leurs actions de défense des droits de femmes.
En tant que militante associative, quel est votre avis sur le lancement de la réforme de la Moudawana dans le contexte actuel et le rôle des associations dans la réalisation de ce chantier royal ?
Le lancement des consultations sur le projet de réforme de la Moudawana constitue une grande opportunité pour faire entendre la voix des associations féministes, dont celles pour la défense des droits des mères célibataires. Notre objectif est que la réalité de ces mères et leurs enfants soit visible et prise en considération dans ce nouveau projet.

Comment faites-vous pour faciliter l’intégration socioprofessionnelle des mères célibataires ?
100% Mamans a mis en place, depuis son démarrage en 2006, un accompagnement intégral en faveur des mères célibataires. Nous voulons répondre aux besoins les plus urgents de la maman. Mais une fois que l’enfant est né, nous travaillons pour faciliter son inclusion économique et sociale. Nous accompagnons la maman dans le processus de son intégration dans la vie normale et surtout pour qu’elle puisse subvenir à ses besoins et ceux de son enfant, d’une manière responsable et autonome. D’ailleurs, nous faisons partie du réseau dit Incorpora avec deux associations basées à Tanger et à Casablanca et nous partageons des offres d’emplois au profit des mères célibataires. Ce réseau, coordonné par l’association Casal Del Infants, nous permet de travailler ensemble pour sensibiliser et encourager des entreprises à former et accompagner les personnes vulnérables comme les mères célibataires à obtenir un emploi digne.
Nous sommes soutenus au sein du réseau d’une cinquantaine d’entreprises partenaires dans des secteurs de l’hôtellerie et de la restauration, l’industrie de confection, le câblage…