L’Argentine réduit de moitié la valeur de sa propre monnaie : pourquoi le pays fait-il cela ?

L’Argentine réduit de moitié la valeur de sa propre monnaie : pourquoi le pays fait-il cela ?

Le parti d’extrême droite Milei – qui se qualifie d’« anarcho-capitaliste » – tente d’aider l’économie argentine en difficulté à se remettre sur pied avec cette mesure. Selon lui, en quoi la dévaluation de la monnaie pourrait-elle aider, et peut-il simplement le faire ? Cinq questions et réponses.

Que fait exactement le gouvernement argentin ?

Le ministre argentin de l’Économie, Luis Caputo, a annoncé avant-hier la dévaluation du peso. Les Argentins paient désormais environ 395 pesos pour un euro, ce qui atteindra bientôt un peu plus de 800. En outre, la banque centrale vise une dépréciation mensuelle de 2 pour cent.

La mesure annoncée par Caputo s’accompagne de réductions importantes. Les appels d’offres publics, par exemple pour les infrastructures, seront annulés, certains emplois gouvernementaux disparaîtront et les subventions seront supprimées.

Pourquoi le gouvernement argentin fait-il cela ?

Pour comprendre cela, il est bon de jeter un œil au graphique ci-dessus. “Si vous faites des affaires avec le gouvernement argentin, vous payez le tarif officiel. Mais sur le marché noir, vous payez quelque chose de différent”, explique Durk Veenstra, commentateur boursier de RTL Z. “En fait, c’est un ajustement à la réalité.” En fait, même après que la valeur du peso ait été réduite de moitié, la monnaie argentine vaut encore moins sur le marché noir.

L’Argentine est aux prises avec une hyperinflation depuis des années, à un taux d’environ 140 % par an. Quatre Argentins sur dix vivent également dans la pauvreté. Rendre le peso moins cher rendra plus coûteuse l’importation de produits pour les Argentins, mais stimulera en réalité les exportations. L’idée est que cela devrait freiner l’inflation.

Même si la réévaluation du peso constitue la mesure la plus marquante, elle ne peut être considérée séparément des réductions annoncées. En réduisant les subventions et les dépenses publiques, moins d’argent entre dans l’économie argentine. Ce n’est pas seulement bon pour les finances publiques, cela crée également une pénurie, ce qui signifie que le peso devrait prendre plus de valeur.

Quels en sont les effets ?

L’objectif est donc d’arrêter l’hyperinflation, mais à court terme, c’est le contraire qui se produira, prévient le ministre argentin de l’Économie, Caputo. En effet, les produits importés deviennent instantanément deux fois plus chers. À long terme, l’inflation devrait se stabiliser grâce à la dévaluation et à l’austérité.

Le professeur d’études latino-américaines Michiel Baud est convaincu que les réductions auront plus d’effet que la dévaluation. “Beaucoup d’Argentins n’ont pas d’argent, donc ils ne s’en apercevront pas. Mais les réductions entreront en vigueur lundi, et puis les tickets de métro, par exemple, seront tout d’un coup plus chers.”

Quoi qu’il en soit, il faudra un certain temps à l’Argentin moyen pour « mordre à travers la pomme aigre », estime Baud. L’espoir est que les effets positifs de ces mesures se feront sentir assez tôt. “Si cela n’est pas fait à temps, les syndicats seront bientôt prêts à protester. Cette expérience pourrait alors dégénérer en chaos”, estime Baud.

Car des effets positifs sont certainement envisageables. L’Argentine exporte principalement des produits agricoles, et ces produits deviennent beaucoup moins chers à importer pour les autres pays. Cela est dû à la dévaluation du peso, mais aussi au fait que le gouvernement de Milei souhaite supprimer les taxes à l’exportation sur ces produits.

De plus, les coupes budgétaires, aussi douloureuses soient-elles, semblent toujours nécessaires. L’Argentine est au bord de la faillite depuis des décennies et a dû être secourue à plusieurs reprises par le Fonds monétaire international (FMI). Il salue donc les nouvelles mesures « audacieuses ».

“Je pense que ce n’est qu’en février que l’on pourra voir où se situent les succès et les problèmes de cette politique”, estime Baud.

Un gouvernement peut-il simplement réduire de moitié la valeur de sa propre monnaie ?

La réponse courte est oui, déclare le commentateur boursier Veenstra : “Qui est le patron d’une monnaie ? En fait, c’est le gouvernement et la banque centrale.” De plus, la valeur officielle de la pièce ne fait que se rapprocher du prix du marché, explique Veenstra. Il est donc probable que la réévaluation soit acceptée par les marchés financiers et la société argentine.

Milei ne voulait-il pas se débarrasser complètement du peso ?

C’était effectivement une promesse électorale du politicien libertaire. En Argentine, on paie déjà tellement d’argent en dollars qu’on pourrait tout aussi bien introduire officiellement la monnaie américaine, du moins c’est le raisonnement qui prévalait. Pourtant, cela pourrait n’être qu’une promesse vide de sens, pense Baud. Après tout, pour introduire le dollar américain, il faut acheter tous les pesos argentins, et on ne sait pas exactement comment l’Argentine obtient suffisamment de dollars pour ce faire.

Veenstra constate également que la politique de Milei est beaucoup moins extrême que l’image qui s’est dégagée des élections : “Une dévaluation est en fait un remède très classique pour les pays économiquement faibles.” Quoi qu’il en soit, ce sera une fête de Noël passionnante pour le pays sud-américain, et la présidence de Milei ne fait que commencer.

2023-12-15 08:32:25
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