« J’ai besoin de vivre » : Juergen Teller à Paris

« J’ai besoin de vivre » : Juergen Teller à Paris

2023-12-29 14:18:31

UNSur l’affiche publicitaire, Juergen Teller porte un short rose très court. Le tableau qui clôt l’exposition de l’homme de 59 ans, actuellement visible au Grand Palais Ephémère à Paris, montre le même motif. Il ne manque que le pantalon rose très court. Le photographe est donc complètement nu, allongé sur quelques oreillers et tenant à la main un bouquet de ballons colorés tout en regardant directement l’appareil photo.

Pas seulement de la provocation

Vous pouvez le voir nu dans cette exposition et en principe souvent dans son travail. Ensuite, vous connaissez la cicatrice sur son ventre, qui est devenue molle et comporte quelques poils, et dans l’ensemble, vous en savez beaucoup plus sur sa condition physique que vous n’auriez peut-être jamais voulu savoir. Mais il ne se contente pas de se mettre à nu, il met également les autres à nu. Vivienne Westwood, par exemple. Dans une image déjà devenue emblématique, la créatrice de mode, décédée en 2022, est assise les jambes écartées, ses cheveux teints en rouge formant un petit nid sur sa tête, et elle sourit à la caméra avec une confiance en elle intelligente.

Vous auriez alors dû comprendre que même lorsque Teller vous tend l’anus (allongé sur un piano avec Charlotte Rampling qui joue), il ne s’agit pas d’une provocation à bas prix. Mais de ce qui reste quand on s’habitue à la nudité : la vulnérabilité, la fierté, l’immédiateté. Peut-être quelque chose comme la vérité.


Ce texte provient du Frankfurter Allgemeine Sonntagszeitung.

Ce que Juergen Teller crée dans sa plus grande exposition à ce jour est remarquable. Le Grand Palais Ephémère porte peut-être un joli nom, mais il a plutôt le charme d’un terminal d’aéroport. Au début, on pense que ces photographies, montées sur quelques murs en bois brut, ne parviendront guère à masquer cette impression. Mais ils y parviennent toujours.

Juergen Teller : « Autoportrait avec short rose et ballons », Paris, 2017


Juergen Teller : « Autoportrait avec short rose et ballons », Paris, 2017
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Image : Jürgen Teller

Les images que vous voyez ici racontent une histoire, celle de Juergen. Son père s’est suicidé en 1988, alors que Juergen avait 24 ans. Vous voyez le gros bébé qu’était Juergen, avec des fesses blanches et crème, des jambes qui battent et des yeux grands ouverts. Son père l’a pris en photo. À côté se trouve une grande copie de l’annonce dans le journal, qui rapporte qu’un homme n’a pu être sauvé de sa voiture que mort et que l’on suppose que cet homme s’est suicidé. Et puis vous voyez Juergen adulte, nu, dans un geste triomphal, devant la tombe de son père et buvant une bière. Et ce tableau peut être lu – comme on le comprend au fur et à mesure de l’exposition – bien plus comme un triomphe de la vie sur la mort que comme quelqu’un voulant triompher de son propre père.

Car ce qui est également en jeu ici, c’est le fait à la fois scandaleux et merveilleux que la vie continue toujours. La plus jeune fille de Teller, née en 2023, s’appelle Iggy, et le cycle d’images qui accompagne la grossesse de sa mère est précédé par Teller avec certaines des images qu’il a prises d’Iggy Pop. Ainsi, le cycle commence avec une vieille rock star incroyablement ridée et très joyeuse et se termine avec un nouveau-né endormi dans un Maxi Cosi.

L'exposition au Grand Palais Éphémère Paris se termine le 9 janvier.


L’exposition au Grand Palais Éphémère Paris se termine le 9 janvier.
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Image : Jürgen Teller

Et une fois de plus, Teller a triomphé de la mort, le déjouant en créant lui-même une nouvelle personne. Dans une vidéo, il marche péniblement dans la neige avec l’acteur suédois Alexander Skarsgård. Il porte un short rose et un chapeau jaune fluo ; Skarsgård une paire de caleçons noirs moulants. Les deux ne parlent pas, ils haletent l’un à côté de l’autre. Unis dans une tentative commune pour vaincre le froid.

La voix de Teller plane sur la scène, nous racontant avec un fort accent allemand qu’il n’a jamais perdu, même après plus de trente ans à Londres, comment il a rencontré pour la première fois son beau-père lituanien, qui ne parle ni anglais ni allemand. Teller dit que c’est un film sur l’amitié masculine. Et il montre à quel point ces liens entre hommes fonctionnent parfois de manière difficile et muette. C’est ainsi qu’on peut lire ses images : comme une exploration de l’espèce humaine complexe. Qui préfère parfois conduire dans un arbre plutôt que de chercher des mots ou des images pour ce qu’elle ressent. Teller ne fait pas cette erreur. À la fin de la vidéo, Skarsgård et Teller s’embrassent profondément, l’un saisissant courageusement les fesses de l’autre.

Sur une autre photographie, Teller est allongé nu sur un âne. À côté se trouve une illustration tirée d’un livre dans lequel il raconte comment il s’est rendu en Turquie, près de la frontière syrienne, au milieu des années 1980 et, alors qu’il montait un âne, il a failli être violé par un autre homme. l’époque à ce sujet – et comment il a rapidement rompu avec elle. Juergen Teller a surmonté ce manque de mots et trouve aujourd’hui des images de ce qui lui arrive et des différentes formes sous lesquelles la vérité de la vie se manifeste encore et encore.

Juergen Teller, j’ai besoin de vivre. Grand Palais Éphémère, Paris, jusqu’au 9 janvier 2024.



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