Les Templiers : des motards au grand cœur au service d’enfants harcelés

Les Templiers : des motards au grand cœur au service d’enfants harcelés

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Suisse romandeMotards au grand cœur au service d’enfants harcelés

Les Templiers accompagnent des bambins victimes d’abus et offrent un soutien pour leur redonner confiance.

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Les Templiers sont non-violents. Au centre, accoudé à sa moto, Pierre-Olivier Christen, alias «Poc», leur président.

Les Templiers sont non-violents. Au centre, accoudé à sa moto, Pierre-Olivier Christen, alias «Poc», leur président.

Darrin Vanselow

Ils sont 64 dans toute la Suisse romande, chevauchent de très gros cubes, sont vêtus de cuir et peuvent paraître effrayants. Mais les Templiers poursuivent un but exactement inverse: ils se sont donnés pour mission de rassurer et d’entourer les enfants victimes «d’abus psychiques, sexuels, mais aussi de harcèlement scolaire, qui a pris pas mal d’ampleur», explique Pierre-Olivier Christen, constructeur de piscines de profession, et président de cette association de motards.

«Nous ne sommes pas des justiciers»

En décembre, deux d’entre eux ont ainsi accompagné Luc* à son retour à l’école, afin qu’il reprenne courage et se sente fort. Le garçon de 12 ans revenait de maladie après avoir été longuement harcelé par un camarade (lire notre édition du 8 décembre). «Nous ne sommes pas des justiciers, nous sommes non-violents et nous ne nous substituons pas à la loi, insiste le président, qui se fait appeler “Poc”. Le but, c’est d’être visibles avec l’enfant, afin de démontrer une force, qu’il se sente soutenu, encadré. Il n’y a aucune intimidation, nous ne connaissons pas l’agresseur et restons toujours hors du périmètre de l’école», que les motards ne critiquent pas du tout. «On n’est pas là parce qu’elle fait mal son boulot, on sait qu’agir vite n’est pas si facile, on est juste un support en plus.»

«Les premiers qui nous aident vraiment», dit une mère

«Ils sont géniaux et vraiment là pour les enfants, témoigne la mère de Luc. Ça l’a soulagé de ne pas retourner tout seul à l’école.» Surtout, l’appui ne se limite pas à l’escorte mais consiste en un vrai suivi. «Ils ont un groupe WhatsApp avec lui, il peut leur écrire s’il a un souci, et ils sont super réactifs. Hier, il lui ont proposé d’aller avec lui à un cours de boxe. Ce sont les premières personnes qui nous aident vraiment.»

«On a le rôle de copains»

“Poc” explique que les motards étant extérieurs à la famille, l’enfant ne passe pas pour un faible qui est allé chercher ses parents lorsqu’ils l’accompagnent. «On a le rôle de copains, on fait le nombre. C’est important, puisque généralement, l’agresseur n’est jamais seul» mais est entouré de suiveurs et de rieurs. L’homme résume ainsi ce qu’est l’abus à ses yeux: «c’est simple: un individu plus fort qu’un plus faible, d’un lâche qui profite de sa supériorité physique.» Là, quand les hommes et les femmes en cuir arrivent pétaradant près d’une école, «généralement, les autres enfants viennent nous parler, nous demander qui on est, ce qu’on fait là. On répond qu’on est des amis de tel ou tel, et qu’on le protège.» Le rapport de force est renversé.

«Une force bienveillante»

Les Templiers agissent dans le cadre du harcèlement à l’école, mais peuvent aussi escorter un enfant lors d’un trajet («on a suivi un bus scolaire en Valais, avec deux bikers à l’intérieur de l’autocar. Les actes malveillants ont cessé du jour au lendemain»), ou l’accompagner au tribunal, par exemple s’il a été victime d’un viol et doit aller y témoigner. «L’enfant harcelé ou abusé souffre souvent d’une solitude énorme. Lorsqu’il est entouré par une force bienveillante, il prend confiance, il devient moins sensible, et offre de moins en moins de prise aux attaques extérieures, qui cessent souvent d’elles-mêmes.»

Un processus de sélection très serré

Les Templiers regroupent des motards des deux sexes et sont bénévoles. L’association est très carrée: l’intégrer exige une formation de douze à dix-huit mois et un casier judiciaire vierge, à fournir chaque deux ans. Lorsque les victimes ou leurs parents la contactent, trois membres vont au domicile pour faire connaissance et bien saisir le cas. Puis, un rapport est soumis à un comité d’évaluation de six personnes, dont un psychiatre, un psychologue, un policier et un travailleur social. Si le dossier (dont la véracité est toujours vérifiée) est retenu, deux parrains sont attribués au bambin. Ils seront disponibles en tout temps, notamment pour discuter avec lui, jusqu’à ce qu’il n’en ressente plus le besoin. Les escortes motorisées, elles, incluent généralement de dix à trente motards. Les Templiers n’hésitent pas, si besoin, à transmettre les cas à des intervenants spécialisés. A ce jour, ils parrainent 56 enfants.

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