Impact des attaques Houthis en mer Rouge sur le commerce mondial et l’économie européenne

Ainsi, les attaques des Houthis ont contraint de nombreux armateurs à emprunter une route plus longue pour éviter la zone, entraînant un surcoût du transport et des délais d’acheminement plus longs. Le journal Wall Street écrit d’ailleurs ce mardi que Shell ne fera plus passer ses navires via la mer Rouge jusqu’à nouvel ordre, imitant les compagnies pétrolières BP, QatarEnergy et Maersk.

Les perturbations sur les prix du transport maritime, qui ont déjà bondi de 240 % depuis novembre 2023, sont toutefois de courte durée. “Le prix du transport ne représente encore qu’un quart du pic atteint en 2021“, rassure Johan Geeroms, Directeur Risk Underwriting Benelux chez Allianz Trade. “La demande aux États-Unis et en Europe a diminué de 10 % par rapport à 2021 et les stocks sont encore relativement élevés.“

À court terme, Allianz Trade ne s’attend pas à “un impact significatif” sur les prix du gaz naturel en Europe, “étant donné que les réserves sont élevées et que la saison de chauffage touche déjà à sa fin, malgré la récente vague de froid“. L’étude note également une baisse des prix du pétrole.

Attaques en mer Rouge: “Cette crise tombe au plus mauvais moment, des produits risquent d’être en pénurie”

Vulnérabilité des prix de l’énergie

Mais qu’en est-il si la crise persiste ? Rien qu’entre le 28 décembre et le 6 janvier, les volumes de transport maritime dans le canal de Suez ont diminué de 15 % par rapport à 2023. Le nombre de bateaux, lui, a diminué de 30 % pour les cargos et de 19 % pour les pétroliers.

“Si la crise se prolonge pendant plusieurs mois, l’économie mondiale en subira les conséquences“, concède Johan Geeroms. “Prenons l’exemple de l’énergie : 12 % des pétroliers empruntent le canal de Suez qui relie la mer Rouge à la Méditerranée. Pour le gaz liquéfié, le chiffre est de 8 %. La crise entraînera une nouvelle hausse des prix de l’énergie en Europe. C’est une mauvaise nouvelle pour les citoyens et les entreprises.“

L’impact de l’augmentation des coûts de transport semble particulièrement important en Europe. “Dans quelques mois, si le conflit persiste, cela augmentera l’inflation européenne de +0,7 point de pourcentage. La croissance de l’économie européenne subira alors une baisse de -0,9 point de pourcentage“, peut-on lire dans l’étude. Au niveau mondial, un doublement des prix du transport maritime entraînerait une hausse de l’inflation de +0,5 point de pourcentage, ce qui se traduirait par une réduction de la croissance du PIB de -0,4 point de pourcentage.

Les attaques en mer Rouge risquent de peser sur l’Europe qui “dépend fortement de cette région pour ses importations de pétrole et de gaz”

Et en Belgique ?

“Il y a également des conséquences directes en Belgique qui ont commencé il y a trois semaines“, poursuit Johan Geeroms. “Il y a par exemple du chômage partiel chez Volvo (qui a une usine à Gand, NdlR) à cause de la pénurie de composants automobiles. Et ce n’est que le début. Si la crise dure plusieurs mois, on va beaucoup plus le sentir.” En Allemagne, Tesla a également suspendu la production de son Model Y pour une durée de deux semaines.

“Les économies européenne et américaine sont en équilibre précaire“, résume l’assureur. “En Europe, nous essayons de sortir de la récession. Cette crise freine la reprise. De nombreuses entreprises sont déjà en difficulté avec des marges réduites. Le nombre de faillites sera certainement plus élevé que prévu.“

Les attaques en mer Rouge, par où transite 12 % du commerce mondial, ont poussé les États-Unis et le Royaume-Uni à frapper vendredi et samedi les rebelles au Yémen, lesquels ont répliqué lundi en tirant un missile contre un cargo américain, sans faire de blessés ni de dégâts majeurs. Un vraquier grec a aujourd’hui été touché par un missile tiré par le groupe yéménite alors qu’il se dirigeait vers le canal de Suez, rejoignant la liste des trentaines de navires qui ont subi le même sort depuis fin novembre.

Pourquoi les attaques des Houthis en mer Rouge, zone “géostratégique”, mettent l’Europe dans une posture délicate