La destitution des juges n’est pas une nouveauté en soi, mais elle demeure une mesure quasi exceptionnelle. Il y a eu peu de juges destitués depuis 1971, année de création du Conseil canadien de la magistrature (CCM).
Depuis sa création, le CCM a mené dix enquêtes sur des inconduites graves pouvant justifier une révocation, mais seulement cinq ont abouti à cette recommandation. Cela suscite la question de savoir si nos juges sont très vertueux ou suffisamment astucieux pour contourner le système.
Une chose est certaine, si certains juges ont fait l’objet de plaintes, très peu d’entre eux ont subi des conséquences monétaires. Par exemple, l’ex-juge Michel Girouard a démissionné avant d’être destitué, tout comme le juge Gérard Dugré.
Comme révélé par notre Bureau d’enquête, le juge Dugré a continué à recevoir un salaire de plus de 300 000 $ pendant quatre ans, tout en accumulant des années d’ancienneté pour sa pleine pension.
Tergiversations du gouvernement Trudeau
Après l’affaire du juge Michel Girouard de la Cour supérieure du Québec en Abitibi, dont la destitution a été recommandée par le CCM en 2018 pour une histoire de cocaïne, le gouvernement Trudeau ne pouvait ignorer que le processus d’examen des plaintes visant les juges était problématique.
Pire encore, un rapport du ministère de la Justice datant de juin 2016 fait état de problèmes majeurs dans les procédures disciplinaires et les enquêtes sur la conduite des juges. Malgré ces constats, le processus d’examen établi en 1971 n’a été modifié qu’en 2021 avec le dépôt du projet de loi C-9.
Si le gouvernement Trudeau avait agi plus rapidement ou pris le dossier au sérieux, le juge Dugré n’aurait peut-être pas accumulé les 15 années d’ancienneté pour avoir droit à une pension, et il aurait arrêté de recevoir son salaire en juillet 2022, date de recommandation de sa destitution.
Paiement des frais d’avocat
La Loi sur les juges prévoit que les honoraires et les dépenses des avocats mandatés par un juge concerné par une plainte sont payés par les contribuables. Ne pourrait-on envisager un système où les juges destitués devraient rembourser les frais?