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Tributes and Protests for Alexeï Navalny’s Death: Russians Demand Justice

by Nouvelles
Tributes and Protests for Alexeï Navalny’s Death: Russians Demand Justice

Depuis l’annonce de la mort du principal opposant de Poutine, vendredi, des Russes ordinaires veulent déposer une fleur ou se recueillir dans plusieurs villes, parfois au risque d’être arrêtés par les forces anti-émeutes.

Ils continuent à arriver, déterminés, peu impressionnés par l’impressionnant dispositif policier qui les attend. Ils avancent, par petits groupes, un œillet rouge ou quelques tristes roses ou tulipes blanches dans la main. Il y a beaucoup de femmes, de tous âges, des jeunes gens, des plus âgés. Ils veulent à toute force déposer leur hommage, se recueillir un instant. Alors ils insistent, résistent devant les cordons policiers, poussent parfois dans le tas. «Parce que, si on ne sort pas maintenant dans la rue, alors quand ?» dit l’un d’entre eux. Depuis vendredi matin et l’annonce de la mort d’Alexeï Navalny, le flot est continu. C’est plutôt un mince filet de soutien, mais il existe et persiste, bien visible en dépit de l’oppression des médias libres, plus de vingt-quatre heures après l’annonce du décès brutal à 47 ans, dans des circonstances encore inconnues, de l’opposant numéro un à Poutine, dans la colonie pénitentiaire au-dessus du cercle arctique. Il y purgeait une peine de 19 ans pour s’être opposé à Poutine, avoir dénoncé sa corruption et celle de son régime.

Ces hommages ont lieu dans toute la Russie, dans au moins 29 villes, a relevé OVD-Info, une organisation de défense des droits humains qui répertorie attentivement toute la répression politique en cours dans le pays. A Moscou, les policiers bloquent les abords du métro, ils sont des dizaines en tenue anti-émeutes, beaucoup plus que les manifestants. Plusieurs d’entre eux, par sécurité, filment la scène, qui se répète encore et encore. «Dégagez, bougez de là, il est interdit de se rassembler» répètent les policiers. «Pourquoi ? Pourquoi ? C’est ma liberté, je veux juste aller me recueillir !» répond une jeune fille blonde en anorak rose. «Nous avons le droit d’être là, nous voulons être là et nous resterons là. La rue n’est pas à vous, elle nous appartient à tous !» La foule gronde, serrée en haut des escaliers de la sortie du métro. Les policiers resserrent leur cercle, la tension monte. Un cri jaillit : «Honte, honte, honte !» (Pazor ! en russe) repris en chœur par le petit groupe.

Ces Russes ordinaires veulent simplement déposer une fleur ou se recueillir, un instant, pour rendre hommage à Alexeï Navalny. Mais même ça semble être trop pour le régime de Poutine. Samedi en milieu d’après-midi, plus de 273 personnes avaient été interpellées, parfois violemment, alors qu’elles témoignaient de leur chagrin après la mort de celui qui, semble-t-il, faisait peur à Vladimir Poutine, même depuis sa prison, et aujourd’hui encore, même dans la mort.

Ironiquement, à Moscou notamment, c’est devant le mur du Chagrin, monument aux victimes de la répression politique sous Staline, que les gens ont souvent choisi de venir tenter de se recueillir. Le président russe lui-même avait inauguré l’endroit en personne en octobre 2017. Dans toute la Russie, ces monuments ont fleuri après la dislocation de l’empire de l’Union soviétique, en 1991. A Moscou, l’ambassadeur britannique Nigel Casey a déposé des fleurs, lui n’a pas été arrêté. Ni celui des Pays-Bas qui s’est rendu dans un autre lieu symbolique de la capitale, place Loubianka où siégeait autrefois le KGB et où se trouve désormais son homologue poutinien, le FSB.

«L’histoire est de notre côté»

A force d’insister, à force de pousser, les gens arrivent tout de même à déposer leurs fleurs, mais s’ils se recueillent trop longtemps, les voilà expulsés sans ménagement hors du périmètre. Une vieille dame est poussée par deux molosses et manque de glisser, alors qu’un homme est carrément empoigné, sa face écrasée dans la neige avant d’être traîné jusqu’à la fourgonnette qui l’emmènera au commissariat. «C’est un jour très triste pour nous tous, mais Alexeï nous a demandé de ne pas abandonner, et nous n’abandonnerons pas. Ils peuvent penser qu’ils ont gagné. Mais ce n’est pas le cas. L’histoire est de notre côté et le bien est de notre côté» dit une femme en bonnet beige.

Lorsque la police bloque trop, les manifestants n’hésitent pas à laisser leurs fleurs sur un tas de neige amoncelé le long d’une rue, ou accrochées à un lampadaire avec un petit mot sous plastique. Une pancarte a été abandonnée. Elle dit ces mots : «Tout ce dont le Mal a besoin pour triompher, c’est de l’inaction de gens de bien». Ils ont été prononcés par Navalny.

A Ekaterinenbourg, en Sibérie, des fleurs rouges ont été plantées dans la neige, sur un étang gelé et étincelant sous le soleil. «On n’a pas de monument dédié, alors on improvise, on fait comme on peut» raconte un habitant au media russe indépendant Sota.vision sur Telegram.

Toutes ces images, ces vidéos, ces témoignages circulent sur les boucles des réseaux sociaux et surtout sur Telegram, puisque la presse libre n’existe plus en Russie. A Saint-Pétersbourg, le monument du souvenir est noyé sous les fleurs, c’est dans cette ville que les hommages semblent les plus nombreux, selon OVD-info. Dès que plus de trois personnes s’approchent, les policiers interviennent. Mais les fleurs restent. Et, abandonné là par un anonyme, un exemplaire de L’Archipel du Goulag l’extraordinaire récit de l’enfer des camps de travail par l’un des plus célèbres dissidents soviétiques, Alexandre Soljenitsyne.

Le jeune activiste Yaroslav Smolev a réussi à rester quelques minutes debout, en silence, devant la Cathédrale de Kazan de Saint-Pétersbourg, la ville d’où est originaire Vladimir Poutine. Il brandissait une pancarte portant ces mots : «Navalny est mort parce que nous nous en fichions.» Et puis, il a été embarqué par les policiers.

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