Est-ce parce qu’il n’a pas confiance en sa pointe de vitesse que Vingegaard entend gagner toutes ses courses en solitaire ? A priori non, le Danois n’a juste aucun égal dans les cols quand Tadej Pogacar n’est pas là, et parfois même quand le Slovène et sa mèche sont de la partie. En Galice jusqu’à dimanche, il n’a trouvé personne pour l’accompagner et son avance finale (1’55”) glanée en trois étapes prouve l’étendue de sa domination. Personne donc n’a pu l’embêter disions-nous ?
Dans la roue de Vingegaard
Ce dimanche, un effronté pas bien haut sur son vélo a quand même tenté de prendre la roue du meilleur grimpeur du monde. “Dans la dernière bosse, j’ai pu être bien placé et réagir à l’attaque de (Jonas) Vingegaardexpliquait Lenny Martinez dans un communiqué de la formation Groupama-FDJ. Malheureusement je n’ai pas réussi à suivre mais je suis resté à 10-15 secondes pour gérer mon effort, ne pas exploser.” Le débours final (16”) confirme les dires du grimpeur de poche, le seul à résister au double vainqueur du Tour quand le reste de la meute concédait plus de 45 secondes.
“C’est la première fois que je suis dans la roue de Jonas quand il attaque et même que je bataille avec lui pour l’étapes’enthousiasmait Martinez. Je suis très content, c’est la première fois mais ça ne sera pas la dernière. Ça annonce de belles choses et j’ai envie de refaire ça à l’avenir.” Cette réaction et le pedigree de ses compagnons de podium (Vingegaard et Bernal donc), “deux grands champions” feront de ce séjour en Galice un point important de la naissante carrière de Lenny Martinez. S’il s’était mis en avant en filou sur la Classic Var mi-février domptant le Mont Faron après le Ventoux, excusez du peu, en 2023, c’est cette fois sa performance physique que l’on retiendra.
Devant Bernal, Uijtdebroeks, Carapaz et Gaudu
Car s’il a été battu par Vingegaard, ce qui n’a rien d’infamant, Martinez a dominé pêle-mêle, Egan Bernal, Cian Uijtdebroeks, Hugh Carthy ou plus loin Richard Carapaz et… David Gaudu. Ce dernier jouera les soutiens pour son jeune coéquipier promis à un rôle de leader sur la prochaine Vuelta – après y avoir porté le maillot rouge en première semaine mais aussi souffert dans les deux dernières -, mais pas sur le Tour que lui et son équipe ont jugé encore trop grand pour ses 20 printemps.
S’il aura “une maturité plus tardive” que Grégoire, dixit Philippe Mauduit, le boss des directeurs sportifs chez Groupama-FDJ, Martinez grandit à vue d’œil. Alors que son équipe a perdu Thibaut Pinot, il sait qu’il doit être de ceux qui prennent le relais, dans l’état d’esprit pour que l’héritage Pinot ait du sens, sur la route aussi. Surpris d’avoir gagné dès sa première saison alors qu’il envisageait, dans ses pires cauchemars, une carrière sans victoire – “le niveau est tellement élevé maintenant” -, Martinez a déjà fait aussi bien en 2024. Pourtant, février n’a pas encore rendu son dernier souffle.
“Je me disais que j’allais prendre des claques en World Tour“, se rappelait encore Martinez à Eurosport avant la reprise de la saison. Il en a pris quelques-unes et n’en a pas encore vraiment délivré mais ceci ne veut pas dire qu’il n’a pas embêté des plus vieux que lui ici ou là et ce O Gran Camino s’inscrit dans cette lignée, malgré le débours conséquent concédé à Vingegaard en trois jours (1’55”). On rappellera aussi son excellent contre-la-montre initial même si celui fut tronqué par son incidence nulle pour le général en raison des conditions venteuses et dangereuses.