2024-03-29 17:07:13
AGI – Un géant de la politique italienne et de l’antifascisme, directeur de la revue Critica Sociale, coupablement oublié pendant des années. Arrive à la librairie “L’hérétique. Giuseppe Faravelli dans l’histoire du socialisme italien”, un volume écrit par Fabio Florindi et publié par Arcadia edizioni. Il s’agit de la première biographie sur la vie de Faravelli, un homme qui a traversé une vaste saison politique italienne, toujours du côté des ouvriers et du socialisme réformiste. Proche de Giacomo Matteotti et Filippo Turati, avec l’avènement du fascisme, il subira lui aussi des persécutions qui le conduiront à s’expatrier à l’étranger, où il deviendra Joseph, l’un des leaders antifascistes les plus intransigeants et influents en exil. Le livre propose un récit plein de détails et de documentation inédite. À travers un style engageant, il nous livre non seulement la figure publique de Faravelli, mais aussi sa face la plus intime et humaine. C’était un homme irascible qui se livrait souvent à des accès de colère légendaires. Il était également doué d’une ironie corrosive, qui se transformait volontiers en langage grossier. Sa santé était aussi précaire, à cause de l’emphysème qui l’a tourmenté toute sa vie, que son caractère était fort.
Né en 1896 à Broni, dans la province de Pavie, dans un pays où le socialisme réformateur a donné naissance à certaines de ses réalisations les plus visionnaires, Tout au long de sa vie, Faravelli s’est révélé être l’antipode du puissant homme politique. Il est arrivé au socialisme après l’expérience des tranchées pendant la Grande Guerre, où pour sa conduite il a reçu la médaille de bronze et la croix de guerre pour sa valeur militaire. Il adhère au courant réformateur de Turati, dont il est l’un de ses disciples préférés. Avec l’avènement de la dictature fasciste, Faravelli ne s’enfuit pas à l’étranger, mais choisit de poursuivre la bataille dans la clandestinité. Il reste dans son poste de commissaire administratif de la municipalité de Milan et profite de son poste pour fournir à divers antifascistes les papiers nécessaires à l’expatriation. Ayant découvert ses activités contre le régime, il dut fuir en 1931 en Suisse.
Quand la France s’effondre, sous l’avancée des panzers hitlériens, c’est toujours Faravelli qui tente de recoller les morceaux du PSI en exil, tombé en mille morceaux. Réfugié de manière audacieuse à Toulouse, il écrit aux membres de la dernière direction du parti pour finaliser les nouvelles directives. En 1943, les autorités de la France « libre » le livrèrent à la police fasciste. Joseph risque la peine de mort, mais s’en sort finalement avec 30 ans de prison. A l’approche de la Libération, un bombardement américain lui permet de s’évader de prison et de se réfugier en Suisse.
A la fin de la guerre, il fut le premier à se plaindre de la paralysie du Parti socialiste due au choc entre les âmes démocrates et frontistes. Faravelli a dépensé toute son énergie dans la lutte interne contre les frontistes. Saragat le reconnaît également, lui communiquant depuis l’ambassade d’Italie à Paris : « J’ai franchi le pas : je rentre en Italie. J’ai écrit au président De Gasperi dans ce sens et je pense que d’ici début mars je serai avec toi […]. Ce qui m’a décidé, c’est la démonstration de sérieux, de fermeté et de courage qui anime votre groupe de critique sociale”. Joseph est le plus lucide de son courant dans la lecture de la situation et le premier convaincu de la fatalité de la scission, qui a conduit en janvier 1947 à à la naissance du PSLI.
L’idée d’un Parti socialiste comme « troisième force », qui n’avait à s’incliner ni devant la DC ni devant le PCI, est toujours restée son étoile directrice. Cette vision l’a conduit à la solitude politique, Faravelli fut l’un des rares protagonistes de l’antifascisme qui, avec l’avènement de la République, n’occupa pas de postes prestigieux dans les institutions.. En partie parce qu’il évitait les honneurs et les nominations, mais aussi parce qu’il était un homme politique peu pratique, peu disposé à faire passer les gains personnels ou « claniques » avant les intérêts du pays. Intransigeant avec le fascisme, il l’était tout autant avec le communisme. Après la scission, il était l’un des trois secrétaires provisoires des sociaux-démocrates. Mais, tout comme il avait précédemment attaqué la politique frontiste de Nenni, Faravelli a critiqué, au sein du nouveau parti, la ligne de Saragat, qui, à son avis, était trop centrée sur le ministérialisme et la DC.
Joseph plaçait de nombreux espoirs dans l’unification socialiste, qui prit forme dans la seconde moitié des années 1960, même s’il critiquait la manière dont elle était entreprise. L’échec de cette opération, et la scission qui a suivi avec la renaissance du PSI et du PSDI, ont été une nouvelle déception dans son militantisme. Il ne lui restait plus que la Critique sociale, dont Faravelli était devenu directeur en 1958, après la mort d’Ugo Guido Mondolfo. Il frappe à toutes les portes pour trouver des financements et, dans une lettre au jeune collaborateur Giuseppe Tamburrano en octobre 1973, il exprime : « J’ai le doute que quelqu’un pense que j’essaie de sauver la vie des critiques pour un intérêt matériel et personnel. Mais il est bon que l’on sache que je n’ai jamais pris un sou aux critiques et qu’à la place je leur fais don de la soi-disant « rente au mérite » qui m’est donnée en tant que « victime politique » (environ trente-trois mille lires par mois). En plus, je paie la cotisation des supporters”. Faravelli consacre ses dernières forces au magazine, jusqu’à sa mort le 15 juin 1974.
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