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La COVID longue au Québec : un défi croissant pour les cliniques spécialisées

by Nouvelles
La COVID longue au Québec : un défi croissant pour les cliniques spécialisées

Plus de 5000 patients sont inscrits sur les listes d’attente des 15 cliniques spécialisées en COVID longue au Québec, la «pointe de l’iceberg» selon les experts qui rappellent qu’aucun traitement curatif n’existe encore contre ces complications de la COVID-19.

Pendant ce temps, près de 2000 patients sont suivis pour un diagnostic de COVID longue en début d’année 2024, selon des chiffres fournis par le ministère de la Santé. Des données qui ont aussi connu une forte croissance dans la dernière année (voir encadré).

Cette augmentation s’explique en partie par l’ouverture de sept cliniques en un an dans différentes régions.

«On a ouvert notre clinique et l’on avait déjà une liste d’attente!» lance la cheffe de programme responsable de la clinique de la COVID longue au Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux (CIUSSS) de la Capitale-Nationale, Valérie Brodeur.

En 2024, le délai moyen pour être pris en charge dans l’une ou l’autre des cliniques était d’environ un an.

Or, ce délai peut s’allonger, puisqu’il faut d’abord obtenir un diagnostic de COVID longue de la part de son médecin de famille, un processus toujours «difficile» selon Mmoi Brodeur.

«[Les médecins] doivent s’assurer d’éliminer toutes les autres causes probables des symptômes, explique Mmoi Brodeur. Plusieurs spécialistes peuvent être consultés dans le processus.»

«Il y a encore des professionnels de la santé qui ne croient pas que cette condition-là existe», ajoute pour sa part le Dr Alain Piché, directeur médical de la clinique spécialisée en infections post-COVID au Centre hospitalier universitaire de Sherbrooke (CHUS). «Donc je crois qu’on ne voit que la pointe de l’iceberg.»


Le Dr Alain Piché est directeur médical de la clinique spécialisée en infections post-COVID au Centre hospitalier universitaire de Sherbrooke (CHUS).

Photo Dominick Ménard

Cette clinique, l’une des premières ouvertes au Québec en mai 2020, traite un peu plus de 500 patients en 2024, cinq fois plus qu’en 2023.

Le Dr Piché associe cette popularité de la clinique à «l’agressivité» de leur traitement de la maladie. Il donne en exemple l’administration d’un inhibiteur des opiacés, la naltrexone, à faible dose pour la fatigue chronique.

«Il n’y a pas de traitement curatif pour la COVID longue, rappelle-t-il toutefois. Pour l’instant, du côté clinique, c’est plus une gestion des symptômes.»

Fermetures de dossiers «assez rares»

Dans la région de Québec, cette gestion des symptômes se fait avec l’aide d’ergothérapeutes, de travailleurs sociaux et d’infirmières.

Les symptômes les plus fréquents englobent la fatigue incapacitante, les troubles de la mémoire, l’essoufflement et des maux de tête chroniques. Près de 200 symptômes différents sont recensés pour la COVID longue dans la littérature scientifique.

Dans le cas de la fatigue chronique, ces professionnels tentent de mettre en place une gestion de l’énergie des patients. «De voir comment on peut instaurer des pauses dans la journée», explique Mmoi Brodeur. «C’est la base de tout.»

S’il voit énormément de patients au CHUS, la fermeture de dossier «est assez rare» pour le Dr Piché.

«On assure des suivis même s’il n’y a pas de traitement définitif de la maladie», explique-t-il. «Des traitements vont arriver dans les prochains mois, c’est donc important d’assurer un suivi avec ces patients-là», ajoute-t-il, optimiste.

Évolution des listes d’attente entre 2023 et 2024

  • Personnes sur une liste d’attente en 2023: 710 (pour sept cliniques)
  • Personnes sur une liste d’attente en 2024: 5003* (pour 15 cliniques)
  • Personnes suivies pour la COVID longue en 2023: 578
  • Personnes suivies pour la COVID longue en 2024: 1903

Source: Ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec

*Avec ses presque 3000 personnes sur sa liste d’attente, l’Institut de recherches cliniques de Montréal (IRCM) a près de la moitié des patients en attente pour tout le Québec. Invité à expliquer cette situation, l’IRCM a précisé que, contrairement aux cliniques affiliées aux centres hospitaliers ou aux centres intégrés de santé, il n’est pas nécessaire d’avoir le diagnostic d’un médecin traitant pour s’inscrire sur sa liste d’attente.

Exaspéré par l’attente au Québec, il va au Mexique pour se faire soigner

Devant l’attente qui ne finit plus pour se faire soigner, un homme de la région de Québec souffrant de COVID longue a décidé de débourser 10 000$ pour subir un traitement expérimental avec des cellules souches au Mexique.

«J’ai tellement eu des maux de tête intenses que j’allais à l’urgence parce que j’avais l’impression qu’une veine allait m’éclater dans la tête», raconte Alexandre, un prénom fictif, car étant donné la nature de son emploi, il ne peut pas être identifié dans le cadre de ce reportage.

Il a eu son diagnostic de COVID longue en novembre 2023 après avoir consulté un infectiologue à Québec. Il avait contracté la COVID-19 un an plus tôt et était doublement vacciné.

Sans nouvelles de la clinique du CHUS en Estrie, il «fait ses recherches» et trouve plusieurs cliniques privées au Mexique offrant des injections de cellules souches, notamment pour traiter la COVID longue. Il s’envole donc pour Cancun avec sa conjointe et débourse 10 000$ pour l’injection.

«J’étais prêt à payer le prix et j’étais prêt à essayer d’autres affaires, explique-t-il. Je n’avais plus ma vie, je ne pouvais plus rien faire. Je suis un gars qui m’entraîne, qui va voir mes amis, qui a du fun […] Pis là, je ne pouvais plus rien faire.»

Questionné quant à l’usage de cellules souches avec des patients atteints de la COVID longue, le Dr Alain Piché de la clinique spécialisée au CHUS qualifie de «très mince» la base scientifique sur laquelle s’appuie ce traitement.

«Les conséquences peuvent surpasser les bénéfices», met-il en garde en citant notamment des avertissements de la Food and Drug Administration aux États-Unis. L’injection de corps étrangers n’est pas sans risques, ajoute-t-il.

Dr Piché dit toutefois «comprendre très bien l’attrait» de ces méthodes «à tout le moins discutables».

«Manifestement, [les patients] souffrent de symptômes chroniques et ils deviennent alors vulnérables à ce genre de discours», analyse-t-il.

Depuis son injection au Mexique, il estime maintenant être rétabli «à 95% mentalement».

On l’a toutefois prévenu que le traitement ne pouvait être efficace que pour un an. Alexandre espère maintenant qu’un traitement sera développé d’ici là au Québec.

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2024-04-19 07:00:00

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