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Massacre de Shakahola : Des questions sans réponse un an après

by Nouvelles
Massacre de Shakahola : Des questions sans réponse un an après

Un an après la découverte du «massacre de Shakahola», de nombreuses familles restent tourmentées par des questions sans réponse sur la mort de 429 adeptes d’une secte évangélique dans une forêt du sud-est du Kenya.

En décembre 2022, lorsque Francis Wanje a appris par un ancien membre de l’Église internationale de Bonne Nouvelle les pratiques de jeûne extrême dans la forêt de Shakahola, il a redouté le pire.

Cet instituteur a tenté à plusieurs reprises de se rendre dans cette vaste zone boisée de la côte kényane, où il savait que l’une de ses filles et sa famille – huit personnes au total – s’étaient joints à la secte du pasteur autoproclamé Paul Nthenge Mackenzie.

Bloqué par des membres hostiles, il a alerté la police qui a découvert le 13 avril 15 personnes en état de sous-alimentation, révélant ainsi un scandale qui a choqué ce pays majoritairement chrétien de l’Afrique de l’Est.

Parmi ces 15 personnes se trouvait l’aîné de ses petits-enfants, squelettique et proche de la mort.

Au cours des mois suivants, 429 corps ont été exhumés dans cette forêt où Paul Nthenge Mackenzie exhortait ses fidèles à jeûner jusqu’à la mort pour “rencontrer Jésus” avant la fin du monde prévue en août 2023. Ces décès se sont échelonnés sur plusieurs années.

Les autopsies ont révélé que la majorité des victimes sont décédées de faim, mais certaines ont été étranglées, battues ou étouffées.

Selon Francis Wanje, deux de ses petits-enfants ont été étouffés.

“Cela a été un parcours très difficile. Très difficile”, explique cet homme de 59 ans en évoquant l’année écoulée.

Il a connu un léger soulagement le mois dernier en récupérant les corps de quatre proches, dont sa fille et un petit-fils.

“Abandonnés”

Comme lui, des centaines de familles se sont rendues à la ville de Malindi pour savoir si leurs proches, dont elles ont perdu la trace ou dont elles savaient qu’ils étaient membres de la secte, figuraient parmi les victimes.

Elles attendent, désespérées, l’identification des corps.

Jusqu’à présent, seuls 34 des 429 corps ont été identifiés par le biais de tests ADN, faute de matériel.

“Nous sommes toujours dans le flou”, se lamente Mapenzi Kombe, 31 ans, dont la sœur a disparu après avoir rejoint la secte. “Notre mère pleure tous les jours et ses larmes ne tarissent pas”, dit-il, en montrant une femme âgée assise un peu plus loin, le regard vide.

“Nous sommes dévastés par la lenteur du processus d’identification”, confie Roseline Asena, pour qui la situation est “honteuse”.

Son frère et sa belle-sœur sont en détention pour avoir aidé Mackenzie à affamer des adeptes, dont leurs cinq enfants, le plus jeune ayant tout juste un an.

Le couple “a refusé de dire où se trouvent les enfants” et, les recherches étant suspendues depuis plusieurs mois, elle perd chaque jour un peu plus espoir de “les retrouver vivants”.

Elle affirme également n’avoir eu aucun contact avec des autorités depuis mai 2023, date à laquelle on lui avait promis que le processus d’identification ne prendrait pas plus de deux mois.

“Pas de visite, pas de soutien psychologique. Le gouvernement nous a complètement abandonnés à notre sort”, déplore-t-elle.

La présidente de la Commission nationale des droits de l’homme du Kenya (KNCHR) – un organe officiel mais indépendant – demande également un soutien aux familles, ainsi qu’aux policiers confrontés à l’horreur.

“Les gens ont besoin de faire leur deuil de cette affaire”, souligne Roseline Odede.

“Accusations infondées”

Alors que le pasteur Mackenzie est en détention en attendant son procès, notamment pour “terrorisme”, “assassinat” de 191 enfants (dont trois nourrissons), ainsi que pour “torture” et “cruauté” envers des enfants, Francis Wanje peine à trouver la paix.

“Ces meurtres absurdes auraient pu être évités si tout le monde avait agi immédiatement”, déclare-t-il.

Un rapport d’une commission sénatoriale a souligné les “dysfonctionnements” des services de police et de la justice locaux qui n’ont pas empêché les agissements du pasteur, pourtant arrêté à plusieurs reprises pour ses prêches extrêmes.

La KNHCR a également affirmé dans un rapport en mars que la police avait ignoré plusieurs avertissements concernant la secte, notamment ceux d’une ancienne adepte qui avait lancé des appels à l’aide sur Facebook en novembre 2022.

“Au lieu d’enquêter sur la véracité des problèmes soulevés, la dame a été intimidée après avoir été accusée de formuler des accusations infondées”, déplore la KNCHR, soulignant que la police avait en revanche pris au sérieux une plainte du pasteur Mackenzie concernant ces messages qu’il prétendait mensongers.

Les seules mesures prises depuis la révélation du scandale ont été la mutation de responsables des services de sécurité.

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