2024-06-04 10:36:26
Les Engagés sont-ils une fake news ? Alors que les sondages donnent beaucoup d’espoir aux troupes de Maxime Prévot, la question se pose : la promesse de renouveau des Engagés est-elle un pur phénomène marketing ou reflète-t-elle un changement en profondeur ?
Twix et Raider
D’abord, il faut bien constater une réussite marketing, celle d’avoir fait oublier la marque cdH. C’est comme Twix. Qui se souvient de Raider ?
Ce n’était rien d’évident, la famille sociale-chrétienne, et son aile francophone PSC, puis cdH, reste très largement associée au pouvoir depuis 40 ans. En Wallonie, depuis 1981, les Engagés n’ont été absents du pouvoir que durant deux législatures, l’actuelle et celle de 1999-2004. C’est peu dire qu’ils ont largement participé à la mise en place de la société dans laquelle on vit aujourd’hui.
Mais la période d’opposition de cinq ans a permis au parti ce que les spécialistes appellent un rebranding. Un rebranding visiblement réussi, puisqu’après une période de scepticisme généralisé, la marque Les Engagés est largement utilisée aujourd’hui, en particulier dans les médias. On ne dit plus, ou très peu, Les Engagés (ex-cdH). Et cette marque parvient à apparaître plutôt comme une nouvelle offre.
Évolutions
Réussite marketing, c’est indéniable, mais est-ce que ce n’est que du marketing ? Parce que le Twix, c’était la même chose que le Raider. Je nuancerais cela. D’abord, le renouvellement des têtes de listes. À Liège, dans le Brabant Wallon, à Bruxelles, dans le Hainaut, on trouve des nouvelles têtes, et beaucoup de ces nouvelles têtes viennent de l’extérieur du parti, comme Olivier De Wasseige, Jean-Luc Crucke, Vincent Blondel… Bien sûr, on retrouve sur les listes une très grande majorité d’anciens du cdH, mais les têtes de liste ça compte, et ici il faut bien constater un réel effort de renouvellement au plus haut niveau.
Autre élément à apporter au crédit du renouveau, un repositionnement vers le centre droit. Le mouvement a été mesuré par une récente étude de cinq universités sur la base de 250 questions du test électoral posé aux partis. Mais sans aller dans une analyse aussi fouillée, on voit que dans cette campagne, Les Engagés insistent beaucoup sur les mesures les plus marquées centre droit, comme la limitation des allocations de chômage dans le temps ou la suppression des droits de succession. Maxime Prévot, dans une interview au Soir, disait il y a quelques semaines que dans ce pays, on payait de l’impôt à en vomir, c’est plutôt un propos de droite.
J’ajouterais un élément très marquant, la fin des consignes de vote du parti sur les sujets éthiques. Même si les députés actuels sont plutôt conservateurs, comme on l’a vu dans des votes comme l’EVRAS, cela pourrait changer à l’avenir.
Autre évolution, l’attitude de compatibilité avec la N-VA. En 2014 et 2019, le cdH était résolument hostile à toute discussion avec la N-VA, la considérant comme un parti raciste.
Révolution ?
Des éléments qui marquent donc une évolution, mais peut-être pas la révolution dont parlent Les Engagés. Là où le Twix est resté Raider, c’est que le mouvement Les Engagés est toujours bien un parti. Un parti avec un président qui a beaucoup de pouvoir, un parti très centralisé, même si ses structures ont changé. Même si dans son renouvellement il y a eu une dose de citoyenneté, elle est restée très encadrée. De plus, une majorité d’anciens cadres du parti est toujours à la manœuvre et leurs propositions pour changer le fonctionnement de la démocratie restent très modestes et hypothétiques.
Reste que dans les sondages, la marque Les Engagés semble prendre, surtout en Wallonie. Ce sera très certainement un des grands enseignements du scrutin : y a-t-il un avenir pour ce parti que tout le monde disait, et moi en premier, en crise existentielle ?
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