2024-06-06 15:36:16
Christine Lagarde a un jour qualifié la lutte contre l’inflation d’« art ». La présidente de la Banque centrale européenne et ses collègues du Conseil découvriront dans les prochains mois s’ils ont commis une erreur en décidant d’amorcer une baisse des taux d’intérêt. Jeudi, la banque centrale a abaissé ses taux directeurs pour la première fois depuis 2019, de 0,25 point de pourcentage. Le principal taux de refinancement auquel les banques peuvent obtenir de l’argent frais auprès de la banque centrale est désormais de 4,25 pour cent. Le taux de dépôt est de 3,75 pour cent. Il est considéré comme l’instrument de contrôle le plus important de la banque centrale car il rapporte des intérêts sur les réserves excédentaires des banques.
Cette décision n’est pas une surprise : la BCE prépare le public à cette décision depuis des mois. L’équipe de Lagarde suit les banques centrales du Canada, de Suisse et de Suède, qui ont déjà abaissé leurs taux d’intérêt. La Réserve fédérale américaine et la Banque d’Angleterre attendent cependant toujours.
Une baisse des taux d’intérêt directeurs est souvent considérée comme le signe que l’inflation a été vaincue. Mais elle ne l’est pas. En mai, l’inflation dans la zone euro a de nouveau augmenté après une longue période, à 2,6 pour cent. Au cours des deux mois précédents, la valeur était de 2,4 pour cent. Il s’agit bien entendu d’un progrès par rapport au taux d’inflation de plus de dix pour cent à l’automne 2022. Mais la BCE vise une inflation d’exactement deux pour cent pour la communauté des 20 pays, et il pourrait être difficile d’atteindre cet objectif rapidement.
À 6,4 pour cent, le taux de chômage dans la zone euro est plus bas que jamais
Les raisons de la hausse des prix sont multiples : dans le secteur des services, par exemple, douloureusement perceptible pour les visiteurs des restaurants, l’inflation persiste obstinément. La croissance décente des salaires en Allemagne et dans d’autres pays de l’union monétaire a également été étonnamment forte au premier trimestre, dont les entreprises répercutent souvent les coûts supplémentaires directement sur les prix des produits. Les syndicats utilisent leur forte position de négociation parce que le taux de chômage dans la zone euro est à 6,4 pour cent, le plus bas jamais atteint.
On ne sait donc toujours pas si Lagarde suivra bientôt la première baisse des taux d’intérêt par la deuxième et la troisième. Joachim Nagel, membre du Conseil de la BCE et président de la Bundesbank, souligne qu’on ne peut pas déduire d’une première baisse des taux d’intérêt une « sorte de pilote automatique » dans lequel la prochaine baisse des taux d’intérêt devrait suivre immédiatement. Rien ne doit être précipité. L’économiste en chef de la BCE, Philip Lane, a déclaré dans une interview au « Financial Times » qu’en dépit d’un assouplissement prévisible, la politique monétaire de la BCE doit rester « restrictive tout au long de l’année ». Pour les gouvernements et les ménages, cela signifie que les taux d’intérêt directeurs pourraient baisser un peu plus – mais les faibles taux d’intérêt des années 2010 ne sont pas en vue.
“Rétrospectivement, la baisse des taux d’intérêt cette semaine s’avérera probablement être une erreur.”
En juillet 2022, la BCE a mis fin à sa politique de taux d’intérêt nuls et négatifs de longue date afin de maîtriser l’inflation, initialement sous-estimée, qui a finalement atteint des niveaux records. La banque centrale a relevé ses taux d’intérêt dix fois de suite avant de faire une pause à partir de septembre 2023. Jusqu’à jeudi, le principal taux de refinancement était de 4,5 pour cent, soit le plus haut niveau atteint en août 2001. Durant cette phase de hausse des taux d’intérêt, le taux de dépôt a atteint 4 pour cent, le niveau le plus élevé depuis la création de l’union monétaire en 1999.
“Rétrospectivement, la baisse des taux d’intérêt de cette semaine s’avérera probablement être une erreur”, estime Jörg Krämer, économiste en chef de la Commerzbank. Les prix à la consommation – sans la volatilité des prix de l’énergie et de l’alimentation – auraient à nouveau fortement augmenté depuis le début de l’année. En outre, selon Krämer, il n’y a toujours aucun signe d’une tendance à la baisse des augmentations collectives des salaires.
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