Le 7 juillet 2020, vers 5h00, dans leur appartement de Drancy, “tout le monde dormait“, retrace la tante maternelle des enfants, à l’époque âgée de 20 ans. “J’entends un bruit de perceuse. C’était bizarre, je me lève, je vais en courant à la porte. En regardant à l’œilleton, je vois deux hommes défoncer la porte. Je savais que c’était lui« .
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Lui, c’est Fouad S., l’ex-conjoint de sa sœur. Il n’en est pas à son coup d’essai. En 2017, il a déjà emmené trois de ses quatre enfants en Algérie. Depuis, l’aîné n’a plus été revu par sa famille maternelle.
De peur que le père revienne, la famille veille.
Un kidnapping préparé comme une opération commando
“Au premier coup de bélier, la porte s’ouvre“, poursuit la jeune femme. “Je me fais asperger de gaz lacrymo, je me prends un coup à la mâchoire“. Avec son complice, Fouad S. enlève sa fille de 7 ans et l’un de ses fils de 5 ans, terrifiés.
Le kidnapping a été préparé comme une opération commando. La cavale, moins. Les enfants sont transportés dans des sacs. “On cherchait la sortie pour ouvrir un peu le sac parce qu’on avait du mal à respirer”, a raconté la fillette pendant l’enquête. “On tremblait parce qu’on avait peur« .
L’accusé jugé aux côtés de 6 autres personnes
Ce père, qu’ils appellent par son prénom, les effraie. Lors de l’enquête, ils ont décrit ses violences et ses humiliations. Les enfants sont retrouvés dans un hôtel de Seine-et-Marne trois jours après leur enlèvement, le père y est interpellé. Âgé de 35 ans, il est jugé jusqu’au 24 novembre aux côtés de six personnes, impliquées à divers degrés.
Jeudi, l’ex-conjointe de Fouad S. a brossé un portrait noir de l’accusé. Cheveux bruns noués, maquillage léger et longue robe noire, elle a raconté pendant près de deux heures son calvaire et celui de ses enfants pendant ses années de vie commune avec Fouad S. Par visioconférence, la jeune femme a raconté en détail les violences physiques et les allers-retours en Algérie où elle était traitée “comme une boniche” et une “poule pondeuse“. Tout au long du témoignage, son ex-conjoint garde la tête baissée, le visage rougi.
Plusieurs plaintes déposées par la mère contre l’accusé
À 16 ans, elle épouse religieusement son voisin, “gentil, serviable“, malgré l’opposition de sa mère. Elle se met à porter le niqab. Arrivent vite les quatre enfants. De retour en France, elle dépose plusieurs plaintes, puis les retire sous l’emprise de son conjoint. D’après son récit, Fouad S. était engoncé dans la radicalisation religieuse et ne souhaitait pas que ses enfants soient éduqués en France.
Après le premier enlèvement (pour lequel Fouad S. a été condamné à trois ans de prison en 2023) et une seconde tentative, la pression devient insoutenable. En octobre 2018, elle sort du domicile chercher le petit-déjeuner. Elle n’y reviendra jamais.
Depuis, elle change régulièrement de domicile, hantée par l’idée qu’il la tue à sa sortie de prison, ou envoie quelqu’un pour le faire. Les liens directs avec ses enfants ont été rompus. Elle prend des nouvelles par message via sa mère, elle fait des captures d’écran des photos que celle-ci diffuse sur WhatsApp.
“Qu’ils revivent une nouvelle vie“
“Je veux leur bien et pour l’instant, c’est d’être avec ma mère“, qui a une délégation d’autorité parentale depuis cinq ans, déclare-t-elle. Malgré la culpabilité, elle ne se sent pas encore prête à revenir. Lorsque la caméra du tribunal se fixe sur son avocate, et qu’elle voit en arrière-plan sa mère, en sanglots, elle s’effondre à son tour.
Au conseil de ses enfants, elle formule une demande : “Dites-leur que je les aime beaucoup, que je ferai tout pour eux, qu’ils revivent une nouvelle vie, qu’ils soignent leurs blessures et oublient ce cauchemar« .
2023-11-20 11:00:00
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