Les occasions manquées de la BCE | Économie

2024-10-19 06:54:00

La Banque centrale européenne (BCE) a raté deux grandes occasions d’assouplir à temps sa politique monétaire restrictive et d’éviter la stagnation de la zone euro. Il devient ainsi co-responsable de son retard de croissance et du fait que l’atterrissage sur les types digestibles ne se fait pas aussi facilement qu’il le prêche.

Sa présidente, Christine Lagarde, a avoué jeudi qu’elle n’était pas « sûre qu’on l’avait anticipé » : elle faisait référence à la baisse de l’inflation à 1,7 % en septembre, en dessous des 2 % recherchés. Ne pas l’avoir anticipé, c’est parce qu’il a mal interprété ses propres chiffres, en proie aux préjugés du « faucons».

Le premier graphique en dit long. La principale composante fondamentale de l’inflation générale était l’énergie. La boucle pyramidale de sa ligne grise révèle un chemin ascendant abrupt et une chute verticale ultérieure. Cela n’a pas duré longtemps : en janvier 2021, il a dépassé zéro après une longue année en dessous ; Il a augmenté à l’automne en raison des tensions russes et a culminé à 44,3 % en mars 2022, après l’invasion de l’Ukraine. Elle a connu un plateau jusqu’en octobre (au cours duquel les Européens ont contré le chantage russe sur le gaz et le pétrole) jusqu’à s’effondrer au premier semestre 2023. En septembre elle a plafonné, au moins 4,6% : c’était l’occasion de reformuler la stratégie monétaire. C’était perdu. A cette époque, la BCE alertait sur l’inflation sous-jacente, les attentes, les salaires… sans se concentrer sur l’essentiel : l’énergie.

L’inflation générale (ligne bleue) a suivi une tendance similaire, moins abrupte. Son pire pic a eu lieu en octobre 2022 : 10,6 %. Depuis, il a chuté presque sans répit jusqu’à aujourd’hui. Un moment clé a été sa réduction de moitié de janvier 2023 (8,6%) à septembre 2023 (4,3%) : quatre points en huit mois, à raison d’un demi-point par mois. Ce même mois de septembre, doublement opportun pour baisser les taux, Francfort a décidé de les relever pour la dernière fois.

Face aux avertissements énergiques (et discrets) de ses colombes internes, la croissance économique a souffert. La Commission l’a abaissé ce mois-là à un taux anémique de 0,8% pour 2023 et les propres économistes de la BCE à 0,7%, soit un cinquième de 2022. Et des économistes externes. Comme Joseph Stiglitz, qui, contre le critère dominant, continue de soutenir que l’inflation est temporaire : longue, mais transitoire, jusqu’à la fin de la crise de l’approvisionnement énergétique et des puces et du fret (Les prix baissent, malgré les banques centralesBusiness, 03/12/2023), ou Manuel Alejandro (Chronologie de la bataille gagnée par l’équipe qui défend l’inflation temporaireCinco Días, 11/12/2023).

Aucun cas. Francfort maintiendrait des taux élevés pendant encore (presque) neuf mois, après les avoir resserrés sans cesse pendant quinze mois (voir deuxième graphique). Jusqu’en juin dernier, date à laquelle était programmée la première descente minimaliste. Même en admettant que les augmentations auraient été justifiées (bien que moins dans leur rythme et leur intensité), ces neuf mois de dureté ont aggravé la situation, une deuxième occasion manquée. L’Allemagne connaît une nouvelle récession. La zone euro, l’asthénie. La peur de la déflation se propage. Et la BCE se plaint des « récentes surprises à la baisse des indicateurs d’activité ». Des surprises ? Qu’ils soient surpris !



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