2024-11-01 13:08:00
Avec un réalisme drastique, la réalisatrice Sophie Springer met en scène “Stallerhof”, l’opéra du compositeur carinthien Gerd Kühr, créé en 1988, au Théâtre municipal de Klagenfurt. Lors de la première jeudi, l’Orchestre Symphonique de Carinthie sous la direction de Mitsugu Hoshino a été célébré par des ovations debout, tout comme le grand ensemble d’acteurs, en particulier Katharina Ruckgaber dans le rôle de Beppi, la fille d’un agriculteur handicapé.
Cette pièce de théâtre musical intemporelle et actuelle sur les abus et les expériences de violence est basée sur le drame socialement critique du même nom de Franz Xaver Kroetz de 1972 : Staller et Stallerin, un couple d’agriculteurs quelque part en Bavière, vivent côte à côte sans voix et ennuyeux. Jusqu’à ce que sa fille mineure handicapée, Beppi, soit violée et enceinte par Sepp, un fermier beaucoup plus âgé.
Kühr, qui était également présent à la première à Klagenfurt, a mis en musique toutes les ambiances entre la peur et la naïveté de Beppi, la méchanceté de la mère et la brutalité de Sepp, en utilisant des instruments assignés à des leitmotivs. Le vaste groupe de percussions structure de manière expressive l’ensemble de l’opéra. Kühr oppose des phases atonales à des références à la musique folklorique et religieuse ou à des chansons et comptines pour enfants ; un choral de Bach évoque également le catholicisme déterminant.
Des structures villageoises archaïques, une communauté qui voit beaucoup mais qui se tait et une famille sans amour forment le fond d’un drame lyrique qui vous met sous la peau. Un trio de femmes rappelle les chœurs des tragédies grecques et incarne la société pétrifiée avec des citations bibliques anciennes (Dix Commandements). Les solistes (Nadia Petrova, Sun Mi Kim, Satoko Narumi) ont souvent leur mot à dire bien au-dessus de l’action : le décor dans lequel les trois jouent, éclairé par derrière, rappelle le mur d’une grange. Ci-dessous, dans la scénographie réussie de Thomas Stingl, l’action se déroule sur deux niveaux supplémentaires : sous la cuisine des Staller se trouve la cabane dans laquelle vit Beppi et évoque des associations avec des affaires pénales locales de Fritzl à Kampusch.
L’interaction étroite entre la mise en scène sensible de Sophie Springer et l’orchestre est démontrée, par exemple, lorsque Staller (en nuancé : Stephen Chaundy) cloue la chambre de Beppi avec le marteau. Le chant est en dialecte, ce qui fait aussi de l’opéra une étude du milieu. Katharina Ruckgaber se révèle être une formidable actrice-chanteuse dans le rôle de Beppi : sa brillante soprano souligne ses gestes le plus souvent nerveux, maladroits, puis hésitants et tendres. La façon dont elle reflète son petit monde avec une petite poupée de chiffon grandeur nature, ferme les yeux derrière ses lunettes ou frappe hystériquement ses poings sur ses tempes est du grand cinéma. Matthias Störmer dans le rôle de Sepp ne lui est en rien inférieur en termes d’expressivité entre frustration et violence. Sarah Alexandra Hudarew, en tant que femme d’écurie, complète la magnifique performance d’ensemble, qui a été célébrée par le premier public pendant plusieurs minutes.
(Par Karin Waldner-Petutschnig/APA)
(SERVICE – “Stallerhof”, opéra en trois actes de Gerd Kühr. Livret de Franz Xaver Kroetz d’après sa pièce du même nom. Avec : Mitsugu Hoshino (direction musicale), Sophie Springer (mise en scène), Thomas Stingl (scène), Bettina Breitenecker (costumes), Walter König (lumière), Markus Hänsel (dramaturgie), Stephen Chaundy (Staller), Sarah Alexandra Hudarew (Stallerin), Katharina Ruckgaber (Beppi), Matthias Störmer (Sepp), Nadia Petrova, Sun Mi Kim, Satoko Narumi (ensemble de femmes) ; Orchestre symphonique de Carinthie : 8, 14, 19, 22, 27, 30 novembre, 4, 6 décembre 2024 ; www.stadttheater-klagenfurt.at)
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