La Joconde Bellini revient au théâtre après presque vingt ans pour que l’on se plonge immédiatement dans le climat musical de la seconde moitié du XIXe siècle entre influences françaises, regard sur le réalisme qui marquera bientôt la scène lyrique, et l’inspiration mélodique qui caractérise Écrit de Ponchielli.
Le public de Catane ne semble cependant pas convaincu par une telle proposition, car pour le spectacle auquel il fait référence, la salle dispose de plusieurs sièges vides, à la fois en raison de la durée du spectacle et du manque de familiarité avec un titre qui n’a pas été très apprécié. populaire dans l’histoire récente du Catanais Massimo.
Pourtant la mise en scène parfaitement lisible qui reprend les scènes déjà utilisées dans la dernière édition représentée ici en 2006, organisée par Francesco Espositoégalement responsable des costumes et de la mise en scène, correspond au goût traditionaliste du spectateur moyen de l’Etna.
Certainement la prochaine saison qui s’ouvrira avec Norma au lieu de cela, il verra une ruée vers le ticket, comme cela s’est déjà produit avec Rigoletto l’automne dernier, démontrant combien il est difficile d’orienter les préférences du public malgré la gouvernance sensible et astucieuse du surintendant Giovanni Cultrera di Montesano.
Pour revenir à Mona Lisa le spectacle vit avant tout de la concertation de Fabrizio Maria Carminati qui parvient toujours à tirer le meilleur parti de l’orchestre de Catane. L’accompagnement du chant est précis et équilibré de manière à faire ressortir les voix sans jamais les submerger. Entre autres choses, dans la succession conventionnelle d’airs, de duos et de scènes d’ensemble, le passage théâtral choisi par le maestro bergamasque maintient haute la tension narrative, malheureusement irrémédiablement compromise par les deux longs intervalles, compensant le caractère statique de l’action scénique. Les détails de la veine compositionnelle raffinée se détachent ainsi de la Danse des heures (en fait visuellement fermée dans l’imaginaire collectif de Disney’s Fantasia) et de la musique de scène, avec les instruments clairement évidents.
Le duel vocal à distance entre l’héroïne du titre et le perfide Barnaba est cependant un point d’appui important dans lequel la combinaison entre les vers de Boito, adoucis par les traits nettement politiques du texte original de Hugo, et la veine mélodique de Ponchielli semble ici venir retour à la vie Mieux. Sans doute grâce aux deux interprètes, Anna Pirozzi dans le rôle éponyme e Franco Vassallo espion déguisé, qui dessinent respectivement un chanteur sincère et un amant sournois et rejeté, capable de méfaits infinis.
On admire l’assurance de la soprano dans toute sa tessiture et sa fibre vocale luxuriante qui, unique dans la compagnie de chant, lui permet de transpercer l’orchestre tout en conservant une variété d’accents et de phrasés irréguliers. La vocalité peut compter sur une colonne de souffle ininterrompue qui la soutient aussi bien dans l’éclat du registre aigu que dans la descente facile vers le registre grave. D’un fort tempérament, sa Joconde oscille entre des accès de jalousie et la générosité d’une femme perpétuellement en équilibre entre des sentiments contradictoires qui s’affichent pleinement tout au long de l’arc dramaturgique jusqu’au « Suicide » sincère de l’acte final.
Pour contrecarrer ces mouvements changeants de l’âme, bien que dans un événement improbable, le perfide Barnaba de Franco Vassallo réalise “O monument” la proclamation paradigmatique du pur méchant, bien que loin du sommet inaccessible du Iago de Verdi. Du baryton on apprécie la douceur de l’émission et la richesse des harmoniques ainsi qu’un bon goût indéniable qui lui évite de tomber dans le truculent. C’est un méchant à tous points de vue, mais son phrasé mélodieux cache l’arrogance d’un homme sans scrupules. En duo avec Enzo di Ivan Momirov l’homogénéité de sa ligne vocale souligne malheureusement la difficulté du ténor bulgare dans le passage. Ce dernier confie malheureusement la caractérisation du personnage à un chant musclé et sans charme. “Ciel et mer” il s’écoule tranquillement comme le reste de la répétition alourdi par une émission discontinue et une intonation oscillante.
Une plus grande expressivité aurait également bénéficié Anastasia Boldyreva dont Laura est vocalement irréprochable mais manque de l’introspection nécessaire pour dessiner clairement la figure d’une femme contrainte à un mariage malheureux, à la merci d’une société chauvine. En présence d’Anna Pirozzi, le redoutable duo entre les deux marque l’écrasante supériorité de ce dernier, tandis que dans “Laggiù tra le nebbie remote” la beauté de la ligne vocale, bien que surclassant l’interprétation de Momirov, exigerait une intensité plus passionnée.
Cependant, l’intensité et l’arrogance ne manquent pas. Georges Andguladze qui a l’occasion de les exhiber dans sa scène solo malgré que le registre grave ne le supporte pas correctement.
Au contraire, la première octave est vraiment somptueuse Agostina Smimmero qui utilise au mieux sa vocalité riche et authentiquement contraltile pour définir une Cieca qui rivalise avec Pirozzi elle-même en termes de richesse d’accents et de timbre captivant.
Enfin, le chœur dirigé comme à son habitude par. contribue au succès global acceptable du spectacle Luigi Petrozziello tandis que les chorégraphies de Domenico Iannone à la tête de l’ensemble Altra Danza qui pallie le manque de troupe de danse stable.
La revue fait référence à la performance du 18 décembre 2024.
Catherine De Simone
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