La loi du 10 juillet 1964 a imposé un nouveau découpage administratif de la région parisienne. Les départements de la Seine et de la Seine-et-Oise disparaissaient, laissant place à six nouveaux départements autour de Paris, dont la Seine-Saint-Denis. Cinquante ans après, qu’est devenu ce territoire ? Toute la semaine, nous vous faisons découvrir, en six épisodes, la petite et la grande histoire de ce département contrasté. Aujourd’hui, retour sur la création quasiment ex nihilo de la préfecture à Bobigny.
Une fois le département créé par la loi, il restait à lui trouver un siège. Un arrêté du 23 décembre 1964 confie à Henri Bouret, premier préfet de Seine-Saint-Denis, le soin d’édifier la nouvelle cité administrative. Dans le 93, le choix de la préfecture fut loin d’être évident. Le décret fixant à Bobigny le chef-lieu départemental ne date que du 25 février 1965. Entre-temps, des mois de tractations, que Georges Valbon, l’emblématique maire (PC) de Bobigny de 1965 à 1996 et président du conseil général de 1967 à 1982 et de 1985 à 1993, a résumé aux Archives départementales. « A l’origine, on a pensé à Saint-Denis, c’était logique, Saint-Denis la ville la plus ancienne, l’histoire était derrière elle, expliquait Georges Valbon. Seulement, le problème à Saint-Denis, c’est que dans le centre, il n’y avait pas d’emplacements, de grandes surfaces. La seule solution, c’était le parc de la Légion d’honneur ». Impossible. En outre, « le maire (PC) Auguste Gillot était contre » selon Emmanuel Bellanger, historien chercheur au CNRS.
Les maires de Stains et de Villemomble furent aussi démarchés. « Cela ne convenait pas. Finalement, Paul Delouvrier proposa Bondy. Mais le maire (socialiste) Maurice Coutrot était de ceux qui étaient contre cette décentralisation, il avait catégoriquement refusé l’installation de la préfecture sur sa commune », racontait Georges Valbon, avant son décès, en 2009.
Henri Bouret demande alors au maire de Bobigny son avis sur sa commune. Après avoir consulté Jacques Duclos (alors député du 93 et patron du PC) et obtenu que l’aménagement de la ville soit confiée à la municipalité, Georges Valbon accepte d’accueillir la préfecture.
« Valbon a mesuré tout l’intérêt de défendre sa ville. Accueillir la préfecture fut un formidable levier de développement urbain. Bobigny a rejoint l’histoire des grands ensembles urbains de l’époque », analyse Emmanuel Bellanger.
Avant 1964, Bobigny n’était qu’une petite commune rurale. Les réserves foncières de la ville ont permis l’édification progressive de la cité administrative, par le biais d’une société d’économie mixte gérée par la municipalité, la SEMABRO. L’hôtel préfectoral est construit entre août 1968 et juillet 1971, par l’architecte Michel Folliasson, choisi par le ministère de la Culture. Le nouveau centre-ville de Bobigny voit cette pyramide dissymétrique remplacer les préfabriqués qui ont accueilli les services préfectoraux pendant six ans. Deux autres bâtiments imposants suivront, pour compléter la cité : celui de la trésorerie générale et de celui de la DDE (direction départementale de l’Equipement) et de la Ddass (direction départementale des affaires sanitaires et sociales). Entre 1981 et 1983, les Archives Départementales seront construites à quelques centaines de mètres.
Lors de l’inauguration de 1971, Georges Valbon présente au Président de la République Georges Pompidou une maquette des projets de transformation urbaine de Bobigny. La ville verra son visage bouleversé par cette nouvelle destinée préfectorale. « Ici, les champs, je les ai connus, sourit Marie-Chantal Chevalier, habitante de Villemomble de 62 ans, dont 39 passés à travailler à la préfecture. Quand je passais ici enfant, il y avait les maraîchers à la place de la préfecture. Les infrastructures ont beaucoup évolué. Le plus gros changement, ça a été l’arrivée du métro dans les années 1980 ».
2014-07-08 10:00:00
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