Annulation du Scot de l’agglomération de Thionville : quid des constructions de demain ?

Le Schéma de cohérence territoriale (Scot) est le document de référence en matière d’urbanisme à l’échelle des communes d’un territoire. Or, en Moselle nord, celui-ci s’est vu retoqué par le tribunal administratif de Strasbourg. Une décision qui pose pas mal de questions sur l’avenir…

Quand on parle du Scot, le sujet ne semble pas intéressé grand monde. Il y a une bonne raison à cela. Derrière le sigle, Schéma de cohérence territorial, les habitants n’identifient pas vraiment ses missions. Seuls les initiés (des élus principalement) captent toute son importance. « Il correspond à une mise en perspective des projets des territoires sur un horizon de quinze ans. Il prend en compte les différents enjeux (économiques, environnementaux, mobilité, etc.) et permet d’élaborer la planification sur l’ensemble d’un territoire. C’est similaire à un Plan local d’urbanisme mais à une échelle supérieure », détaille Thierry Carré, le directeur du Scot. Dans les grandes lignes, il s’agit donc d’un document urbanistique d’appui qui définit les lieux constructibles et les espaces à préserver.

Tout son intérêt se révèle d’autant plus, quand il n’y a plus de Scot. C’est tout le problème qui se pose actuellement sur l’agglomération thionvilloise, qui comprend les établissements publics de coopération intercommunale de Portes de France – Thionville, du Val de Fensch, de Cattenom et environs, du Bouzonvillois-Trois Frontières, de l’Arc Mosellan et du Pays Haut Val d’Alzette.

Territoire non-couvert

Élaboré depuis 2020 par le Scotat, le Scot s’est vu annuler le 12 janvier 2023 par le tribunal administratif de Strasbourg. Celui-ci avait été saisi par une association « familiale » bien connue sur le secteur de Thionville et Yutz pour sa capacité à enchaîner les recours et à bloquer différents projets urbanistiques. La construction de la future clinique Ambroise Paré prévue sur la ZAC de Meilbourg, entre autres. Sur le Scot, les membres de cette association ont pointé du doigt plusieurs incohérences : ils estiment que les données de l’Insee utilisées sont trop anciennes, trouvent les hypothèses du développement démographique du territoire trop optimistes et ajoutent que les chiffres sur la vacance de logement ne sont pas assez précis.

« Nous avons fait appel auprès du tribunal administratif de Nancy au mois de mars », déclare Roger Schreiber, le président du Scot, arguant que le Scotat dispose d’une série de données collectives pour corroborer ses perspectives, dont les travaux de l’Agence d’urbanisme et de développement durable Lorraine Nord et le Plan local d’Habitat du périmètre de Portes de France – Thionville.

Reste qu’en attendant, le territoire ne dispose plus de document référent. Pour comprendre, il faut remonter le temps. En 2014, le premier Scot est validé. Une révision est ensuite introduite entre 2017 et 2020 du fait de l’agrandissement du périmètre avec le rattachement du Bouzonvillois-Trois Frontières. Approuvée en février 2020, c’est celle-ci qui vient d’être annulée. Alors pourquoi ne pas se référer à la version de 2014 dans ce contexte ? « Après six ans, nous aurions dû réaliser une évaluation du Scot de 2014 mais nous avons considéré que nous l’avions faite à travers la révision entreprise entre 2017 et 2020 puisqu’elle prenait en considération tous les changements des territoires. L’État et les ministères de l’Intérieur et des Collectivités locales ont déterminé qu’il n’y avait pas d’évaluation formelle et nous considèrent par conséquent comme un territoire non-couvert par un Scot. »

Une situation qui alerte les élus locaux, à l’image de Michel Paquet, président de la communauté de communes de Cattenom et Environs qui lors de son déjeuner presse de rentrée, début octobre confiait : « La chute du Scot, c’est une catastrophe ! Ça va bloquer le développement du territoire et du nord mosellan en particulier. » Au vu du contexte, les maires doivent actuellement faire une demande de dérogation à la préfecture pour leur projet et Michel Paquet ne cachait pas son inquiétude quant au fait que tous les territoires ne soient pas traités de manière équitable. À noter aussi que tous les projets conduisant à la consommation d’espace agricole ou forestier doivent désormais être validés par la commission départementale pour la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers, composée de membres de la chambre d’agriculture, d’associations représentatives et d’agriculture.

Repartir de zéro

Dès lors, il faut réenclencher une collaboration. Et cela même si le recours porté par le Scotat aboutit. En effet, entretemps c’est glissé une autre subtilité : la loi Climat et Résilience promulguée en juillet 2021 de laquelle découle la fameuse loi ZAN (Zéro artificialisation nette) avec un objectif de réduire les espaces artificiels de 50 % en 2030 pour atteindre un 0 % en 2050. Tout cela, il va falloir l’intégrer au nouveau Scot.

Le travail a repris depuis juillet avec la désignation du bureau d’études. Il s’agira de Proscot, le même qui a élaboré la version de 2020. Dès début novembre, le bureau d’études ira à la rencontre des mairies et des intercommunalités pour comprendre individuellement les objectifs et les orientations de chacun. « Notre souci est d’essayer de travailler de manière optimisée pour élaborer ce nouveau Scot, sans confondre vitesse et précipitation », détaille Thierry Carré. À savoir que la réalisation d’un document comme celui-ci requiert entre 18 et 26 mois. Quant à l’intégration du zéro artificialisation à la feuille de route… Le Scotat voit d’abord l’objectif de 2030 avant d’envisager celui de 2050. « On va travailler sur une limitation et une vision qui soit la plus économe à ce niveau-là », confirment Roger Schreiber et Thierry Carré.

Le Scot, ça fonctionne comment ?

Vous l’aurez compris, au même titre que le Sraddet à l’échelle régionale, le Scot est le document de référence qui établit le projet d’un territoire dans son ensemble, en travaillant la cohérence des différents objectifs et enjeux de ses collectivités et les conditions de l’État. Ainsi, il permet de fixer un équilibre entre la création de zones urbaines, industrielles et touristiques tout en préservant les espaces naturels (trame bleue, trame verte). Qui le gère ? Le Scotat, un syndicat mixte composé d’élus représentants des différents EPCI et d’un président (Roger Schreiber) élu par l’assemblée. Il fonctionne à la manière d’une collectivité avec un bureau constitué de vice-présidents et des comités syndicaux. Le Scot de l’agglomération thionvilloise concerne six territoires (Portes de France – Thionville, du Val de Fensch, de Cattenom et environs, du Bouzonvillois-Trois Frontières, de l’Arc Mosellan et du Pays Haut Val d’Alzette), soit 120 maires et 260 000 habitants.

2023-11-08 11:00:00
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