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Assurer le monde de demain

by Nouvelles

Los Angeles brûle, Valence est inondé, Mayotte a été dévastée. Le choc de voir les gens perdre tout met en évidence une réalité austère et toujours plus fréquente: les risques climatiques augmentent, et la plupart des vulnérables, ainsi que certains des riches, restent non assurés.

Dans ce contexte, quels sont les leviers pour relever les défis à venir et favoriser une approche holistique qui rassemble les différentes parties prenantes? Le Fonds de recherche AXA est un partenaire clé du CEPR à Paris et, en septembre 2024, ils ont organisé conjointement une conférence en faveur de l’échange entre les universitaires, les décideurs et les praticiens des affaires du Collège de France. Lors de la conférence, un panel d’experts s’est réuni pour discuter de l’avenir de l’assurance face à l’escalade des risques climatiques.

La discussion, résumé dans cette colonne, a mis en évidence trois thèmes principaux: l’augmentation du coût des catastrophes climatiques et l’écart de protection de l’assurance, les défaillances du marché et le rôle de l’État, et la nécessité de meilleurs mécanismes de prévention et de partage des risques.

La hausse du coût des catastrophes climatiques et l’écart de protection de l’assurance

Pourtant, l’écart de couverture reste vaste. En Europe, seulement environ 25% des pertes économiques des événements météorologiques extrêmes sont assurés, laissant un écart de protection contre l’assurance de 75%, certains États membres de l’UE assurant aussi peu que 5% des pertes, comme le montre la figure 1 (ECB 2024). En dehors de l’Europe, les chiffres ne sont meilleurs qu’en Amérique du Nord et en Océanie, avec environ 43%; L’Amérique latine et l’Asie varient d’environ 80%, alors qu’il n’y a pas de nombre comparable pour le continent africain (Suisse RE 2023). Ce déficit exerce une pression croissante sur les fonds publics de secours en cas de catastrophe – où ils existent – et soulève des préoccupations concernant la durabilité financière à long terme. Bien que l’assurance soit un outil fondamental pour la gestion des risques, il reste sous-utilisé dans de nombreuses zones à haut risque. L’amélioration des mécanismes de partage du risque et des mesures de prévention est cruciale pour atténuer les impacts à long terme des catastrophes climatiques sur les économies et les communautés (Vives et al. 2021). Il s’agit également de fixer le bon prix et de promouvoir des partenariats entre les institutions publiques et les entreprises privées.

Figure 1 Proportion de pertes économiques des catastrophes naturelles couvertes par l’assurance à travers l’Europe

Source: ECB (2024).

Les régions plus riches ne sont pas non plus immunisées. Les vulnérabilités budgétaires peuvent également être exacerbées: les pays de l’UE pourraient subir une augmentation significative des charges de dette publique après des catastrophes naturelles (Gagliardi et al. 2022).

Échecs du marché et rôle de l’État

L’un des principaux défis est de garantir que l’assurance reste accessible et efficace. La recherche sur l’absorption d’assurance-récolte chez les agriculteurs a montré que de nombreux petits agriculteurs, malgré des risques climatiques importants, restent non assurés. La complexité administrative et les documents excessifs ont été identifiés comme des obstacles majeurs, en particulier pour les fermes plus petites qui n’ont pas les ressources pour naviguer dans les contrats d’assurance (Nshakira-Rukundo et al. 2021, Grislain-Ledremy ​​et al. 2024).

La table ronde s’est ensuite concentrée sur la question de savoir si l’assurance devrait être obligatoire dans les zones à haut risque. Dans les pays développés, le marché de l’assurance est déjà loin d’être libéral car les gens s’attendent généralement à une intervention gouvernementale après des catastrophes. Cela crée un problème de risque moral: si les ménages et les municipalités anticipent la rémunération de l’État, ils peuvent être moins disposés à acheter une assurance ou à investir dans des mesures préventives. Certains plaident pour les prix basés sur les risques comme un moyen de décourager le développement dans les zones sujettes aux inondations, tout en reconnaissant que les risques les plus extrêmes – environ 3% des cas – peuvent nécessiter une intervention gouvernementale.

En revanche, d’autres soulignent que l’assurance purement axée sur le marché mène à une sous-couverture. Une approche basée sur la solidarité, où les régimes d’assurance obligatoires et la subvention croisée aident à distribuer le risque plus uniformément, a été préconisé comme solution possible. Le régime français de Catnat a été cité comme un modèle réussi, où la réassurance soutenue par l’État garantit que les assureurs restent engagés dans des zones à haut risque tout en gardant les primes gérables. Cependant, même la réassurance de Caisse Centrale (CCR), qui fournit une réassurance soutenue par l’État, est confrontée à l’augmentation des coûts à mesure que les risques climatiques dégénèrent.

Les modèles hybrides peuvent devoir être développés davantage. Alors que les mécanismes du marché encouragent l’efficacité, certains risques catastrophiques peuvent nécessiter des partenariats public-privé pour assurer une large couverture. Une coordination gouvernementale plus forte dans les efforts de prévention, les réglementations de prix et les subventions ciblées pourraient aider à trouver le bon équilibre entre l’accessibilité et la durabilité. La Suisse offre un exemple clé d’un tel modèle hybride public-privé qui assure une large couverture. L’assurance contre les dangers naturels est obligatoire pour la plupart des bâtiments et des primes est uniforme, quelle que soit l’exposition aux risques individuels, favorisant ainsi l’abordabilité et le partage des risques. Des recherches supplémentaires sur le modèle suisse, qui opère sur un double cadre d’assureurs cantonaux dans la plupart des cantons et des assureurs privés dans les autres, pourraient éclairer comment les principes similaires pourraient être adaptés à d’autres régions confrontées à l’escalade des risques climatiques. Une question critique serait de voir si les prix uniformes fonctionneraient également dans des régions et des pays ayant une exposition extrême telle que le risque au niveau de la mer.

Prévention, partage des risques et la voie à suivre

Un thème récurrent de la discussion a été la nécessité d’un plus grand investissement dans la prévention. Des initiatives telles que les évaluations locales des risques municipales ont été mises en évidence comme des approches prometteuses pour aider les petites municipalités à évaluer et à atténuer les risques climatiques locaux. Les assureurs travaillent également stratégiquement avec les petites et moyennes entreprises pour les aider à associer leur risque et à mettre en œuvre des mesures préventives. Le défi consiste à garantir que les efforts de prévention sont activement mis en œuvre.

Une autre approche est la souscription d’impact, où les assureurs incitent les assurés à adopter des mesures de réduction des risques en échange de moins de primes. Cependant, de nombreuses entreprises et particuliers ne vont pas suivre les engagements de prévention, même lorsque des incitations financières sont offertes. Une plus grande coordination entre les assureurs, les gouvernements et les consommateurs est nécessaire pour garantir au sérieux les mesures préventives.

Un point de discorde majeur était de savoir si la subvention croisée devait remplacer les prix basés sur les risques. Les prix basés sur les risques encouragent une allocation efficace des ressources, mais peuvent rendre l’assurance inabordable pour les zones à haut risque. Certains soutiennent que les systèmes basés sur la solidarité permettent une couverture plus large, tandis que d’autres coudent que la suppression des signaux de prix pourrait conduire à une reconstruction inefficace dans les zones à haut risque.

L’éducation publique sur le risque climatique et la nécessité de prévention sont également essentielles. De nombreux ménages sous-estiment leur exposition et ne profitent pas des mesures d’atténuation des risques disponibles. Sans campagnes de sensibilisation au risque plus fortes, l’absorption d’assurance et les actions préventives resteront insuffisantes.

Conclusion

À mesure que les risques climatiques augmentent, assurer l’abordabilité et la disponibilité de l’assurance nécessiteront un mélange de solutions de marché privées, d’interventions publiques et d’efforts de prévention plus forts. Le défi consiste à équilibrer les prix basés sur les risques avec des mécanismes de solidarité pour garantir que l’assurance reste à la fois juste et durable. Les gouvernements et les assureurs devront travailler ensemble pour combler l’écart de protection tout en incitant les investissements dans la résilience.

Le débat sur l’avenir de l’assurance ne concerne pas seulement qui paie, mais aussi comment les sociétés gèrent les risques dans un paysage climatique de plus en plus incertain. Sans action, les lacunes actuelles de la couverture ne feront que s’élargir, laissant les populations les plus vulnérables encore plus exposées aux conséquences financières dévastatrices du changement climatique.

À l’avenir, les décideurs et les universitaires doivent répondre à trois questions fondamentales:

  1. Quelles sont les conditions nécessaires pour que l’assurance reste financièrement viable tout en offrant une large couverture?
  2. Quel rôle les gouvernements devraient-ils jouer pour combler les lacunes de protection les plus graves?
  3. Comment la prévention peut-elle être mieux intégrée dans les modèles d’assurance et l’élaboration des politiques publiques pour réduire le risque global?

La résolution de ces défis nécessitera une nouvelle réflexion et une action politique audacieuse. Le coût de l’inaction est trop élevé.

Références

Eickmeier, S, Q Josefine et S yves (2024), «Effets macroéconomiques et financiers larges et larges des catastrophes naturelles», Voxeu.org, 26 mai.

ECB – Banque centrale européenne (2024), «L’écart de protection contre l’assurance climatique».

Gagliardi, N, P Stéphanie et un Sánchez Pedro (2022), «L’impact fiscal des événements météorologiques extrêmes: première preuve pour les pays de l’UE», Voxeu.org, 23 décembre.

Grislain-Lerarémy, C, B Villeneuve et M Yeterian (2024), «Ne pariez pas à la ferme sur les subventions à l’assurance-récolte: une analyse des effets du traitement marginal des fermes françaises», Banque de France Paper de travail n ° 956.

Munich Re (2025), «Le changement climatique montre ses griffes: le monde devient plus chaud, entraînant de graves ouragans, orages et inondations».

Nshakira-Rukundo, E, JW Kamau et H Baumüller (2021), «Déterminants de l’adoption et des stratégies pour améliorer l’assurance agricole en Afrique: une revue», Économie de l’environnement et du développement 26 (5-6): 605-631.

Suisse Re (2023), «Quelle est la taille de l’écart de protection contre les catastrophes naturelles où vous êtes?».

Vives, X, H Hong, M Kacperczyk et P Bolton (2021), «Resilience of the Financial System to Natural Catasters», Voxeu.org, 25 mai.

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