Aulnay : soupçons de corruption dans l’attribution des HLM

Aulnay : soupçons de corruption dans l’attribution des HLM

À Aulnay-sous-Bois, faut-il verser des pots-de-vin pour obtenir un logement plus rapidement ? C’est la question que se pose le parquet de Bobigny, qui a ouvert une enquête portant sur des soupçons de corruption dans l’attribution de logements HLM par la ville. Le ministère public a saisi le commissariat.

Pour l’instant, une seule plainte est enregistrée. Elle émane d’un habitant du quartier Mitry-Ambourget, qui dénonce la promesse d’un relogement en échange d’une somme de 4 000 €. Le plaignant indique qu’il aurait versé de l’argent en liquide contre la promesse – non tenue – d’un relogement au Vieux-Pays l’année suivante. C’est désormais aux enquêteurs de déterminer la réalité des allégations.

Pas un cas isolé

Selon quatre autres témoignages d’habitants, tous vivant dans les quartiers nord, la combine – pratiquée dans d’autres communes de région parisienne – ne serait pas un cas isolé. Pourquoi eux n’ont-ils pas déposé plainte? La « peur de représailles », répondent les concernés, tous parents, qui « habitent le même quartier » que les auteurs présumés des malversations. Trois de ces familles ont payé sans avoir jamais eu de logement.

Ces habitants que nous avons rencontrés, contre l’engagement de rendre anonyme leur témoignage, ne se connaissent pas entre eux, et se disent « pas engagés politiquement ». Ils décrivent la même chose : une famille, parfois une mère seule, inscrite depuis des années sur liste d’attente pour obtenir un HLM plus grand ou situé dans un autre quartier, lasse de patienter ou contrainte de quitter son logement, finit par prendre contact avec un intermédiaire, « connu dans la cité pour avoir ce rôle ».

Plusieurs milliers d’euros en liquide

Selon leur récit, en échange d’une somme de plusieurs milliers d’euros en liquide, l’intermédiaire promet de faire passer le dossier de demande de logement – issu du contingent OPH (Office public de l’habitat) d’Aulnay – en priorité. Il y aurait même un barème tarifaire selon le quartier recherché. « Plus c’est au sud – donc éloigné des quartiers populaires – plus c’est cher ! », assure un père de famille. Les montants évoqués oscillent entre 3 000 € et 10 000 €.

Une fois un acompte – 1 000 €, 2 000 € toujours en en espèces – empoché par l’intermédiaire, le demandeur lui transmet son « numéro unique d’enregistrement », délivré par la préfecture au début de ses recherches officielles de logement. Quelques mois plus tard la demande passe en commission logement, avec plusieurs visites proposées à la clé.

La longue liste d’attente

A Aulnay, la liste d’attente « officielle » pour un HLM compte plusieurs milliers de personnes, certaines étant inscrites depuis… 2012 !

Autre élément : le nom d’un agent municipal revient dans tous les récits comme possible cerveau. Officiellement « afficheur » pour la précédente municipalité socialiste et l’actuelle, pilotée par Bruno Beschizza (LR), cet agent serait en réalité « homme à tout faire » de la majorité.

L’association anti-corruption Anticor a également fait un signalement au procureur sur des soupçons similaires. Tout comme l’avocate Yaël Scemama, conseil du militant associatif Hadama Traoré. Sa demande est intervenue quand son client était poursuivi en diffamation par Sabrina Missour, l’élue (LR) au logement de la ville, citée dans l’une de ses vidéos publiée sur les réseaux sociaux comme l’un des éléments clé de ces malversations. Ces vidéos avaient finalement été retirées par l’ associatif.

«Que l’enquête se fasse »

Contactée, Séverine Maroun, qui, outre sa fonction de première adjointe est aussi présidente de l’OPH d’Aulnay-sous-Bois, commente : « Que l’enquête se fasse. Moi, j’ai une confiance absolue en mes collaborateurs. »

De son côté, le maire Bruno Beschizza – tout en rappelant s’appliquer à « dissocier mairie et OPH » – assure « ne pas avoir le début de commencement d’un doute sur la probité » de sa première adjointe.

Et se félicite qu’une enquête ait démarré. « Tant mieux si une plainte a été déposée ! Les enquêteurs diront ce qu’il en est de ces rumeurs qui, du reste, existent depuis des années sur la ville comme dans tant d’autres de région parisienne », tonne encore l’édile.

Bruno Beschizza assène : « Si c’est calomnieux, il faudra que Séverine Maroun et l’OPH ne laissent pas passer cela ! On ne peut pas calomnier les gens en toute impunité ! » Et de rappeler « le contexte préélectoral » dans lequel intervient cette enquête.

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