Banques centrales : styles divergents face au changement climatique

Banques centrales : styles divergents face au changement climatique

Deux banques centrales, deux styles (très) différents. À l’été 2021, Christine Lagarde, présidente de la Banque centrale européenne, annonçait la mise en place d’un plan d’action pour inclure le changement climatique dans la politique monétaire. Trois ans plus tard, face à des étudiants de l’université de Stanford en Californie, son homologue américain Jerome Powell, président de la Réserve fédérale américaine (Fed), dit exactement l’inverse. Il ne veut pas entendre parler du climat. Selon lui, “les politiques pour prendre en compte le changement climatique sont du ressort des officiels élus et des agences à qui l’on a confié cette responsabilité. La Fed n’a pas reçu cette mission”.

Jerome Powell retient donc une définition très stricte de son périmètre d’activité, en affirmant l’indépendance de son organisme. “Les décideurs de la Fed sont souvent poussés à prendre position sur des problèmes qui sont sans doute pertinents pour l’économie mais qui ne font pas partie de notre mandat”, affirme-t-il. Il cite quelques sujets récurrents qui lui sont soumis, tels que la fiscalité, les dépenses publiques, l’immigration, le commerce extérieur… et le climat. Le seul lien qui le relie au climat est la supervision bancaire, le banquier central déclarant que les banques doivent être capables de “gérer les risques matériels auxquels elles font face et qui, avec le temps, devraient inclure les risques financiers liés au climat”.

Deux stratégies opposées

Une position qui diffère fortement de celle de la Banque centrale européenne. Celle-ci réalise des stress-tests climatiques pour anticiper les coûts de la transformation vers une économie bas carbone. Elle a également revu sa stratégie d’acquisition d’obligations d’entreprises pour l’orienter vers des entreprises plus vertes. Selon des informations de Bloomberg, les deux stratégies opposées se sont d’ailleurs affrontées au sein du comité de Bâle, l’entité hébergée par la Banque des règlements internationaux (BRI), qui réunit les banques centrales d’une trentaine de pays pour tenter de renforcer la fiabilité du système financier.

Le comité de Bâle avait lancé fin 2023 une consultation pour envisager de mettre en place un cadre de reporting des risques climatiques par les banques. Le comité proposait que les établissements bancaires publient ces informations à partir de 2026. Une proposition soutenue du côté européen, mais fermement rejetée par les autorités américaines. De la même manière que la Fed estime que le risque climatique ne fait pas partie de son mandat, elle estime, selon les informations de Bloomberg, qu’il ne fait pas non plus partie des missions du comité de Bâle.

Un dossier épineux pour les places financières internationales

Dans un billet LinkedIn, l’économiste britannique Andy Sloan, fondateur de l’International sustainability institute, n’est pas très étonné par la position américaine. “Avec la SEC (Securities and exchange commission, ndr) confrontée à une class action sur ses règles climatiques par une équipe hétéroclite d’Etats américains, la Fed n’allait pas laisser le comité de Bâle incorporer le risque climatique dans ses objectifs. Même si c’était une suite logique aux lignes directrices de la TCFD développées par le FSB (Conseil de stabilité financière, lui aussi affilié à la BRI) lui-même il y a sept ans”, commente-t-il.

Selon l’économiste, les centres financiers internationaux demandent des règles sur la finance durable, mais craignent des divergences entre les règles de reporting imposées par les différents pays. Les avancées de l’International sustainability standards board (ISSB) permettaient, selon ces places financières, d’harmoniser un peu les règles. La position de la Fed remet donc tout en cause. “Cela a juste rendu l’application des règles dans tous les centres financiers internationaux un peu plus difficile à gérer”, conclut Andy Sloan sur LinkedIn.

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