2024-07-19 01:49:00
Bob Newhart, l’ancien comptable devenu une superstar de la comédie grâce à sa précision mathématique dans le timing d’un numéro impassible à la décimale près, est décédé jeudi, selon son attaché de presse.
Il avait 94 ans.
Newhart avait certainement l’allure de l’homme ordinaire fatigué qu’il incarnait si bien dans les albums comiques qui ont lancé sa carrière, et dans les deux grandes sitcoms qui portaient son nom : « The Bob Newhart Show », diffusée sur CBS de 1972 à 1978, et « Newhart », diffusée sur le même réseau de 1982 à 1990.
Mais il y avait autant de Stan Laurel que d’Oliver Hardy dans le répertoire de Newhart, a déclaré l’acteur Peter Scolari, ami et partenaire de Newhart dans la série pendant la majeure partie des années 1980. C’est juste que Newhart a choisi de laisser la plupart des gags les plus fous à ses partenaires de scène.
Lorsqu’il a auditionné pour la troisième saison de l’émission, Scolari était déjà un vétéran de la télévision. Pourtant, il était tellement nerveux en lisant face à Newhart qu’il a commencé à bégayer.
« Et je me souviens que Bob me regardait, il avait ce petit (sourire narquois) au coin de la bouche », se souvient Scolari dans une interview avant sa mort en octobre 2021. « Et il a dit : “Vous réalisez qu’un seul d’entre nous peut faire le bégaiement.” »
Le casting de « Newhart ». Rangée du fond : Peter Scolari dans le rôle de Michael Harris, Julia Duffy dans le rôle de Stephanie Vanderkellen et Tom Poston dans le rôle de George Utley. Rangée du devant : Bob Newhart dans le rôle de Dick Loudon et Mary Frann dans le rôle de Joanna Loudon. La série a été diffusée du 25 octobre 1982 au 21 mai 1990. CBS Photo Archive via Getty Images
Cela a enlevé une certaine pression à Scolari. « Il m’a en quelque sorte mis sur la bonne voie », a déclaré le jeune acteur.
Le parcours de Newhart est jalonné de nombreux événements marquants : deux sitcoms à succès et un passage récurrent dans une troisième, une émission de variétés, 14 longs métrages et des millions d’albums vendus. Il a remporté trois Grammy Awards et deux Emmy Awards à cinq décennies d’intervalle, ainsi que le prix Mark Twain de l’humour américain.
Pas mal pour un enfant d’une banlieue ouvrière de Chicago.
Né le 5 septembre 1929 à Oak Park, dans l’Illinois, fils de copropriétaire d’une entreprise de fournitures de plomberie et femme au foyer et frère de trois sœurs, rien dans les trente premières années de sa vie ne laissait présager du succès qui allait suivre au cours des six décennies suivantes.
Issu d’une éducation catholique (l’une de ses sœurs, Mary Joan, est devenue religieuse), Newhart semblait destiné à un emploi convenable et strict, surtout après avoir obtenu un diplôme en commerce de l’Université Loyola de Chicago en 1952.
Après avoir servi dans l’armée pendant deux ans pendant la guerre de Corée, Newhart a repris là où il s’était arrêté, en s’inscrivant à la faculté de droit. Newhart, cependant, s’est opposé à ce choix de carrière. Après avoir abandonné ses études, alors qu’il avait une vingtaine d’années, Newhart a d’abord travaillé comme comptable, puis comme rédacteur publicitaire.
C’est à ce moment-là qu’il a découvert sa véritable passion. En collaboration avec son ami Ed Gallagher, ils ont commencé à imaginer des numéros de comédie improvisés. Ils ont essayé de les enregistrer, mais peu de temps après, son partenaire a reçu une offre d’emploi à New York et le duo est devenu soudainement un groupe solo.
Un disc-jockey local avait cependant suffisamment entendu parler de Newhart pour le présenter au directeur de Warner Brothers Records, selon la biographie officielle de Newhart.
Le contrat qui en résulta donna naissance à l’album « The Button-Down Mind of Bob Newhart » et à une célébrité presque instantanée avant même que Newhart n’ait eu la chance de s’établir sur le circuit du stand-up. Mais cela n’avait pas d’importance : une fois l’album sorti, il devint un succès dans les boîtes de nuit et les théâtres de tout le pays. « The Button-Down Mind of Bob Newhart » devint le premier album comique à atteindre la première place du Billboard.
« The Bob Newhart Show » avec, de gauche à droite, Bill Daily dans le rôle de Howard Borden, Bob Newhart dans le rôle du psychologue de Chicago Bob Hartley et Suzanne Pleshette dans le rôle d’Emily Hartley dans l’épisode « The Last TV Show » en 1973. CBS via Getty Images
« Les gens n’arrêtaient pas de me dire que j’étais drôle, que je devrais aller à New York, et j’ai dit : “Je vais tenter ma chance” », a déclaré Newhart à « TODAY » en 2017. « J’étais sur le point de retourner à la comptabilité, et j’ai obtenu ce contrat d’enregistrement. »
« La plupart des humoristes, la plupart des humoristes passent 20 ans sur le terrain. J’ai dû apprendre au sommet. C’était dur. »
Newhart a abordé la comédie avec une précision économique, perfectionnant son art en observant d’autres comédiens et en voyant ce qu’ils faisaient bien – en particulier son idole, Jack Benny.
L’un des trucs caractéristiques de Newhart était de faire des appels téléphoniques dans lesquels seule sa moitié de la conversation pouvait être entendue, permettant aux membres du public de combler les vides avec leur imagination.
Son premier album a remporté trois Grammy Awards (album de l’année, meilleur nouvel artiste et meilleure performance comique : spoken word) en 1962.
La chaîne NBC a offert à la star en herbe sa propre émission de variétés, le « Bob Newhart Variety Show », qui a été saluée par la critique (elle a remporté l’Emmy de la meilleure série comique en 1962), mais a eu de faibles audiences. L’émission a été annulée après seulement une saison.
Le comédien Bob Newhart et sa femme, Virginia Quinn, s’embrassent lors d’un toast lors d’une réception qui a suivi leur mariage à l’église catholique romaine St. Victor à West Hollywood, en Californie, le 12 janvier 1963.David Smith / AP file
Newhart a eu plus de chance en dehors de la scène : il a épousé Virginia « Ginny » Quinn le 12 janvier 1963, un mariage qui durera jusqu’à sa mort en 2023 et qui a donné naissance à quatre enfants : ses fils Robert et Timothy et ses filles Jennifer et Courtney.
Il se lie également d’amitié avec un autre comique populaire de l’époque, Don Rickles, avec qui il voyage à travers le monde lors de vacances partagées avec leurs épouses au cours des années suivantes.
Newhart a sorti sept autres albums comiques et a continué à s’intéresser à la télévision. Il a animé le « Tonight Show » de NBC pendant trois semaines au cours d’un des conflits salariaux de Johnny Carson avec la chaîne. Newhart dit plus tard qu’il pensait être préparé à devenir un remplaçant potentiel de Carson.
Le véhicule télévisuel idéal qui lui avait jusqu’alors échappé est arrivé en 1972 avec la première de « The Bob Newhart Show ». Incarner le Dr Bob Hartley, un psychologue exaspéré et mari d’une institutrice beaucoup plus stable émotionnellement (Suzanne Pleshette), lui a donné l’occasion de perfectionner le rôle d’homme honnête qui allait marquer une grande partie du reste de sa carrière. Au cours des six saisons de la série, il a même pu utiliser son célèbre numéro d’appel téléphonique à sens unique.
Quatre ans après la fin de sa première sitcom à succès, « Newhart » a fait ses débuts. L’acteur principal y incarne Dick Loudon, un auteur de livres amateur qui gère une auberge dans le Vermont avec sa femme, jouée par Mary Frann. Une fois de plus, la blague était généralement dirigée sur lui, car une collection d’amis, de voisins et d’invités excentriques allaient et venaient de son orbite.
Mais malgré toutes les plaisanteries qui se déroulaient devant le public du studio, il était un « professionnel accompli » dans les coulisses, a déclaré William Sanderson, qui jouait le rôle du plouc local Larry, dont les frères Darryl et Darryl suivaient perpétuellement son sillage.
Les acteurs et les créateurs de « The Bob Newhart Show ». Archives photo CBS via Getty Images
« J’ai travaillé pendant des années pour différents patrons et j’apprécie vraiment le professionnalisme de Bob, sans parler de son incroyable sens de l’humour », a déclaré Sanderson, qui travaillait autant comme barman que comme acteur sur la scène théâtrale de New York lorsqu’il a décroché sa grande chance.
« J’ai rapidement vu la façon dont il traitait l’équipe, qui était composée en grande partie des mêmes personnes que lors de son premier spectacle. Il ne croyait pas qu’il fallait garder le public tard le soir. Il essayait de terminer à 22 ou 23 heures pour que les spectateurs puissent rentrer chez eux. »
Scolari, qui jouait le producteur de l’émission télévisée de Loudon dans « Newhart », est devenu un véritable ami et partenaire de golf de son mentor au fil de l’émission. Mais il n’a jamais cessé d’essayer de suivre le rythme lorsque la caméra a commencé à tourner.
« Si vous avez fait rire Bob Newhart, je veux dire, allez, vous devez être quelque part dans la bonne direction », a déclaré Scolari. « Et ça ne se fait pas n’importe où, car il n’y a pas beaucoup de génies emblématiques. »
La similitude entre les deux personnages principaux auxquels il sera le plus souvent associé était si évidente que Newhart l’a jouée pour rire dans le dernier épisode de la série « Newhart » de 1990. Dans cet épisode, Hartley se réveille à côté de sa femme d’origine à l’écran – un rôle repris par Pleshette dans l’un des caméos les plus mémorables de l’histoire de la télévision – et se rend compte que les huit saisons de l’histoire qui se déroulent dans le Vermont n’étaient qu’un rêve.
« Il ne faut pas sous-estimer les talents d’un poney qui ne sait faire qu’un seul tour », explique Robert Thompson, directeur du Bleier Center for Television and Popular Culture de l’université de Syracuse. « Car si le tour qu’il fait est suffisamment bon, il peut durer toute une carrière. Si à la fin du numéro, il se met à pousser des ailes et s’envole, il n’est pas nécessaire de faire plus de tours. »
Bob Newhart dans le rôle du professeur Proton dans « The Big Bang Theory ». CBS
Newhart a eu du mal à retrouver le même succès dans les années 1990 avec sa sitcom suivante, « Bob » (1992), qui n’a duré qu’une saison et demie. Cinq ans plus tard, sa prochaine tentative de série phare, « George & Leo », s’est avérée encore plus décevante, car elle a été annulée au milieu de sa première saison.
Mais Newhart a réussi à passer à l’acte 3. Il a retrouvé une popularité renouvelée au 21e siècle grâce à un rôle secondaire mémorable dans le film « Elf » de 2003, aux côtés de Will Ferrell, puis à un rôle récurrent dans le rôle de l’ancien présentateur d’une émission scientifique pour enfants, le professeur Proton, dans « The Big Bang Theory ».
« Ce qui était important dans « Big Bang Theory », c’est qu’il a permis de faire découvrir le personnage de Newhart qu’il avait perfectionné tout au long de sa longue carrière à un tout nouveau public », a déclaré Thompson. « Beaucoup de gens l’ont vu… qui n’avaient probablement jamais vu un épisode de ses deux précédentes sitcoms. »
Ce rôle lui a également valu un Emmy très attendu, celui du meilleur acteur invité dans une série comique.
Bob Newhart. Gerald Smith / NBC
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