Comme un air de déjà-vu. Ce mercredi matin, la mairie de Bobigny a organisé une conférence de presse à l’hôtel de ville pour annoncer le dépôt de plusieurs plaintes concernant la gestion de la Semeco, la société d’économie mixte qui gère des espaces publics et le chauffage urbain dans la commune.
Cinq mois après s’être constitué partie civile dans les procédures concernant la gestion de l’Office public de l’habitat (OPH) sous l’ancienne mandature UDI, le maire Abdel Sadi (PCF) était cette fois-ci entouré de Waly Yatera, son adjoint au logement et président de la Semeco. Ce dernier a détaillé les plaintes visant la société qui, comme l’OPH, est présidée par un élu de la majorité municipale.
Des procédures portant sur des accusations « d’abus et recel d’abus de biens sociaux » autour d’une rupture conventionnelle collective (RCC) visent quatre anciens cadres de la Semeco. L’objectif de cette RCC, validée en conseil d’administration en septembre 2019, était de diminuer la masse salariale de l’entreprise en incitant au départ ses collaborateurs.
Un directeur financier est parti avec 288 209 euros
« Quatre cadres ont bénéficié de conditions exceptionnelles de rupture conventionnelle collective au regard de la situation financière de la Semeco, détaille Waly Yatera. Les indemnités qu’ils ont reçues étaient complètement disproportionnées. »
Une responsable juridique a ainsi obtenu 136 800 euros, une responsable des ressources humaines 161 353 euros, un DRH 230 266 euros et un directeur financier 288 209 euros.
« On parle de gens qui n’avaient que quelques années d’ancienneté », rappelle Mario Luciano, le nouveau directeur général de la société d’économie mixte. Son prédécesseur Rachid Maalem est également poursuivi dans cette affaire, « car il était responsable de la Semeco au moment des faits », précise la société.
Les membres du conseil d’administration présents lors de la validation du RCC — parmi lesquels d’anciens élus de la majorité UDI — font eux aussi l’objet de poursuites pour « abus de pouvoir » et « complicité d’abus de biens sociaux ».
Autre grief pointé par la nouvelle équipe en place : le fait que la commission de validation — qui a validé ou refusé les dossiers des salariés candidats au départ dans le cadre de cette rupture — était justement composée des cadres qui en ont ensuite bénéficiée.
« Dans cette histoire, ils étaient juges et parties », pointe le nouveau directeur général de la Semeco. « Ce qui est plus troublant, c’est que nous n’avons retrouvé aucun document stipulant leurs projets professionnels nous permettant de comprendre pourquoi leurs dossiers ont été validés », abonde Waly Yatera.
«Monsieur N’Diaye a acheté le silence de Monsieur Maalem en vue des élections municipales»
À ces plaintes s’ajoute une autre procédure visant le protocole transactionnel signé au moment du départ du directeur général Rachid Maalem — qui a été démis de ses fonctions en janvier 2020 — et le président de la structure à l’époque, Mahamadou N’Diaye, qui était maire adjoint à la petite enfance.
« Pour nous, cet accord s’apparente à un accord politique secret, pointe Waly Yatera. Le texte est édifiant. Monsieur N’Diaye a acheté le silence de Monsieur Maalem en vue des élections municipales. Il s’est engagé à la neutralité politique, à ne participer à aucune manifestation politique d’ici le résultat du second tour. En échange, il a reçu 259 500 euros d’indemnités. »
Selon la Semeco, l’accord devait bénéficier à Christian Bartholmé, alors premier adjoint et tête de liste UDI aux municipales. « Il ne pouvait pas ne pas être au courant, souligne Waly Yatera. Monsieur N’Diaye était un de ses colistiers. » Pourquoi contraindre Rachid Maalem au silence? « C’est toute la question qu’on se pose », souffle-t-on à la mairie.
Dans ce dossier, la Semeco a porté plainte pour « abus de biens sociaux, recel d’abus de biens sociaux et abus de pouvoir » contre Rachid Maalem, « abus de bien sociaux et abus de pouvoir » contre Mahamadou N’Diaye et « complicité d’abus de bien sociaux et complicité d’abus de pouvoir et recel d’abus de biens sociaux » contre Christian Bartholmé.
« La ville se portera partie civile dans ces procédures », a précisé le maire Abdel Sadi, dénonçant des affaires qui viennent renforcer la « défiance vis-à-vis des politiques ».
Christian Bartholmé dénonce «l’acharnement» de la nouvelle majorité
« J’ai été licencié. Il y a eu un protocole, c’est ce qui arrive à tous les salariés », rétorque de son côté Rachid Maalem, qui refuse de s’exprimer davantage tant qu’il n’aura pas « eu l’accord officiel de la Semeco ». Christian Bartholmé, désormais élu d’opposition, dénonce « l’acharnement » de la nouvelle majorité à son égard.
« Je n’avais aucune responsabilité au sein de la Semeco au moment du départ de M. Maalem [NDLR : il en a eues jusqu’en 2018]rappelle-t-il. Je n’ai jamais eu connaissance de ce protocole. Si j’avais voulu contraindre M. Maalem au silence, l’aurais-je vraiment fait à un mois des municipales seulement ? La campagne était déjà bien avancée ! C’est absurde. Et pour cacher quoi en plus ? S’il y a des dossiers, pourquoi la nouvelle majorité ne les a-t-elle pas trouvés ? Elle ne fait que multiplier les plaintes à mon encontre : à la Semeco, à l’OPH, car elle sait que tout le monde va en parler. Et cela évite à la presse de s’intéresser à elle. »
Nous n’avons pas réussi à entrer en contact avec Mahamadou N’Diaye pour l’interroger sur ce dossier.
2021-03-24 10:00:00
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