c’est pourquoi être ensemble est nécessaire – Corriere.it

c’est pourquoi être ensemble est nécessaire – Corriere.it

2023-07-24 14:40:22

De MAURICE FERRARIS

Avant même d’être un problème politique, la coexistence est un besoin premier de l’être humain : une réflexion

Souvent, quand on parle de coexistence, on est amené à voir d’abord un chapitre de philosophie politique, en référence à la coexistence pacifique entre États ou au contrat social, la décision des humains de créer un Commonwealth mettre fin à la guerre de tous contre tous. Mais à mon avis une erreur. Ce qui ne réside certainement pas dans la tentative, dans la nécessité, de développer le plus de commodité possible en politique, à un moment où les vents de la guerre soufflent puissamment. Mais plutôt en considérant la coexistence politique comme le paradigme, la forme essentielle de la coexistence. À mon avis, ce n’est pas le cas : la copie imparfaite et bureaucratique d’un fait beaucoup plus profond et déterminant de l’humain, le besoin d’être ensemble, dont le manque génère les plus grandes souffrances spirituelles que la vie nous oblige souvent à vivre, et qui explosent avec une virulence particulière pendant les vacances, quand l’interruption du travail peut signifier, pour les moins fortunés, une interruption du vivre ensemble.

Nous avons des exemples illustres de ce besoin d’être ensemble, même sans remonter jusqu’à Adam et Eve ou Euryalus et Nisus. Entre le 16 et le 18 août 2004, Jacques Derrida, en phase terminale du cancer qui l’emportera dans quelques semaines (il mourra à Paris le 9 octobre), n’échappe pas à l’effort de traverser l’Atlantique, un très long voyage vers le sud-ouest, pour participer à la conférence Pour une réflexion sur la déconstruction : problèmes politiques, éthiques et esthétiques. Cet effort héroïque et presque surhumain ne s’explique pas difficilement : Derrida avait toujours vécu, comme le font souvent les auteurs, en vue d’une communauté de lecteurs, et c’est à cette communauté qu’il voulait dire un dernier adieu. , si l’on veut, l’inverse spéculaire mais complémentaire du grand recueil d’épicées d’amis et de compagnons de voyage qu’il avait publié à la va-vite l’année précédente, Chaque fois unique, la fin du mondeà chaque fois la fin du monde est unique, car il est vrai que A chaque fois qu’un humain s’en va, tout un monde coule, celle, grande ou petite, avec laquelle il entretenait des relations, et qui constituait son monde. C’est-à-dire, voilà le point d’où il faut partir, le monde d’un individu immergé dans une communauté.

Autrement dit, Je pense que je suis une certitude d’existence, mais en soi peu si elle n’est pas complétée par l’énorme richesse de nos semblables, ceux avec qui nous avons des relations, qu’elles soient d’amitié ou d’inimitié, mais qui profitent de notre temps avec nous : l’Allemand contemporains, qui signifie contemporains, signifie exactement cela : profiter ou partager le même temps. On aurait donc tort de voir en Descartes un philosophe solipsiste, car en effet toute sa réflexion se résume dans la preuve qu’il y a un Dieu, qu’il a créé un monde extérieur, et que, dans ce monde, il y a des alter ego. Inversement, une vie qui n’implique pas de vivre ensemble ne serait pas la vie. Pourquoi? Les premières preuves viennent de l’expérience directe. Le fait que les humains soient des animaux sociaux est une évidence. Nous ne verrons jamais un chat frustré par le désintérêt d’un autre chat, tout en étant renvoyé, ou subissant une indifférence ostentatoire, l’une des pires offenses, et souffrances, qui puisse arriver à un humain. Pensez à laanathème lancé à Spinoza par sa communauté: Vous êtes tous avertis, que désormais personne ne doit lui parler oralement, ni communiquer avec lui par écrit ; que personne ne doit le servir, ni dormir sous son propre toit, que personne ne s’approche de lui au-delà de quatre coudées (environ deux mètres, comme au moment du confinement), et que personne ne lit rien de ce qu’il a dicté ou écrit de sa main.

Pourquoi cet anathème qui laisserait un lézard complètement indifférent à être si terrible, et correspondrait-il à cette forme de mort sèche et tranchante à laquelle nous ramène la mort civile ? origines de la nature humaine. Et d’abord à notre nature première d’organismes, et d’organismes particulièrement défavorisés et lents. C’est précisément pour cette raison que la coexistence, en tant que remède qui introduit une seconde nature dans la première, est certainement enracinée dès le départ dans nos besoins de soins, liés à la néoténie, c’est-à-dire à la survie des éléments infantiles dans le développement adulte, qui est propre à l’humain. Tout aussi humain, trop humain, est son développement tardif, qui le rend d’abord dépendant des formes d’alimentation reçues dans l’enfance (ce qui est une forme toute première et élémentaire de coexistence) jusqu’à la dépendance de l’enfant à l’autorité symbolique ou peut-être au chantage sentimental d’un parent ou d’un professeur, de l’écrivain à l’avis des critiques, et de moi-même, évidemment, à la manière dont vous jugerez ces lignes.

Mais ce n’est pas seulement une question de pauvreté, de besoin. C’est dur d’imaginer une vie vraiment telle que c’est une vie sans autres moi. L’anachorète ou Robinson mène certainement une vie solitaire, et le premier par choix, le second par nécessité ; c’est-à-dire qu’ils vivent dans la solitude, mais une solitude peuplée des fantômes d’une vie sociale antérieure. Alors qu’un animal humain grandissant dans un isolement complet n’aurait aucun espoir de survie, à moins (comme dans les histoires fabuleuses qui remplissent notre enfance d’enfants adoptés par des loups) qu’il ne prenne la forme du groupe auquel il appartient ; donc d’une communauté qui n’est pas humaine. Il ne s’agit pas non plus simplement du partage générique d’une nature humaine. Par exemple, il est difficile d’affirmer que passer son temps parmi des étrangers, c’est vraiment vivre ensemble. Dans ces cas, on a plutôt l’impression d’être seul dans une multitude, ce qui est exactement le contraire de vivre ensemble. A l’inverse, il peut y avoir des relations de couple qui, surtout dans la première phase, celle du tomber amoureux absolu et exclusif (un don rare que beaucoup d’humains n’ont pas eu la grâce de connaître), peuvent laisser le monde environnant au second plan si bien que seules deux figures se détachent. Ce sont de grands moments, qui évidemment passent, se transforment, se cassent parfois en laissant une grande douleur, mais qui démontrent la quintessence et l’excellence d’une coexistence qui n’est ni sociale ni politique.

Dans tous les cas que nous avons examinés, de l’archétype ou du stéréotype du contrat social à la singularité toujours changeante de l’union qui peut réunir deux humains dans un couple, un cercle herméneutique est à l’œuvre, celui de la vie sociale. L’animal humain, qui n’a que des buts internes, comme tout autre organisme, reçoit, très tôt dans sa vie, une série de buts externes, grandissant très jeune dans un monde très ancien plein de mythes, de rites, de traditions et de langages. Pendant ce temps, engagé dans des exploits ardus, si vous regardez en arrière, comme acquérir la position verticale, apprendre à parler, puis lire, écrire et compter…

Toute cette avalanche de buts internes revient à l’animal humain qui entre-temps se sent maintenant plus humain qu’animal. Il est vivant, mais sa vie est déjà très différente de celle des autres organismes car elle est pleine d’ambitions, de difficultés et de manques que les autres organismes ne soupçonnent même pas de loin, et qui ont inévitablement à voir avec la coexistence. On ne trouvera jamais un castor frustré parce qu’il a eu une mauvaise note à l’école ou dans la tristesse parce que le castor dont il est follement amoureux ne répond pas à ses messages ou se limite à des émoticônes sibyllines ou bâclées. Ce sont des manières d’être qui appartiennent exclusivement à la forme de vie humaine. Et c’est justement dans cette forme de vie qu’il peut arriver à un humain de se poser une question inconcevable pour un castor ou un dauphin, c’est-à-dire de se demander si ce qu’il vit est une vraie ou une fausse vie, s’il a ou non une expérience authentique de la vie, et d’ergoter très longtemps, peut-être toute sa vie, sur des questions de ce genre, pour conclure, encore une fois, que une vie solitaire pas de vie.

Ce que je propose avec l’idée de la coexistence comme élément constitutif de la nature humaine, à la fois de la première, la biologique, et de la seconde nature, la sociale, une transcendance de ce côté. Nous ne sommes pas seuls au monde, il y en a un autre, différent de nous mais humain comme nous à qui nous pouvons nous adresser avec haine ou amour, mais justement comme un alter ego qui a, en soi, quelque chose de nous (le recours aux animaux de compagnie est aussi admis, mais il n’est pas difficile de remarquer à quels processus d’anthropomorphisation nous soumettons chiens, chats, perroquets…). la règle du jeu : on ne peut pas se sentir humain sans avoir une relation avec un autre humain. Comment les livres, disait Umberto Eco, nous offrent une immortalité du passé, rétrospective, comme celle-ci vivre ensemble, se reconnaître comme des êtres humains, nous procure une transcendance toute mondainec’est-à-dire qu’elle nous offre un sentiment d’être ensemble qui dépasse les limites d’une vie qui, examinée pour ce qui, sans le sens supplémentaire du vivre ensemble, reste solitaire, pauvre, désagréable, brutale et, aussi longue soit-elle, encore trop courte.

24 juillet 2023 (changement 24 juillet 2023 | 13h04)



#cest #pourquoi #être #ensemble #est #nécessaire #Corriere.it
1690220929

Facebook
Twitter
LinkedIn
Pinterest

Leave a Comment

This site uses Akismet to reduce spam. Learn how your comment data is processed.