Nouvelles Du Monde

Chamane Médée du XXe siècle – Il Sole 24 ORE

Chamane Médée du XXe siècle – Il Sole 24 ORE

2023-06-14 09:57:28

Un chaman du XXe siècle qui met en contact la terre et le ciel. Une prêtresse qui ose effrayer l’inconscient. Médée d’Euripide, mise en scène par Federico Tiezzi appartient à un monde où l’écoulement du temps tourne le dos aux mains du chœur. Peu à peu, la fille d’Aeetes, roi de Colchis, dissipe la peur des fantômes et les mâchoires des crocodiles qui surpassent l’anthropomorphisme des alligators plus plastiques à la Disney (Bianca et Bernie ou Peter Pan). Son regard est tribal, archaïque.

Lors des changements de scène, sous les étoiles-flammes du Théâtre Grec, les enfants de Jason se voient même abaisser une tête de lapin sacrificielle, tandis que vertige et délire s’emparent du système et que chaque image ou vibration libère le théâtre des contraintes du cocciopesto, de l’orchestre et de toute la cavea, dans un tapis roulant de cauchemars lugubres.

Lire aussi  Nouvelle chanson : Gwen Stefani - 'True Babe'

Mère infatigable et tyrannique

Lorsque Médée (Laura Marinoni) entre en scène, après que l’infirmière a raconté comment la princesse descendue du Soleil a suivi Jason de Colchis à Corinthe, pour être abandonnée au profit de Glauce, la fille du roi Créon, le théâtre grec de Syracuse tourne en usine fantasmagorique, une sonnerie d’art visuel qui part de loin, peut-être précisément de Medeamaterial (1988) de Heiner Müller, avec Marion D’Amburgo, et devient ici un véritable rituel social. Ce n’est pas un hasard si les œuvres d’Alighiero Boetti, Mario Schifano, Gae Aulenti, avec qui Tiezzi a collaboré, jusqu’à Alessandro Mendini et Franco Raggi ou des musiciens contemporains tels que Brian Eno et Jon Hassell se reflètent dans le sang de la Lombardi Tiezzi Company. “Le premier voyage que j’ai fait avec mon partenaire était à Syracuse. Nous étions au lycée et voulions voir Magna Graecia. Je me souviens encore de l’odeur des lauriers-roses qui entouraient le théâtre » nous raconte le metteur en scène. « En 2015 je m’étais mesuré à Iphigénie dans Àulide qu’Euripide écrivait à la cour d’Archelaus. En utilisant des termes qui ont à voir avec Jean Genet ou d’autres théoriciens du théâtre, à Syracuse on a la sensation soudaine que le théâtre lui-même est l’objet d’un rituel ». Dans le travail d’équipe, entre autres, se distinguent Marco Rossi (scénographe), Giovanna Buzzi (costumière) et Francesca Della Monica (professeur de choeur) ; La traduction de Massimo Fusillo déconstruit l’espace en faisant de ce théâtre le lieu déclencheur d’un rêve.

Médée de Federico Tiezzi au Théâtre Grec de Syracuse

Galerie de photos23 photos

Voir

Henri James

L’Autel des morts d’Henry James ouvre alors la porte du Monde magique d’Ernesto De Martino, un demi-monde percé par la société post-industrielle de Jason. Et quand le texte d’Euripide devient un drame bourgeois à la Henrik Ibsen, les chants haïtiens, les langues missionnaires, l’Afrique, le catholicisme romain avancent… La Médée, au sein de la saison théâtrale de l’Institut national du théâtre antique, est une sorcière semblable à la Danza d’août la mort de Strindberg ou à la maison de poupée de Nora. Dans la relation Giasone-Médéa, confie Tiezzi, il y a l’attrait et l’incommunicabilité de la chorégraphie de Pina Bausch.

En savoir plus

En savoir plus

Dès lors, le coup de pinceau tétragonal du couple est rasé : Jason, l’aventurier cynique devenu bourgeois, porteur d’une violence néocapitaliste (la violence de l’exclusion), s’oppose à la violence matérielle de Médée. Cependant, chaque interprète ne trahit pas la ligne d’ombre de ceux qui ne ressentent « rien » quand ils aiment et détestent. Un néant et une passion bien nourris : certains passages de tons et de vents ressemblent décidément à Wolitz et Pollock. “Pendant plusieurs années de suite, l’après-midi du Vendredi Saint, j’ai vu La Passion de Jeanne d’Arc à la télévision”, raconte Tiezzi. « Je me souviens de ma mère, à la maison, rapprochant deux chaises et, bien que je ne sache pas pourquoi, nous avons regardé ce film ensemble. Le sentiment de sympathie que j’ai ressenti en étant avec elle – mon bras effleurant le sien, ce sentiment de communion face aux images de Dreyer – est indescriptible. Je sais seulement que, depuis que j’ai commencé ce métier, c’est ce que je cherchais et chercherai toujours dans ce merveilleux rituel social qu’est le théâtre ».



#Chamane #Médée #XXe #siècle #Sole #ORE
1686769724

Facebook
Twitter
LinkedIn
Pinterest

Leave a Comment

This site uses Akismet to reduce spam. Learn how your comment data is processed.

ADVERTISEMENT