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Chambres Rouges (Kanada 2023) : KRITIK : artechock

by Nouvelles

Quand les meurtriers deviennent des superstars

Dans « Chambre Rouge », Pascal Plante propose un examen impressionnant du psychisme des groupies tueuses en série, qui se transforme finalement en un voyage en enfer.

Meurtriers, crimes et actes de violence : pratiquement aucun autre sujet n’est actuellement aussi présent dans le multimédia, qu’il s’agisse de podcasts sur la vraie criminalité, de livres ou de séries télévisées comme « Dahmer ». La fascination pour le « mal » ne connaît pratiquement pas de limites. La rapidité avec laquelle une telle fascination peut se transformer en obsession est le guide de Red Rooms. Le réalisateur québécois-canadien Pascal Plante prend pour modèle les groupies qui idolâtraient le tueur en série américain Ted Bundy dans les années 1970. L’accent est mis sur Kelly-Anne (Juliette Gariépy), une mannequin ayant une affinité pour la sécurité informatique et les jeux en ligne, et Clémentine (Laurie Babin), une jeune femme sans le sou qui se lie d’amitié avec Kelly-Anne. Les deux regardent le procès pour meurtre contre Ludovic Chevalier (Maxwell McCabe-Lokos) en tant que spectateurs dans la salle d’audience, campant même devant le bâtiment la nuit. À différents égards, ils sont obsédés par Chevalier – dont la culpabilité semble avoir été prouvée avant le procès.

Plante s’intéresse principalement à la personnalité des deux jeunes femmes et à leur « relation » avec Chevalier. Clémentine est convaincue de son innocence et explique le fardeau écrasant de la preuve comme une erreur judiciaire et un calcul. Kelly-Anne maintient une façade rationnelle alors qu’elle consomme des vidéos sur le dark web des actes présentés comme preuve lors du procès et enchérit pour l’une d’entre elles aux enchères dans la salle rouge titulaire avec des Bitcoins. Bien qu’il s’avère assez vite que Chevalier est coupable et que les deux femmes ont une vision romancée du procès dans leur obsession, Plante parvient à ne jamais tourner les deux en plaisanteries ni à les diaboliser. Lorsque Clémentine intervient dans un talk-show télévisé dans lequel Chevalier est traité de monstre, insulte les invités et est ensuite moqué et pris en pitié par eux, nous sommes censés la voir comme une victime. Cependant, l’ambivalence dans la représentation des personnages laisse ouverte la question de savoir d’où vient ce fanatisme aveugle envers un meurtrier de sang-froid. Est-ce le besoin de proximité humaine ? Une confrontation avec vos propres démons ? Un trouble psychosomatique inhérent ? – Plante doit au spectateur une réponse claire, au moins en partie, mais il lui en donne suffisamment pour se forger sa propre image.

Plante maintient ce regard extérieur sur ses personnages tout au long du film et s’abstient en même temps de penser à la place du spectateur. Le processus semble presque documentaire. Sans trop de coupures, les avocats présentent chacun leurs déclarations liminaires. Chevalier, cependant, échappe au spectateur en tant que personnage actif. Assis sans un mot derrière une vitre dans la salle d’audience, il ne peut pas devenir un véhicule de haine, mais plutôt un objet qui reste silencieux. Son avocat a presque de bons arguments pro réoce qui semble au moins plausible au début du film.

Plante s’abstient également de dépeindre la violence visuelle. Alors que les personnages sont exposés aux vidéos des atrocités, le spectateur se retrouve avec un bruit de fond à l’extérieur de la salle d’audience et provenant des haut-parleurs de l’ordinateur, ainsi que les réactions sur les visages dans la salle d’audience. Les deux fournissent suffisamment d’informations sur le contenu. Des images qui restent dans votre tête plus longtemps et avec plus de vivacité que n’importe quel effet d’éclaboussure. Les différentes réactions des spectateurs dans le film approfondissent le dessin ambivalent des personnages. On y voit du dégoût, de la consternation et du choc, représentatifs de la lecture exigée de ce qui est représenté. Mais il y a aussi l’obsession, pour laquelle la limite de la fascination est ici dépassée et déclenche une descente aux enfers imparable qui semble promettre une catharsis.

Avec Chambres Rouges, Pascal Plante réalise un film intense qui reste complexe jusqu’au bout grâce à ses personnages et à la structure de son intrigue. Au lieu d’un simple polars Le réalisateur se concentre sur les relations psychologiques avec les meurtriers et met le spectateur au défi d’accorder autant d’attention au mal que ses personnages. Red Rooms se démarque d’un genre par ailleurs souvent surchargé et lui donne également un tout nouveau visage.

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