2017-06-30 20:18:25
Aujourd’hui, nous poursuivons le voyage commencé dans un programme précédent vers la recherche de la structure ultime de la matière. Notre guide est, encore une fois, Pedro González Marhuenda, professeur de physique théorique à l’Université de Valence et chercheur à l’Institut de Physique Corpusculaire. A cette occasion, nous avons retracé l’histoire de cette recherche depuis les temps lointains où les philosophes grecs se posaient des questions sur la nature des choses qui nous entourent : Thalès de Milet, Démocrite, Aristote, etc. Le voyage nous a permis d’atteindre la fin du siècle XIXème lorsque John Dalton récupéra l’idée de Démocrite et proposa que les éléments chimiques étaient composés d’atomes, de particules minuscules et indivisibles.
Les atomes proposés par Dalton ont permis de comprendre la diversité des substances chimiques qui composent les choses. Cependant, l’indivisibilité de l’atome n’a pas duré longtemps. Le chercheur Joseph John Thomson a étudié un étrange rayonnement produit dans un tube cathodique, un dispositif composé de deux électrodes séparées l’une de l’autre d’une certaine distance et enfermées dans un flacon en verre. Thomson a observé que les rayons voyageant entre les électrodes étaient composés de particules dotées d’une charge électrique négative et d’une masse mille fois inférieure à celle du plus petit atome connu, l’atome d’hydrogène. C’est ainsi qu’il découvre l’électron, une particule subatomique qui détruit l’idée de l’invisibilité des atomes.
La charge électrique négative de l’électron a amené Thomson à penser que des charges identiques devaient exister dans l’atome, mais de signe opposé, sinon on ne pourrait pas expliquer que les atomes soient neutres. Ainsi, Thomson a fourni, pour la première fois, l’idée que les atomes avaient une structure. Bien qu’il pensait que les charges négatives et positives étaient mélangées pour former une sorte de pudding aux raisins (les électrons étaient les raisins secs).
Le siècle XIXème Elle se termine par la découverte de la radioactivité, rayonnement capable de pénétrer dans la matière dégagée par certains atomes, comme l’uranium. Le scientifique Ernest Rutherford a commencé à étudier ces rayonnements et a découvert qu’un type spécifique d’entre eux, les particules alpha, étaient des atomes d’hélium ionisés. Utilisant des particules alpha comme projectiles, il bombarda une très fine feuille d’or et observa que certaines de ces particules changeaient de direction et d’autres, très peu nombreuses, revenaient, comme si elles étaient rejetées par une très petite région très dense, chargée positivement. Ainsi il découvrit que le noyau atomique est très petit et concentre toute la charge positive de l’atome. Rutherford a proposé un modèle atomique qui ressemblait à un système planétaire, avec le noyau au centre et les électrons en orbite autour de lui.
Le modèle de Rutherford présentait un problème insurmontable. La théorie électromagnétique de Maxwell disait que les électrons se déplaçant autour d’un atome perdraient de l’énergie à cause du rayonnement électromagnétique et, en très peu de temps, descendraient en spirale jusqu’au noyau, fusionnant avec lui. D’autre part, en calculant la masse du noyau, il est arrivé à la conclusion que celui-ci était également constitué de deux types différents de particules, les unes chargées, qu’il appelait protons, et les autres neutres, neutrons.
Les problèmes du modèle planétaire de Rutherford ont été résolus par Neils Bohr en ajoutant une proposition originale, basée sur la mécanique quantique. Pour Bohr, les électrons occupent certains niveaux dans lesquels ils n’émettent ni ne perdent d’énergie ; cependant, un électron peut sauter d’un niveau à un autre, libérant ou absorbant certaines quantités d’énergie. La justification de ce comportement étrange a été fournie par Louis Victor de Broglie qui a proposé que les électrons soient des particules qui, en même temps, se comportent comme des ondes. Ainsi est née ce qu’on appelle la dualité onde-corpuscule, caractéristique de la mécanique quantique. Cette vision a été complétée par Erwin Schrödinger qui en a fourni la base mathématique grâce à l’équation qui porte son nom, une équation qui ne parle pas de positions des particules mais de probabilités, c’est-à-dire qu’on ne sait pas très bien où elles se trouvent mais on obtient avec quelle probabilité il peut occuper une région ou une autre.
Grâce à cette vision ondulatoire de la matière, le développement du microscope électronique a ensuite été réalisé, qui utilise les propriétés ondulatoires des électrons, au lieu d’une source de lumière, pour voir et amplifier ce que l’on souhaite observer.
À mesure que les méthodes d’observation se développaient, de nouvelles particules commençaient à être découvertes. Wolfgang Ernst Pauli, analysant théoriquement comment un neutron se désintégrait en proton et en électron, a observé qu’il manquait d’énergie dans l’équation et est arrivé à la conclusion qu’il devait y avoir une particule jusqu’alors inconnue appelée neutrino. Le neutrino a été détecté 25 ans plus tard.
À partir des années 1950, on a commencé à construire des accélérateurs de particules capables de provoquer des collisions à haute énergie. La collision, due aux effets de conversion entre énergie et matière établie avec la célèbre équation d’Einstein E=mc^2^, a donné naissance à un nombre énorme de nouvelles particules, le muon, le pion, etc. Le nombre de particules découvertes était si grand qu’au début des années 1960, il n’existait aucune théorie capable de décrire ce qui se passait.
En 1964, Murray Gellman proposa un nouveau modèle, le modèle standard, selon lequel bon nombre de ces particules pourraient s’expliquer si elles étaient composées de particules plus élémentaires, qu’il appela quarks. Cette proposition brisait, une fois de plus, l’idée d’indivisibilité, en cette occasion, celle des constituants de l’atome. Le proton et le neutron étaient constitués chacun de trois quarks. C’est ainsi que les particules élémentaires ont été organisées en familles : les quarks, les leptons (on compte parmi eux l’électron, le muon, le tau et les neutrinos) et les particules associées aux interactions.
Les interactions représentent les forces fondamentales de la nature et il en existe quatre connues : électromagnétiques, fortes, faibles et gravitationnelles. Chacune de ces interactions est associée à ses particules médiatrices, le photon, les bosons W+, W- et Z, les gluons et, dans le cas de l’interaction gravitationnelle, elle n’a pas encore été trouvée mais elle porte déjà un nom : graviton. À cela s’ajoute la création de masse liée au champ de Higgs, dont la particule est le boson de Higgs.
C’est, très brièvement, la structure ultime de la matière, telle que nous la connaissons aujourd’hui. Est-ce la structure ultime de la matière ? On ne sait pas.
Je vous invite à écouter Pedro González Marhuenda, professeur de physique théorique à l’Université de Valence et chercheur à l’Institut de physique corpusculaire.
Les références:
Structure ultime de la matière (I). Nous avons parlé avec Pedro González Marhuenda.
Les quarks
Le Quark et le Jaguar. Nous parlons à Murray Gell-Mann
Thalès de Milet et sa longue ombre.
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