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Déconstruire les faux-semblants en RDC : Don Chirhuza et son combat pour la vérité à l’écran ~ Qu’est-ce qu’on en sait !

by Nouvelles

2024-12-25 14:40:00

Dans un monde où les ombres étouffent souvent la vérité, Don Chirhuza se dresse tel un éclaireur, une voix audacieuse dans les méandres du cinéma engagé en République démocratique du Congo. Réalisateur africain au regard affûté et défenseur infatigable de l’émancipation africaine, il façonne l’écran comme une arme contre l’injustice. Avec « Le Jour de Justice », court métrage percutant tourné en 2020, il dévoile une histoire brûlante où les faux-semblants s’effondrent pour laisser jaillir la lumière.

L’intrigue gravite autour de Balume, jeune étudiant de 22 ans, accusé de violence sexuelle envers Faida, sa condisciple. Le poids de la société et de la procédure semble écraser le garçon, tout porte à croire à sa culpabilité. Pourtant, dans un sursaut d’audace, la vérité se fraie un chemin à travers le témoignage inattendu de Faida, soutenue par son assistante sociale. Le véritable coupable n’est autre que Modilo, leur professeur de mathématiques, trahissant ainsi la confiance sacrée qui lie un éducateur à ses élèves.

Dans cette interview exclusive, Don Chirhuza, également Headmaster à Nélites Fils Academy, se livre sans détour. Il revient sur la genèse de ce film poignant, son combat pour briser les chaînes de l’injustice et sa vision d’un cinéma qui réconcilie l’art et la responsabilité. Entrez dans l’univers d’un réalisateur visionnaire, où chaque image porte l’empreinte d’un cri pour la vérité et la dignité.

Le court-métrage de « Le Jour de justice «

Qu’est-ce qui vous a inspiré à raconter cette histoire particulière dans le film “Le jour de justice” ?

Don Chirhuza : J’ai été inspiré par les accusations des dérapages dont beaucoup de personnes auraient été victimes en 2015 de la part de certains juges et Officiers du ministère public. J’avais fait un constat à ce moment-là : les procès sur les cas de violences sexuelles étaient très récurrents et dans la plupart des cas, les condamnations étaient contestées par les accusés mais cela n’empêchait pas l’exécution de la peine sans forcément moyen de recours.

À force de vouloir arrêter le fléau, on se contentait de l’aboutissement du procès dans un temps record sans forcément exploiter toutes les pistes possibles et c’est le nombre de procès qui était plus important non forcément de la justice rendu car condamner un innocent reviendrait à promouvoir l’injustice. C’est sur base de ces éléments que j’ai poussé une réflexion pour remettre en question la qualité de justice rendue dans un procès de violences sexuelles en particulier.

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Pouvez-vous nous parler de votre processus créatif ? Comment transformez-vous une idée en un film ?

Tout d’abord, quand j’ai une inspiration (idée), je l’étudie dans plusieurs angles avant de choisir dans lequel dois-je développer l’histoire. Je me base sur l’originalité et le potentiel à toucher un public varié. Quand il s’agit surtout de film d’auteur. Une fois en possession d’une histoire percutante, je réfléchis aux alliés qui pourront accompagner le processus de création de ce futur film. En parlant des alliés, je vois : producteurs, mécènes ou investisseurs etc… Après les réponses satisfaisantes aux préoccupations des alliés, je planifie avec le producteur dans l’idéal des cas.

Mais, étant donné que dans l’industrie locale nous faisons encore de production indépendante, souvent je m’occupe seul de la planification et ça prend plus de temps que prévu s’il y avait un producteur. Et c’est sur base de cette planification que d’autres étapes suivent notamment les repérages et le casting avant logiquement de se mettre au tournage et plus tard à la post-production qui marque la fin du processus de création.

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Qu’est-ce qui a guidé vos choix lors du casting ? Était-il important pour vous de travailler avec certains acteurs en particulier ?

En tant que réalisateur, il est important de travailler avec un acteur/une actrice qui interprétera à la perfection –ou du moins presque– le personnage pour lequel il a été choisi. Je n’ai pas de préférence particulière pour tel ou tel autre acteur. Il suffit que je sois convaincu par caractéristiques physiques, techniques et artistiques que je trouve chez un acteur et sa capacité à s’adapter au personnage pour le retenir pour un rôle.

Mais n’empêche qu’il y ait dans l’industrie locale des acteurs qui ont des capacités que j’apprécie et que j’aimerais utiliser si j’ai un jour un personnage qui correspondait à leurs profils. Pour revenir à la question, prenons, à titre d’exemple, le rôle de Balume, interprété par Muhindo wâ Mirurumo. L’élément qui avait beaucoup joué en sa faveur, par-dessus ses capacités indiscutables d’acteur, c’est le fait qu’il connaissait le début de ce projet. Il maîtrisait par cœur cette histoire et ses capacités lui étaient imposées comme incontournable pour ce rôle.

Quant à Merveille Rushago, c’est une actrice qui a mis tout le monde d’accord dans l’industrie locale par son jeu d’actrice. Elle sait se métamorphoser sur le plateau de tournage, quel que soit le personnage et elle en a la volonté. Dans la peau d’une victime dans ce film, n’importe quel réalisateur avisé l’aurait choisi.

Quels ont été les plus grands défis que vous avez rencontrés lors du tournage de ce film, et comment les avez-vous surmontés ?

Mon plus grand défi dans cette production a été la documentation. La matière de justice traitée dans ce film est complexe et trop technique. À côté de ça, il y a aussi l’aspect d’actions humanitaires dans le combat contre les violences sexuelles qu’il fallait combiner à celà. Donc j’avais deux matières techniques que je devais traiter sans avoir droit à l’erreur. Ce qui constitue un véritable casse-tête pour quelqu’un comme moi qui suis en dehors desdits domaines. Il fallait que le film soit proche de la réalité et crédible.

Je me rappelle avoir fait plusieurs tours auprès de juristes et humanitaires différents qui parfois se contredisent. Passer des nuits à lire les documents, voir des films qui avaient déjà été traités sur le même sujet et moi je devrais trouver les éléments qui devraient constituer au milieu de ces chocs d’idée ou devrait dire croisement de regards techniques. Pour moi, qui ne suis pas du domaine, ça n’a pas été facile. J’ai dû refaire le tournage une seconde fois à cause d’une erreur d’anonymat de la victime. Cela a beaucoup impacté les finances de la production sans parler de l’épuisement pour les techniciens, les acteurs et moi-même.

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Comment décririez-vous votre style de réalisation, et comment ce style se reflète-t-il dans ce film ?

Mon style de réalisation, je peux le qualifier de “réalisme symbolique”. C’est un concept que je me suis imaginé (je n’aime pas le conformisme), c’est-à-dire que je fais de mon mieux pour raconter l’histoire avec les images plus proches que possible de l’environnement réel du tournage tout en représentant les personnages en tant que des symboles plus que des individus qu’ils peuvent paraître. Ainsi chaque image pour moi, constitue une lettre décrivant un message sous-jacent.

Quand je réalise “Le jour de justice” par exemple, je parle pas simplement de violences sexuelles mais je l’utilise comme élément pour poser les bases de réflexions sur la procédure judiciaire en RDC. De plus , je donne un avis sur les procédures judiciaires en général en RDC. Ainsi je parle d’une situation générale avec une histoire simple et particulière. Les images sont simples et on voit dès le premier regard, une histoire sur la lutte contre les violences sexuelles mais quand on y réfléchit, on verra que Balume est une représentation de toutes ces personnes qui ont souvent été injustement condamnées, soit parce que la justice n’a pas pu mieux se pencher sur les dossiers, soit par magouilles parce que le camp adverse est privilégié.

Pour sa part, Faida c’est l’image de victimes. D’une manière générale, elles sont disposées à coopérer avec le tribunal, mais en réalité, ce n’est pas cette procédure qui est nécessaire pour elles. Mais la JUSTICE en soit, la réparation des dommages subis, et la restitution de ses droits. Condamner quelqu’un c’est bien pour le tribunal mais pas forcément pour la victime quant à Modilo, c’est l’image de vrai bourreau qui connaissent la loi, ont l’argent et des “parapluies”. Donc ils peuvent tout se permettre. Ils peuvent facilement se soustraire d’un procès par n’importe quel moyen et laisser un innocent derrière les barreaux.

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Y a-t-il un message ou un thème particulier que vous espérez que le public retienne après avoir vu ce film ?

Le message se trouve dans la nuance au niveau du titre. “Le” Jour de justice, comme étant une aspiration à un état d’équilibre social en opposition de “Jour de justice” comme souvent j’attends les gens le designer, qui pour moi parait comme une certitude que la justice a été rendue ce jour-là. C’est-à-dire que pour moi, la justice reste une réalité à laquelle nous aspirons et qui doit arriver grâce à la prise de conscience et assumer les responsabilités qui sont les nôtres chacun en ce qui le concerne. Le thème principal du film est la justice.

Dans ce film, je présente la justice comme un état de conscience de la nécessité de rétablissement de l’équilibre de vie sociale qu’une pratique ou une procédure matérielle.

Quelle a été la réaction qui vous a le plus marqué jusqu’à présent concernant ce film ? Était-ce celle à laquelle vous vous attendiez ?

Je dirais qu’il y a deux réactions qui m’ont le plus marquée. La première c’est la comparaison que le public fait vis-à-vis de la situation de Faida, interprétée par Merveille Rushago, surtout au niveau où elle fait sa déposition devant le tribunal. La deuxième réaction qui m’a aussi marquée c’est l’indignation du public contre Modilo, le vrai coupable interprété par l’expérimenté Tshivas Tsongo.

Pendant la réalisation, j’avais à l’esprit l’intention d’essayer de pousser le public à s’indigner contre Modilo. C’était un moyen de créer un débat sur le sujet lorsqu’on se rend compte que Balume, qui est incarcéré, n’est pas le vrai coupable et le vrai coupable jouit d’une liberté. C’est l’intrigue de l’histoire. En effet tout était voulu et la réaction du public sur le film est telle que je l’ai envisagé au départ, à quelque différence près.

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Quels sont vos projets ou rêves cinématographiques ? Y a-t-il un genre ou une histoire que vous mourrez d’envie d’explorer ?

Mon rêve ? C’est vraiment compliqué pour moi de parler de rêve. Peut-être la réintroduction de l’Afrique dans le cinéma africain, je ne sais pas trop. Hormis ça, je peux aussi dire que je rêve de voir les cinéastes à un niveau où ils vont se conformer aux exigences des productions internationales pour briser ce cycle de cinéma par procuration.

C’est-à-dire l’histoire de l’Afrique rencontrée par les autres. Voilà pourquoi je porte en ce jour le projet du premier institut de formation certifiante et qualifiante spécialisé dans le cinéma et l’art audio-visuel. Je peux dire alors que mon rêve c’est de voir les cinéastes locaux, raconter, à partir des éléments locaux, des créations d’histoires de portée internationale.

J’envisage d’être spécialisée dans les films d’auteurs socio-dramatiques qui racontent la tradition africaine sans clichés et stéréotypes. Le génie africain est encore absent dans le concert de nations à cette ère de la mondialisation ou chaque peuple tend à apporter sa connaissance pour l’évolution de l’humanité.



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