COMMENT ET OÙ
Comme souvent avec la politique nucléaire, peu de détails sur les plans russes ont été rendus publics, laissant de nombreuses questions sans réponse.
Par exemple, on ne sait pas comment les armes seraient livrées si l’ordre de les utiliser dans la colère arrivait.
Poutine a déclaré que “10 avions (biélorusses) sont prêts pour l’utilisation de ce type d’arme” et que la Russie a également envoyé un système de missiles Iskander à capacité nucléaire.
Moscou commencera à former des équipages le 3 avril et prévoit de terminer la construction d’une installation de stockage spéciale pour les armes nucléaires tactiques d’ici le 1er juillet.
“Jusqu’à présent, il n’y a aucun signe de ces travaux de construction. Il semble relativement peu probable qu’ils puissent être achevés en trois mois”, a déclaré Marc Finaud, vice-président des Initiatives pour le désarmement nucléaire (IDN) basées en France.
“Nous pouvons être sûrs que tous les satellites espions du monde scannent la Biélorussie” pour voir dans quelle mesure les annonces de Poutine se reflètent dans la réalité, a-t-il ajouté.
L’expert russe indépendant Pavel Podvig a déclaré: “Il est très peu probable – à mon avis impossible – que de véritables armes nucléaires soient transférées en Biélorussie.”
QUEL POUTINE CROIRE ?
Tandis que Poutine faisait miroiter la menace d’une guerre nucléaire, la doctrine russe d’utilisation des armes nucléaires n’a pas changé.
Et la rhétorique post-invasion va à l’encontre des promesses précédentes de Moscou.
En janvier 2022, la Russie a signé une déclaration aux côtés des autres membres permanents du Conseil de sécurité de l’ONU selon laquelle “une guerre nucléaire ne peut être gagnée et ne doit jamais être menée”.
Bien que la politique mondiale ait depuis connu un changement d’époque, Poutine a fait une remarque similaire la semaine dernière lors de la visite à Moscou du dirigeant chinois Xi Jinping, qui s’est abstenu de soutenir publiquement l’invasion.
“Il ne peut y avoir de gagnants dans une guerre nucléaire, et elle ne doit jamais être déclenchée”, ont déclaré les deux hommes dans la déclaration commune.
L’ancien diplomate Finaud a noté que les dirigeants chinois et russe se sont également engagés à ce qu'”aucune arme nucléaire ne soit stationnée sur un sol étranger”.
Poutine “viole la position constamment affirmée de la Russie”, a-t-il ajouté.
PROLIFÉRATION
Comme souvent lorsque Poutine fait monter la température rhétorique, les gouvernements occidentaux ont cherché à projeter le calme.
“Nous n’avons vu aucune indication qu’il (Poutine) ait tenu sa promesse ou déplacé des armes nucléaires”, a déclaré dimanche le porte-parole du Conseil de sécurité nationale des États-Unis, John Kirby.
“Pour l’instant, ce n’est qu’une annonce. Il n’y a pas de danger immédiat d’utilisation nucléaire”, a reconnu Finaud – tout en avertissant que tout mouvement d’ogives risque de tomber sous le coup d’une erreur humaine, d’un détournement ou d’un accident.
Il y a aussi un inconvénient évident pour Poutine à faire trop souvent des menaces nucléaires.
“Toutes les rumeurs sur les armes nucléaires font également augmenter la demande de dissuasion dans les pays de l’OTAN”, a déclaré Lewis.
“C’est en grande partie pourquoi vous voyez la Suède et la Finlande rechercher la sécurité par le biais de l’adhésion à l’OTAN”.
La Campagne internationale pour l’abolition des armes nucléaires (ICAN) a rappelé lundi que les armes dites “tactiques” peuvent atteindre une force explosive allant jusqu’à 100 kilotonnes – contre seulement 16 pour la bombe qui “a détruit Hiroshima et tué 140 000 personnes” en août 1945.
