Éditorial | La vulnérabilité de Poutine

Éditorial |  La vulnérabilité de Poutine

2023-06-26 23:22:08

Le pacte conclu avec le président de la Biélorussie, Alexandre Loukachenkode sorte que le chef du Grupo Wagner, Yevgueni Prigozhinarrêta ses troupes à quelque 250 kilomètres de Moscou révèle la faiblesse et vulnérabilité du président russe Vladimir Poutine. Qu’un homme comme lui, qui n’a pas hésité à liquider des opposants accusés d’actes beaucoup moins graves que ceux commis par Prigozhin, a été contraint de accepter que les mercenaires rebelles restent impunis et que son patron soit libre (pour l’instant) est un signe d’impuissance dont Poutine ne pourra se débarrasser. Dans son discours étonnamment court de lundi soir, Poutine a tenté de montrer sa performance en tant que geste de clémence devant ceux qui se sont battus pour leur pays, et de la responsabilité d’avoir préféré éviter “un bain de sang” bien qu’ayant pu réprimer le putsch par la force. Une fois de plus, il a proposé aux mercenaires trois options possibles (obtenir leur diplôme, rejoindre les rangs de l’armée ou se réfugier en Biélorussie), sans mentionner leur chef.

Dans un pays comme la Russie, de longue tradition autoritaire, où Poutine a forgé son pouvoir et son prestige social avec un mélange de autorité impitoyable à tout soupçon de réponse et de médiation entre les élites économiques et militaires, il est étonnant qu’un dirigeant comme lui ait accepté une accord qui peut être si défavorable pour son avenir politique si, après avoir accusé Prigozhin de haute trahison, la bienveillance finit par être interprétée comme une faiblesse. Surtout quand il n’est pas vrai, comme il le soutient, qu’aucune goutte de sang n’a été versée pendant le coup d’État. L’abattage d’un avion et de plusieurs hélicoptères qui ont tenté, sans grand succès, d’arrêter la colonne blindée de Wagner a coûté aux troupes russes au moins 20 morts, dont certains officiers.

Pour finir d’évaluer la portée de la humiliation subie par Poutine, il faudra attendre pour connaître les détails de cet épisode politico-militaire insolite. Et si sa vengeance vient même s’il fait froid. Il faudra attendre qu’il se termine, car si la majorité des experts et des ministères des affaires étrangères s’accordent sur quelque chose, c’est que nous sommes encore au premier “tour” de l’affrontement. Ce qui est certain, c’est qu’une telle opération, qui a commencé avec les mercenaires occupant Rostov, s’est poursuivie par une marche sur Moscou et s’est terminée sur la base d’un accord obscur qui ne fait qu’ajouter de l’incertitude à ce qui s’est passé, ne restera pas comme la protestation naïve avec laquelle que maintenant Prigozhin a l’intention de régler la question.

Dans les formes, le conflit déclenché par le chef du groupe Wagner oscille entre tragédie et farce, mais il serait stupide de sous-estimer. Qu’un groupe de mercenaires dirigé par un personnage histrionique ait erré librement, pendant 48 heures, dans un pays qui a environ 6 000 ogives nucléaires devrait inquiéter le monde entier. Pas seulement en Occident. Le silence maintenu par le gouvernement chinois est significatif. Car il se trouve que le seul autre soutien sans équivoque que Poutine a reçu est celui de l’Iran des ayatollahs, de la Turquie d’Erdogan et du Venezuela de Maduro. Les grandes puissances doivent prendre acte de ce qui s’est passé et s’entendre, au-delà de leurs divergences, sur des mécanismes de sécurité pour faire face à des situations similaires qui pourraient mettre en péril la sécurité de la planète entière.



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