“Être policier”, le podcast d’un agent de Sarcelles qui partage le quotidien et l’intimité de ses coéquipiers.

“Être policier”, le podcast d’un agent de Sarcelles qui partage le quotidien et l’intimité de ses coéquipiers.

Il invite ses collègues à se confier, à raconter leurs histoires intimes et leur quotidien de policier, s’attache à les faire connaître au travers de portraits sonores. Guillaume Olivès, un jeune policier de Sarcelles (Val-d’Oise) de 36 ans, un « nuiteux » qui parcourt la nuit cette circonscription difficile du Val-d’Oise, réalise une série de podcasts lancée en janvier 2023, « Être flic »qui rencontre le succès avec 20 500 écoutes.

Le désir de faire partager le quotidien de ses collègues est venu après un accident de moto en 2019. « J’ai mis beaucoup de temps à m’en remettre, j’ai passé plusieurs mois en fauteuil. Cela a coupé deux ans de ma vie. Il y a eu le confinement et je me suis rendu compte que je ne connaissais pas mes collègues avec qui je passais pourtant des heures dans la voiture. »

Il soumet l’idée de ces podcasts à sa hiérarchie. « Elle a tout de suite approuvé mon projet et donné les moyens de le faire », confie le gardien de la paix qui trouve le financement auprès de la MGP (la mutuelle des forces de sécurité) et le soutien d’Emmanuelle Myoux, de l’agence Newing, qui assure la prise de son, le montage et la mise en ligne sur les plateformes, telles Spotify ou Deezer, Apple podcast…

Des témoignages sur des affaires marquantes

« Je vous emmène découvrir l’histoire de policières et policiers de tous horizons. Ceux que vous croisez en bas de chez vous, ceux que vous appelez au 17 », lance en introduction du podcast d’un policier le gardien de la paix de Sarcelles qui ne se sépare pas de son carnet de terrain. Aujourd’hui, 8 podcasts comme autant de portraits singuliers sont disponibles.

Le premier réalisé, celui de Thierry, un de ses collègues à la retraite après trente-cinq ans de service, reste pour lui marquant. Son collègue évoque une affaire qui l’a marqué « à vie », un enfant enlevé à Saint-Denis (Seine-Saint-Denis), qu’il retrouve avec ses collègues à force de patrouiller dans le secteur du Stade de France, qui est alors dans ces années 1990 un vaste chantier.

« On a appris après que l’auteur avait l’intention de tuer l’enfant. On l’a sauvé de ses griffes et de la mort », confie le commandant honoraire qui ne cache pas les répercussions de cette affaire comme d’autres, violentes, la dépression et les remises en question. « Les gens se sont attachés à son histoire. Beaucoup me demandent de ses nouvelles », confie Guillaume Olivès, qui a intitulé cet épisode « Flic et résilience ».

Cécile parle avec humanisme de son travail auprès des mineurs

Le policier de Sarcelles a rencontré également Sabrina, mère de famille et policière à Caen (Calvados), qui jongle avec les enfants et son métier. Il donne la parole aussi à Quentin, d’une famille où l’on est flic de génération en génération. Sa grand-mère l’était, comme son père et sa mère. Il a perdu son père dans des circonstances qu’il ignore et qu’il ne veut pas connaître. Il vit avec ça, ce qui ne l’empêche pas d’être plein de vie. »

On croise aussi Mohamed au cœur de la mission d’exfiltration des ressortissants français d’Afghanistan, ou Cécile qui parle avec humanisme de son travail auprès des mineurs.

Le choix des policiers rencontrés doit recevoir l’aval du Sicop (le service d’information et de communication de la police nationale). « Mais il n’y a jamais eu de refus », souligne Guillaume Olivès. « Ensuite, le Sicop n’a pas le droit d’écoute et découvre le podcast sur les plateformes. J’ai une belle liberté de mouvement. Ce qui m’a étonné au début d’ailleurs. J’espère que cela rend ces rencontres d’autant plus humaines. »

Des policiers « aux âmes fracassées »

Certains policiers ont parfois refusé pour des raisons privées, « pour protéger leurs familles », les autres reçoivent Guillaume et Emmanuelle Myoux chez eux. « Les policiers ont pour habitude de poser des questions. Il faut parfois leur sortir les vers du nez. Mais il arrive que le collègue enclenche et parle pendant une demi-heure. C’est la magie des rencontres », poursuit-il.

« Toutes les histoires de flic sortent de l’ordinaire ! Les policiers sont un peu des âmes fracassées. Il y a alors des jardins secrets qu’on ne force pas. C’est parfois dans un regard que l‘on se comprend… »

Ces jardins secrets de Sarcelles, Guillaume pense aussi à les évoquer ultérieurement sur un autre support. Sorti d’école en 2017, originaire de Toulouse (Haute-Garonne), il est arrivé à Sarcelles où il est toujours en service, la nuit, six ans plus tard. « Quand on arrive, jeunes policiers, il y a un choc culturel, de nouveaux codes à appréhender, d’autres gens… Sarcelles fatigue par le rythme de travail. Les interventions classiques peuvent évoluer très vite. »

« Un métier dur, fatigant, usant »

Il évoque la gare, « la plaque tournante de tout », avec ses vendeurs à la sauvette déjà en place quand il quitte le boulot au petit matin. « Il faut rester sur ses gardes mais c’est une belle ville, une fourmilière pour les policiers et une ville aussi à laquelle on s’attache. Il y a du travail à faire. »

Il parle « d’un métier dur au quotidien, fatigant, usant ». « Il n’y a pas d’heure, on est là quand on nous appelle. Nous sommes le dernier recours », ajoute Guillaume, qui va conclure cette première saison de podcasts avec deux nouveaux épisodes. « Il me tarde d’inviter un nuiteux », confie-t-il.

Facebook
Twitter
LinkedIn
Pinterest

Leave a Comment

This site uses Akismet to reduce spam. Learn how your comment data is processed.