2024-08-16 10:54:17
Les quatre « martyrs d’Uvira » seront béatifiés le 18 août : un prêtre diocésain et trois missionnaires xavériens italiens tués en 1964 en République démocratique du Congo
Nous sommes en début d’après-midi du 28 novembre 1964, un samedi de guerre comme tant d’autres à Baraka et Fizi dans le diocèse d’Uvira, à l’est de la République démocratique du Congo. Une guerre qui fait rage dans le pays depuis plusieurs mois, entre l’armée gouvernementale et les forces qui font référence à l’homme politique et révolutionnaire Pierre Mulele. Le Père Luigi Carrara, missionnaire xavérien, prie dans l’église de Baraka où il est récemment arrivé : il a quitté Fizi pour être aux côtés du frère Vittorio Faccin, resté seul dans la mission. Ce dernier est comme toujours occupé : il s’agit de construire le presbytère, un nouvel abri en brique pour lui et son frère, expulsés par les rebelles.
C’est dans cette situation de calme apparent que le Colonel Masanga, à la tête d’une troupe de rebelles, fait irruption dans la mission avec son entourage sans raison ni justification, menaçant puis ôtant la vie d’abord au Frère Vittorio qui resta sans défense jusqu’au bout, puis du Père Luigi, qui entre-temps a quitté l’église en portant toujours l’étole pour les confessions qu’il administre à quelques femmes. Le Père Carrara s’agenouille résolument à côté du corps de son frère récemment tué pour prier, et ainsi, dans la prière, il est tué. Après quelques heures, ce sera le tour du Père Giovanni Didonè et de l’Abbé Albert Joubert, cette fois de Fizi : la même dynamique saturée de colère et d’horreur, la même disposition au martyre.
En fait, ces quatre hommes de Dieu étaient restés là à leur place malgré l’arrivée des troupes « mulélistes », malgré le fait que tout autour des Européens et des religieux d’autres confessions avaient fui, malgré une longue série d’avertissements (menaces, violences physiques) attentats, déprédations, incarcérations) : ils étaient restés, bien conscients de ce qu’ils risquaient, sans possibilité de malentendu. Mais ils étaient là par amour pour ce qui était devenu leur peuple, parce que le berger ne quitte pas le troupeau quand les loups arrivent, et par amour pour la vocation qu’ils avaient épousée des années auparavant. Servir jusqu’à la fin, même jusqu’à la Croix.
Le Père Luigi, 31 ans, était en RD Congo depuis moins de deux ans. Le frère Vittorio, 30 ans, et le père Giovanni, 34 ans, étaient arrivés ensemble d’Italie presque cinq ans plus tôt. Trois jeunes missionnaires xavériens avec un chemin de foi intense, trois vocations fortement vécues et embrassées, ainsi que la mission tant désirée en Afrique. Il est donc facile de comprendre la proximité et l’affection toujours manifestées envers les populations de Baraka et de Fizi, cette dernière mission lancée de toutes pièces par le Père Giovanni lui-même. Des missions qui sont également devenues des points focaux pour l’éducation des jeunes et des enfants, pour la croissance humaine des croyants et des non-croyants et pour l’aide matérielle à tous ceux qui demandent du soutien.
Après le désarroi et les larmes initiales, la perte des trois Xavériens a suscité une grande dévotion et un esprit filial chez les Congolais locaux, avec une affection particulière pour leurs dépouilles mortelles qui reposent encore dans les églises de Fizi et Baraka. Un parcours tout aussi original est celui de l’abbé Albert, prêtre diocésain congolais de cinquante-six ans, fils du célèbre Léopold-Louis Albert, héros anti-esclavagiste de la fin du XIXe siècle en Afrique subsaharienne. Même pour l’abbé, c’était une vocation faite d’un grand travail, d’une aide disponible envers les populations en difficulté, ainsi que d’une attention particulière envers les jeunes dont il fut l’enseignant à plusieurs reprises et pendant de longues années au cours de son ministère.
Ce sont donc quatre hommes appartenant profondément au peuple à qui ils ont donné leur vie et qui ont inspiré de nouvelles œuvres de spiritualité et de fidélité grâce à leur exemple. Pour preuve, depuis leur martyre, l’anniversaire de leur mort s’avère régulièrement être une vive occasion de célébrer une Eucharistie très participative : au fil du temps, les fidèles ont reconnu et continuent de reconnaître dans le sacrifice de leurs martyrs l’amour de Dieu et l’espérance du salut en Jésus-Christ. Mais ce n’est pas tout. Pendant une dizaine d’années, les catéchumènes reçurent le baptême sur le lieu précis du martyre, qui devint plus qu’un symbole, presque la confirmation du passage du bâton : de nouveaux disciples de Jésus-Christ naissaient du sang des martyrs.
Les manifestations d’attachement à la vie et à l’exemple des martyrs proviennent également du fait que la population a continué à souffrir pendant longtemps des guerres et des injustices, jusqu’aux premières années de ce millénaire. Dans ces vicissitudes, d’autres chrétiens ont donné leur vie pour l’amour du Christ. Aujourd’hui encore, dans des contextes parfois différents, que ce soit au Nord ou au Sud-Kivu, les chrétiens rappellent que plutôt que de trahir la foi, il vaut mieux accepter la mort et rester fidèle à l’Évangile de Jésus.
LE LIVRE : VIE ET PENSÉES DU NOUVEAU BIENheureux
« Blessed Boys » est l’histoire de quatre hommes et de leurs choix extraordinaires. Quatre paraboles retracent individuellement depuis les épisodes de l’enfance jusqu’à l’accomplissement commun de la plus grande vocation chrétienne : donner sa vie pour ses amis, par amour pour Dieu. Celles de Vittorio, Luigi, Giovanni et Albert furent des vies extraordinairement humbles, mais aussi des vies. d’hommes heureux, qui seront proclamés bienheureux le 18 août. Écrit par Lisa Zuccarini (Berica Editrice, pp. 200, 14,50 €), le livre s’appuie sur des sources historiques et des documents originaux conservés dans les archives xavériennes.
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