À Sarcelles (Val-d’Oise), certains habitants aiment à rappeler que la place de France, aux Flanades, a été inspirée de la place Saint-Marc à Venise : même architecture, même proportion, mêmes arcades… sans compter les pigeons ! Une véritable plaie pour certains qui se plaignent notamment des fientes qui tapissent le sol ou ornent l’œuvre monumentale « Le Phoenix aquatique » de Caroline Lee. « C’est gênant. Il y a des enfants qui viennent jouer ici et le sol est maculé de déjections, estime une très jeune maman. On ne peut pas se poser sur les bancs pour manger, par crainte de recevoir des fientes. »
D’autres, au contraire, estiment qu’ils font partie du paysage. En premier lieu, les enfants qui s’amusent à les chasser. « Ça contribue à la beauté de la place. Ça amène un peu de nature », considère un autre. « Nous, on habite ici et on apprécie leur présence. Les enfants sont contents. »
Des options éthiques et efficaces
Si à Venise, certains restaurateurs et hôteliers ont décidé d’avoir recours à des pistolets à eau pour chasser les volatiles chapardeurs, à Sarcelles, la mairie a opté pour une autre méthode contestée par l’association Paris animaux zoopolis (Paz) : la capture suivie du gazage. Ses membres entendent tracter ce mercredi 22 février à Sarcelles pour dénoncer cette méthode avant de se rassembler devant le centre administratif. Ils espèrent ainsi infléchir les choix de la municipalité. « Il est temps que la mairie de Sarcelles prenne au sérieux la souffrance des pigeons en mettant un terme aux campagnes de gazage. Des méthodes éthiques et efficaces comme les pigeonniers contraceptifs existent », lâche Amandine Sanvisens, cofondatrice du Paz, qui devrait être reçue par la municipalité après les vacances scolaires.
« En avril 2022, nous avons été alertés par un habitant nous signalant des cages sur le toit du centre commercial Les Flanades, explique-t-elle. Parallèlement, tout au long de l’année, nous avons sollicité 141 villes en France pour savoir comment elles éradiquaient les pigeons. Un tiers d’entre elles ne nous ont pas répondu dont Sarcelles. Nous avons dû saisir le tribunal administratif de Cergy le 28 octobre. »
Le 12 janvier 2023, l’association recevait les documents. Le devis de l’entreprise prestataire, validé le 8 février 2022 par la ville, indique « la pose de 10 cages de capture sur les terrasses du centre commercial des Flanades, avec une semaine en position déverrouillée, avec appâts pour créer un effet de mouvement et 3 semaines en position fermée, pour des captures quotidiennes. Lors de nos interventions, les pigeons seront systématiquement éliminés par caisson CO2, mis en sac hermétiquement clos, puis acheminés en centre de destruction agréé », peut-on y lire. Contactée, la mairie indique « avoir pris en compte les plaintes de l’association et depuis avril 2022 ces dispositifs ont été retirés. Donc aucun pigeon n’est mis à mort depuis cette date. » Dans le cadre de la réfection de la place de France, elle installera un pigeonnier quelques mois l’année prochaine sur la place.
Enghien-les-Bains dément tout gazage
Dans le département, Enghien-les-Bains a aussi été identifiée par Paz comme utilisant ces méthodes contestables. « Cette commune a installé des pigeonniers contraceptifs et dans le même temps, commandite des campagnes de gazage. C’est d’ailleurs le même prestataire qui effectue les deux missions (entretiens des pigeonniers et gazage) », poursuit PAZ en s’appuyant sur les documents communiqués par la ville dont le bilan de l’activité entre 2018 et 2021 du prestataire.
Outre les pigeonniers square Jean-Mermoz et Parc Sainte-Jeanne, ils indiquent « une régulation des pigeons par système de cage ». « Ils entretiennent le flou. Mais s’ils les capturent, c’est bien pour les tuer et pas les relâcher. Pour nous, ces pigeons sont clairement gazés », assure Paz.
Le maire Philippe Sueur (LR), s’inscrit en faux. « Nous n’avons jamais gazé les pigeons ou alors c’était il y a très très longtemps, assure-t-il. Nous avons deux gros pigeonniers contraceptifs où les œufs sont secoués. Et nous faisons appel pour cela à notre prestataire, la société Sogepi », poursuit l’élu, qui devrait « s’entretenir avec les membres de l’association courant mars ». Un peu plus de 2000 œufs ont ainsi été stérilisés entre 2018 et 2021.
Paris animaux zoopolis défend cette méthode du pigeonnier et du maïs contraceptif : « ce sont des investissements, mais au fil des années cela coûte moins cher à la ville. Il y a toujours de l’argent pour tuer des animaux et moins pour une cohabitation pacifique », estime Amandine Sanvisens dont l’association a obtenu une petite victoire dans le département. En septembre dernier, la GMF a retiré le filet anti-pigeons qu’elle avait posé sur son bâtiment près de la gare d’Ermont-Eaubonne, cause de la mort de plusieurs spécimens. Dans la foulée, le 25 octobre, la députée du Val-d’Oise Cécile Rilhac (Renaissance) posait une question écrite au gouvernement concernant justement l’installation de filets anti-pigeons.
Arnaud Bazin, le sénateur (LR) du Val-d’Oise et président de la section Animal et société du Sénat entend faire de même, « soucieux de trouver la moins mauvaise solution afin de diminuer les nuisances liées aux pigeons sans leur nuire ». Une option qui pourrait satisfaire une habituée de la place des Flanades à Sarcelles : « C’est sale, mais certaines personnes nourrissent les oiseaux. Pour autant, il ne faut pas maltraiter ces pigeons. Ils n’ont rien demandé. »
2023-02-21 11:00:00
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