Gulf se taille une place dans le cinéma mondial
Le Festival international du film de la mer Rouge, à Djeddah, montre à quel point le Golfe est en train de devenir une plaque tournante du cinéma (File/AFP)
Le Moyen-Orient abrite l’industrie cinématographique qui connaît la croissance la plus rapide au monde et la région du Golfe recèle un fort potentiel de progrès dans ce secteur. Propulsée par des investissements publics et croissants du secteur privé, la région produit du contenu innovant, organise des festivals de films internationaux et incite les cinéastes du monde entier à produire des longs métrages localement. Le Festival international du film de la mer Rouge, à Djeddah, montre à quel point le Golfe est en train de devenir une plaque tournante du cinéma.
Le modèle saoudien a été particulièrement réussi. Six ans après que le Royaume a levé une interdiction vieille de trois décennies, l’industrie cinématographique saoudienne a généré près d’un milliard de dollars de revenus. Le marché cinématographique saoudien connaît la croissance la plus rapide de la région, avec un taux de croissance annuel de 25 pour cent. La notion même de divertissement a évolué, alors que 17 millions de spectateurs stimulent une industrie qui vise à créer 2 000 écrans dans tout le Royaume d’ici 2030. Le Royaume a récemment lancé le Saudi Film Fund, doté de 100 millions de dollars, pour promouvoir le contenu local et a ouvert les studios Al-Hisn Big Time. , réparti sur 10 500 mètres carrés à Riyad.
Il est clair que l’industrie cinématographique apporte un élan significatif à l’économie locale. Un seul film a le potentiel d’employer des centaines de personnes, étant donné la myriade d’éléments de la réalisation cinématographique – de la conception et de l’entretien d’un décor au jeu d’acteur et aux promotions. Le secteur a également fourni des possibilités de collaboration saoudienne avec des plateformes internationales notables, telles que Vox et Netflix. L’industrie du divertissement dans son ensemble peut apporter une contribution de 4,2 % à l’économie saoudienne d’ici 2030 grâce à la création de 450 000 emplois, selon le ministère de l’Investissement. La construction d’infrastructures de production cinématographique de haute qualité ouvre également la porte aux producteurs internationaux cherchant à louer des sites pour leur contenu, ce qui entraîne des investissements étrangers supplémentaires dans le Royaume.
En même temps, le cinéma est un catalyseur de changement sociétal et culturel. Alors que le Royaume passe du visionnage de longs métrages internationaux à la production des siens, il a découvert que le cinéma était un moyen aux multiples facettes pour enregistrer l’histoire, discuter des questions socioculturelles et, peut-être plus important encore, forger une identité nationale forte. Pour le jeune public du Golfe, une industrie cinématographique locale forte offre non seulement un débouché à la créativité mais aussi un sentiment d’autosuffisance nationale dans le domaine du divertissement.
Le cinéma est une voie aux multiples facettes pour enregistrer l’histoire, discuter de questions socioculturelles et former une identité nationale forte.
Zaid M. Belbagi
Un nouveau nationalisme est en hausse en Arabie Saoudite et chez ses voisins, alors que les États du Golfe promeuvent la transformation socio-économique et créent de nouvelles opportunités pour la jeunesse. À mesure que l’État promeut ce domaine, les professionnels créatifs locaux trouveront des opportunités dans leur pays d’origine.
De plus, la société du Golfe, comme toute autre, sera celle qui s’attachera le plus aux représentations populaires de sa propre histoire, de sa culture et de son humour. Les productions cinématographiques locales sont essentielles pour que les jeunes du Golfe exposent leurs propres interprétations de la modernité et encouragent les conversations autour de celle-ci.
Toutefois, le potentiel de l’industrie cinématographique ne se limite pas à ses contributions économiques et culturelles. Le cinéma en tant qu’outil d’influence du soft power est sans égal, comme le montrent le succès d’Hollywood aux États-Unis, de Bollywood en Inde et de Nollywood au Nigéria. À mesure que l’Arabie saoudite et la région dans son ensemble remodèlent leur politique étrangère, le cinéma local deviendra un élément clé de leur soft power en projetant une image favorable au sein de la communauté internationale. Investir dans le cinéma permet à ces pays de mieux faire connaître la région au public international et ainsi d’attirer les touristes. C’est également crucial pour la réforme de l’image traditionnelle de la région et le renforcement de la diplomatie culturelle.
Le ministère saoudien de la Culture souhaite exploiter ce potentiel et a créé en 2020 la Commission du cinéma pour le développement du secteur. La commission gère le Film Saudi Incentive Program pour encourager les sociétés de production saoudiennes et internationales. Il a également créé le Programme des cinéastes pour promouvoir l’éducation cinématographique et la formation professionnelle. Notamment, le ministère de la Culture et la Commission du cinéma se sont également associés pour lancer la Conférence sur la critique cinématographique à Riyad afin de créer une culture de critique cinématographique.
Alors que l’Arabie saoudite et la région dans son ensemble remodèlent leur politique étrangère, le cinéma local deviendra un élément clé de leur soft power.
Zaid M. Belbagi
L’industrie cinématographique du Golfe regorge de potentiel et des succès similaires ont également été observés dans d’autres parties de la région. Les Émirats arabes unis revendiquent 30 pour cent des parts de marché du cinéma au Moyen-Orient et Dubaï est un lieu de tournage particulièrement populaire. Même si les investissements publics et privés sont considérables dans ce secteur, le plein potentiel du contenu local émirati n’a pas encore été pleinement exploité. De même, alors que les industries cinématographiques bahreïnite, koweïtienne et omanaise en sont à leurs balbutiements, il existe d’importantes possibilités d’investissements publics supplémentaires dans ce secteur afin d’en récolter les bénéfices économiques et sociaux. Par exemple, Oman prévoit d’investir plus de 30 millions de dollars dans une Film City à Barka.
Alors que la région s’engage dans cette aventure, elle peut bénéficier des succès et des défis rencontrés dans les industries cinématographiques établies au Moyen-Orient et en Afrique du Nord. Le Maroc possède une forte culture cinématographique, comme en témoignent les productions locales acclamées par la critique comme « Ali Zaoua » et « Les Chevaux de Dieu ». C’est également un lieu de tournage populaire pour les longs métrages internationaux, tels que les classiques « Gladiator » et « Lawrence d’Arabie ».
Le Golfe se taille ainsi audacieusement une place dans le cinéma mondial, offrant au monde une fenêtre sur sa culture. Les visions nationales impressionnantes lancées par les États du Golfe cherchent à transformer non seulement leurs économies mais aussi leurs sociétés – et le cinéma est un outil important qui peut contribuer à ce changement en encourageant les voix créatives locales. Pour soutenir cette croissance, les gouvernements de la région devront maximiser la liberté de création, le soutien réglementaire et le financement.
Alors qu’un nombre toujours croissant de touristes et d’expatriés se rendent dans la région, une culture cinématographique bien établie leur offrira un style de vie conforme aux normes mondiales. Surtout, la voix du Golfe élargira la profondeur du cinéma mondial et présentera au public international une nouvelle approche de la narration.
- Zaid M. Belbagi est commentateur politique et conseiller auprès de clients privés entre Londres et le Conseil de coopération du Golfe. X : @Moulay_Zaid
Avertissement : les opinions exprimées par les auteurs dans cette section sont les leurs et ne reflètent pas nécessairement le point de vue d’Arab News.
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